Meursault, contre-enquête
"Un certain goût pour la paresse s'installe chez le meurtrier impuni. Mais quelque chose d'irréparable aussi : le crime compromet pour toujours l'amour et la possibilité d'aimer. J'ai tué et, depuis, la vie n'est plus sacrée à mes yeux. Dès lors, le corps de chaque femme que j'ai rencontrée perdait très vite sa sensualité, sa possibilité de m'offrir l'illusion de l'absolu. A chaque élan du désir, je savais que le vivant ne reposait sur rien de dur. Je pouvais le supprimer avec une telle facilité que je ne pouvais l'adorer - ç'aurait été me leurrer. J'avais refroidi tous les corps de l'humanité en en tuant un seul. D'ailleurs, mon cher ami, le seul verset du Coran qui résonne en moi est bien celui-ci : "Si vous tuez une seule âme, c'est comme si vous aviez tué l'humanité entière. ""
06/2023
Son oeil dans ma main. Algérie 1961-2019
1961 Alger - Entre le printemps et l'automne de cette année charnière, Raymond Depardon, jeune reporter de 19 ans à l'agence de presse Dalmas, est envoyé à plusieurs reprises en Algérie. Lors de ses séjours dans la capitale, il saisit des scènes de la vie quotidienne, montrant deux mondes où se côtoient "Musulmans" et Européens d'Algérie, et capte la tension qui monte dans une ville où la présence de l'Organisation de l'armée secrète (OAS) se fait de plus en plus menaçante. Evian - Le premier round des négociations entre la France et les représentants du Front de libération nationale (FLN) pour mettre fin à la guerre d'Algérie a lieu à Evian, du 20 mai au 13 juin 1961. L'un des rares journalistes français à être accrédités auprès de la délégation algérienne, dans la villa du Bois d'Avault, au bord du Lac Léman (côté Suisse), le jeune Depardon saisit les "temps morts" qui lui sont si chers. L'Oranie - Durant les négociations, il fait partie d'un voyage de presse organisé en Oranie, pour y mener un reportage à Magra et Oued El Kheir (région natale de Kamel Daoud) où se trouve un "village coopérative" . 2019 Toujours en noir et blanc, Raymond Depardon photographie Alger, alors que la ville bat au rythme du Hirak, vaste mouvement de protestation entamé en février 2019. Puis il rejoint Oran par train, où, durant cinq jours, il retrouve Kamel Daoud pour de longues déambulations dans la ville. Ce qui frappe lorsqu'on observe ces photographies de 2019 : l'omniprésence des femmes, voilées ou pas, dans l'espace public. Nul mieux que Raymond Depardon n'a su capter cette évidence. Kamel Daoud, de son côté, imprégné des photographies des deux périodes, a écrit quatre textes très différents : trois pour 1961, un pour 2019. Ce sont des créations libres, s'emparant de l'histoire algéro-française avec le lyrisme, la fougue et l'audace propres au chroniqueur et écrivain algérien. Le livre est par ailleurs zébré de "comètes" , textes courts - haïkus, visions -, fulgurances ricochant sur une photo grâce au graphisme "accoustique" , épuré et élégant de Lili Fleury : elles vibrent, se répercutent, résonnent comme des lignes musicales.
02/2022
BibliOdyssées. Foudre, index, exil, talismans
De tous temps et dans le monde entier, au gré des conflits, des passions ou parfois de simples hasards, des livres et les textes qu'ils enferment, parfois même des bibliothèques entières, ont été dispersés, malmenés ou censurés. Quand ces livres survivent aux périls et à l'oubli, c'est grâce au courage et à la passion des hommes. D'autres ouvrages, tout aussi chèrement préservés, deviennent de véritables talismans, jusque dans l'exil. Voici rassemblés les récits de ces destins, parmi les plus emblématiques. Ce recueil de cinquante "bibliodyssées" rend hommage à ces livres, à leurs auteurs comme à leurs protecteurs, et préfigure ce qui pourrait constituer la premières "anthologie de livres sauvés".
04/2019
Le peintre dévorant la femme
"Je suis un "Arabe" invité à passer une nuit dans le musée Picasso à Paris, un octobre au ciel mauvais pour le Méditerranéen que je suis. Une nuit, seul, en enfant gâté mais en témoin d'une confrontation possible, désirée, concoctée. J'appréhendais l'ennui cependant, ou l'impuissance. Pour comprendre Picasso, il faut être un enfant du vers, pas du verset. Venir de cette culture-là, sous la pierre de ce palais du sel, dans ce musée, pas d'une autre. Pourtant la nuit fut pleine de révélations : sur le meurtre qui peut être au coeur de l'amour, sur ce cannibalisme passionné auquel l'orgasme sursoit, sur les miens face à l'image et le temps, sur l'attentat absolu, sur Picasso et son désespoir érotique".
10/2018
ACTUALITÉ POLITIQUE INTERNATIO
Kamel Daoud. Une polémique mondiale
En février dernier, soit quelques semaines après les tragiques faits de Cologne, l’écrivain algérien Kamel Daoud publie dans Le Monde une tribune dans laquelle il énonce que l’accueil des réfugiés demande d’admettre que leur donner des papiers ne suffira pas à les guérir du profond sexisme qui sévit dans le monde arabo-musulman. Cette tribune suscitera de violentes réactions de certains universitaires, qui répondent quelques jours plus tard par le même média, l’accusant de véhiculer les clichés islamophobes et culturalistes les plus éculés. C’est ainsi que démarre la «polémique Daoud», ponctuée d’échanges et de prises de positions, conduisant à ce que l’écrivain annonce se retirer du débat public.
