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Je ne suis pas des vôtres…
Je n’étais ni de vos armateurs ni de vos équipages lorsque de vos ports de l’Atlantique, vous affrétiez vos bateaux pour y charger du « nègre » réduit en esclavage et le transportiez vers le nouveau monde.
Je ne portais pas vos uniformes quand: « Je naquis quand la patrie périssait. Vingt mille Français vomis sur nos côtes, noyant le trône de la liberté dans les flots de sang, tel fut le spectacle odieux qui vint le premier frapper mes regards… »
Ma terre était rude, elle avait besoin de mes bras, de mes forces, de mon temps. Ceux d’Haiti, de Madagascar, d’Afrique, d’Indochine avaient les leurs en plus de leur langue de leur culture, de leur savoir, de leur histoire…
Ma terre me suffisait, je n’avais nul besoin de conquête, de pacification, de colonisation; j’aimais trop la liberté pour avoir le goût de soumettre, de contraindre, d’imposer et je n’étais pas des vôtres à Sétif…mais j’étais à Charonne.
« Il y a cent ans, comme un, comme une,
Comme un espoir mis en chantier,
Ils se levaient pour la Commune,
En écoutant chanter Pottier… »
Et en face, vous toujours, arrogants, méprisants, oppresseurs, tyrans…Versaillais et Prussiens côte à côte, les militaires, les curés, les privilèges, les monopoles, les bourgeois contre le peuple.
Verdun,
au « Chemin des Dames », au « bois des Caures », vous nous aurez bien fait saigner avec cette « fleur au fusil !!! », le 173 ème y a versé sa part, il en est sorti exsangue et la Corse avec.
Vichy,
vous étiez bien plus nombreux du côté de la collaboration que dans les maquis de la résistance et les trains qui partaient pour les camps de la mort ne vous ont pas fait perdre le sens des affaires.
Vous contre les peuples toujours, vous agrippés à vos coffres forts, chantant, dansant, buvant au coeur du « Gai Paris » sur le même tempo que la « peste brune »… Le « Arbeit macht frei » bras dessus, bras dessous avec le « Famille, Travail, Patrie »…tandis qu’à deux pas, rue Lauriston, on interrogeait, torturait, exécutait.
Mais les bouchons de vos bouteilles de Champagne couvraient leurs plaintes.
Et les collabos d’ici, trinquaient aussi quand:
« Tout а l’heure je partirai. Si vous saviez comme je suis calme, je dirai presque heureux de mourir pour la Corse et pour le parti. La tête de maure et la fleur rouge c’est le seul deuil que je demande… ».
Nicoli, Giusti, Scamaroni, Griffi, Mondoloni, Vincetti è tanti è tanti…
Et c’est encore dans l’obscurité de votre ombre portée que l’on retrouve partout, au quatre coins du monde, tous les crimes commis contre l’humanité.
Contre les Indiens d’Amérique du Nord et ceux d’Amérique du Sud, de Pol Pot en passant par l’Ukraine affamée par Staline, du génocide Arménien à la Shoah, jusqu’à l’horreur de l’ethnocide planifié au Rwanda.
Partout votre ADN, vos empreintes: les rêves de puissance, le besoin de dominer, d’asservir, l’appropriation du bien des autres…le racisme.
Et lorsque vous n’y participez pas, vous ne les empêchez pas, vous ne vous opposez pas et vous ne les dénoncerez que lorsque cela ne nuira pas à vos intérêts.
Vous encore, le droit que vous donne votre fortune et votre force armée, contre mes droits d’homme et contre le droit des peuples à disposer d’eux mêmes.
Parce qu’il vous faut toujours plus, vous nous prendrez toujours plus et parce que vous avez déjà tellement pris, il ne reste plus rien aujourd’hui pour faire face à la pandémie.
Pour prévenir, pour protéger, pour soigner, l’obole que je mettais dans le tronc commun a été pillée par vos soins et pour satisfaire vos seuls intérêts…
Les miens, vous les avez pendus au Niolu, assassinés dans le Fium’Orbu, décimés leurs troupeaux, brûlés leurs villages et leurs récoltes, mais aussi massacrés à Haymarket Square à Chicago, en Irlande ceux des United Irischmen jusqu’à Boby Sand, les fusillés de Fourmie et dans vos mines du Nord lorsqu’ils réclamaient du pain, exécutés pour l’exemple à Verdun, torturés et assassinés lorsque dans les djébels et les rizières ils voulaient vivre debout, tout comme à Guernica, tout comme à Pointe-à Pitre un beau mois de mai 67, ou à Ouvéa…Je n’étais pas avec vous non plus pour soutenir et armer le régime d’apartheid en Afrique du Sud.
Et parce-que dans tout cela, il n’y a pas d’accident de l’histoire mais simplement l’HISTOIRE, votre histoire qui n’est pas la mienne, le 1er mai j’irai dans la rue vous l’affirmer: je ne suis pas des vôtres!!!
J’irai de 10h à 11h, muni de l’autorisation de sortie que vous avez la grâce de m’accorder, arpenter la place San Nicolau à Bastia.
L’agora, l’ espace public de rassemblement social, politique de ma cité, le rendez-vous où l’on se promène, où l’on apprend les nouvelles, où se forment les courants d’opinion.
J’irai sans provocation, je respecterai les distances de sécurité, je porterai mon masque s’il est arrivé de Chine, des gants si j’en trouve mais je n’aurai pas de muguet à la main.
Je laisse cette fleur toxique aux amis de Pétain et à sa fête du travail, je préfère la fête des travailleurs et le rouge de l’églantine.
Mais je n’aurai pas non plus d’églantine à la main!
Cette fleur qui soignait la rage des chiens, n’a pas su guérir la votre…
Chiens de guerre d’hier et chiens de guerre d’aujourd’hui, de Corse et d’ailleurs.
« U baghu », l’arbouse, ce fruit est sauvage, il est de mon pays…
L’arbousier a la particularité d’avoir en même temps sur ses branches, les fleurs et les fruits rouges qui apparaissent en septembre octobre…
Alors oui, j’irai sur mon agora le 1er mai, quelque chose de rouge sur moi, tout en même temps per u baghu, pour le coquelicot, le temps des cerises, la fleur de Jean Nicoli et en pensée avec tous les humiliés de la terre, tous les sans terre, tous les sans droit, tousceux pour qui vous avez fait de leur vie, une non vie ou un enfer…en attendant que les fruits mûrissent.
Parce que si nous voulons un nouveau monde, il nous faudra aller le chercher…
Oui !!! Iè !!! i baghi so` rossi..Ces baies symbolisent le ROUGE. Rossu imbacarittatu dit-on in lingua corsa per dà forza à u culore.
A nostra lingua corsa fiurita chè vo`vularebbite tumbà cum’è i vostri incendii cummerciali tombanu à nostra Machja.
Ma, zirpittate puru, « Machja n’avemu un antra, hè a nostra lingua » hà dettu u PUETA casinchese.
A nostra lingua dice è torna à di, è dice è conta è canta.
MICHEL PADOVANI
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