10/2017
Zabor. ou Les psaumes
Orphelin de mère, indésirable chez son père remarié, élevé par une tante célibataire et un grand-père mutique, Tabor n'avait rien d'un enfant comme les autres. Il a grandi à l'écart de son village aux portes du désert, dormant le jour, errant la nuit, solitaire trouvant refuge dans la compagnie des quelques romans d'une bibliothèque poussiéreuse qui ont offert un sens à son existence. Très tôt en effet, il s'est découvert un don : s'il écrit, il repousse la mort ; celui ou celle qu'il enferme dans les phrases de ses cahiers gagne du temps de vie. Ce soir, c'est un demi-frère haï qui vient frapper à sa porte : leur père est mourant et seul Zabor est en mesure, peut-être, de retarder la fatale échéance. Mais a-t-il des raisons de prolonger les jours d'un homme qui n'a pas su l'aimer ? Fable, parabole, confession vertigineuse, le deuxième roman de Kamel Daoud célèbre l'insolente nécessité de la fiction en confrontant les livres sacrés à la liberté de créer. Telle une Schéhérazade ultime et parfaite, Zabor échappe au vide en sauvant ses semblables par la puissance suprême de l'écriture, par l'iconoclaste vérité de l'imaginaire.
08/2017
Mes indépendances. Chroniques 2010-2016
Journaliste depuis une vingtaine d'années, Kamel Daoud a tenu pendant quinze ans dans Le Quotidien d'Oran la chronique la plus lue d'Algérie, tout en collaborant à divers médias en ligne et en écrivant occasionnellement pour la presse étrangère. Concernant la période 2010-2016, il a ainsi signé près de deux mille textes - d'abord destinés au public algérien puis, sa notoriété grandissant, de plus en plus lus dans le monde entier -, dont cent quatre-vingt-deux ont été retenus pour ce recueil. Ce rythme effréné donne son souffle et son esthétique à l'ensemble. Qu'il brocarde l'islam politique ou la déliquescence du régime algérien, qu'il embrasse l'espoir suscité par les révolutions arabes ou qu'il défende la cause des femmes, c'est d'une plume originale, imagée, percutante et engagée. Car Kamel Daoud a érigé la chronique en exercice de style, en art de tendre un miroir à ses contemporains tout en s'interrogeant jour après jour, avec ou malgré l'actualité, sur l'homme, les dieux et les libertés.
02/2017
Meursault, contre-enquête. Résumé complet et analyse détaillée
Décryptez Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud avec l'analyse du Petit Littéraire ! Que faut-il retenir de Meursault, contre-enquête, le pendant de L'Etranger d'Albert Camus ? Retrouvez tout ce que vous devez savoir sur cette oeuvre dans une fiche de lecture complète et détaillée. Vous trouverez notamment dans cette fiche : Un résumé complet ; Une présentation des personnages principaux tels que Haroun Ould El-Assasse et sa mère ; Une analyse des spécificités de l'oeuvre : un roman sociologique, une langue simple et directe, un détournement, l'absurde ; Une analyse de référence pour comprendre rapidement le sens de l'oeuvre.
12/2015
La préface du nègre. Le minotaure 504 et autres nouvelles
Un athlète algérien qui court le marathon des jo d'Athènes se sent investi des attentes de tout un peuple. Un chauffeur de taxi livre sa détestation d'Alger au long d'une logorrhée hallucinée. Un militaire expose à la Foire internationale un prototype d'avion qu'il a conçu seul ou presque, espérant susciter l'intérêt des habitants de la capitale. Un écrivain embauché pour faire le nègre se rebiffe et outrepasse son rôle. Un Arabe imaginaire s'identifie au sauvage, au nègre, à Vendredi, cherchant dans ces figures inventées par d'autres la place censée être la sienne. Toutes ces voix d'hommes perdus, dépossédés de leurs rêves, se confrontent à une même question : qu'est-ce qu'être algérien aujourd'hui ? Egarés dans le labyrinthe de leurs obsessions, entravés dans leurs tentatives de révolte, les personnages de ces nouvelles donnent à voir l'Algérie contemporaine dans sa violence refoulée et son absurdité.
02/2015
Le minotaure 504
Extrait de Gibrïl au kérosène, une des quatre nouvelles de ce recueil qui chacune claque comme un uppercut, ce constat donne le ton de la prose de Kamel Daoud. Un chauffeur de taxi, dans un hallucinant soliloque, met en garde ses passagers contre Alger. Un militaire fou d'aviation attend en vain que quelqu'un, à la foire internationale où il l'expose, s'intéresse au prototype qu'il a quasiment construit de ses mains. Un marathonien court sans fin dans le stade des Jeux olympiques d'Athènes. Un écrivain fantôme outrepasse son rôle. Perdus dans le labyrinthe de leurs obsessions, ces héros abandonnés poursuivent inlassablement leur quête. Dans un pays qui leur échappe, leurs cheminements erratiques sonnent pourtant comme autant de promesses de révolte. Avec ce petit livre percutant et inspiré, Kamel Daoud, qui vit et écrit dans son pays, pose clairement la question de l'identité : qu'est-ce qu'être algérien aujourd'hui ?
05/2011
Les commentaires récents