Nos silences sont immenses est un court roman qui nous fait découvrir une Algérie qui existe peut-être encore. Une Algérie rurale et mystique aux confins du désert, comme il existe encore ici ou là une France rurale et superstitieuse qui vit au rythme des saisons. Zohra en est l’héroïne. L’autrice, Sarah Ghoula, nous raconte ses premières années durant lesquelles cette enfant malingre et pâle se transforme en une guérisseuse dont la renommée s’étendra bien au-delà des dunes et du sable qui bordent son village. Elle finira par lui permettre de prendre une liberté dont elle rêve depuis sa naissance et par partir « pour voir si le ciel est partout pareil ».
Lasse de constater que sa dernière fille n’est pas capable de travailler convenablement dans les champs, Salma, la mère de Zohra, la confie à la vieille Lalla M’Barka, une guérisseuse dans un village voisin. A son retour, la réputation de la petite fille ne tarde pas à grandir parmi cette population de gens simples, qui ne se laissent pas attendrir par la misère de leur voisin mais se montrent généreux avec celle qui sait les soigner. Pour Salma, c’est le début de la revanche. Plus la réputation de sa fille s’accroit et plus sa cassette se remplit d’or et d’argent. N’ayant pas eu de garçon, la veuve était marquée par le seau de la malédiction et de la pauvreté. Elle va prendre une revanche éclatante grâce à la dernière de ses dix filles. Mais elle ne voit pas le désir de liberté qui couve en Zohra.
Les phrases sont simples, le plus souvent courtes. En quelques images, l’autrice excelle à décrire l’exaltation d’une enfant qui danse dans la lumière du soleil ou la solitude pesante du désert écrasé de chaleur. De temps à autre, elle évoque aussi en passant la grande histoire en train de se dérouler : « la guerre de libération nationale » qui commence. Comme dans l'extrait suivant.
« Là, avec une bestialité quasi divine, Zohar dénouait ses cheveux, retirait son kardoun, courait, dansait, jouait, appelait Ismahane à s’en couper le souffle, défiait même le ciel. Et alors, elle n’était plus qu’une enfant. Elle n’entendait plus que le son de ses pas enjoués sur le sol ensablé, et ce doux vacarme recouvrait le bruit de détonations lointaines de soldats qui mettaient fin à la vie de quelques Arabes trop fiers. »
Le livre commence et finit dans une chambre de bonne, sous le toit d’un immeuble sans ascenseur dont la « vieille Zorah » ne peut plus descendre les escaliers. Et l’on devine qu’elle a raconté sa jeunesse à un jeune garçon de son quartier populaire. Entre conte philosophique et roman d’apprentissage, Nos silences sont immenses aborde la question de la transmission des savoirs traditionnels et nous laisse mélancolique une fois la dernière page tournée.
On aimerait une suite à ce premier roman. Une suite pour répondre aux questions que l’autrice laisse en suspens : qu’est-il arrivé à Zohra après son départ du village ? A-t-elle eu l’opportunité de voyager à travers le monde comme elle en rêvait enfant ou a-t-elle connu le destin de nombre de femmes immigrées, parties rejoindre un mari déjà exilé en France ?
Lasse de constater que sa dernière fille n’est pas capable de travailler convenablement dans les champs, Salma, la mère de Zohra, la confie à la vieille Lalla M’Barka, une guérisseuse dans un village voisin. A son retour, la réputation de la petite fille ne tarde pas à grandir parmi cette population de gens simples, qui ne se laissent pas attendrir par la misère de leur voisin mais se montrent généreux avec celle qui sait les soigner. Pour Salma, c’est le début de la revanche. Plus la réputation de sa fille s’accroit et plus sa cassette se remplit d’or et d’argent. N’ayant pas eu de garçon, la veuve était marquée par le seau de la malédiction et de la pauvreté. Elle va prendre une revanche éclatante grâce à la dernière de ses dix filles. Mais elle ne voit pas le désir de liberté qui couve en Zohra.
Les phrases sont simples, le plus souvent courtes. En quelques images, l’autrice excelle à décrire l’exaltation d’une enfant qui danse dans la lumière du soleil ou la solitude pesante du désert écrasé de chaleur. De temps à autre, elle évoque aussi en passant la grande histoire en train de se dérouler : « la guerre de libération nationale » qui commence. Comme dans l'extrait suivant.
« Là, avec une bestialité quasi divine, Zohar dénouait ses cheveux, retirait son kardoun, courait, dansait, jouait, appelait Ismahane à s’en couper le souffle, défiait même le ciel. Et alors, elle n’était plus qu’une enfant. Elle n’entendait plus que le son de ses pas enjoués sur le sol ensablé, et ce doux vacarme recouvrait le bruit de détonations lointaines de soldats qui mettaient fin à la vie de quelques Arabes trop fiers. »
Le livre commence et finit dans une chambre de bonne, sous le toit d’un immeuble sans ascenseur dont la « vieille Zorah » ne peut plus descendre les escaliers. Et l’on devine qu’elle a raconté sa jeunesse à un jeune garçon de son quartier populaire. Entre conte philosophique et roman d’apprentissage, Nos silences sont immenses aborde la question de la transmission des savoirs traditionnels et nous laisse mélancolique une fois la dernière page tournée.
On aimerait une suite à ce premier roman. Une suite pour répondre aux questions que l’autrice laisse en suspens : qu’est-il arrivé à Zohra après son départ du village ? A-t-elle eu l’opportunité de voyager à travers le monde comme elle en rêvait enfant ou a-t-elle connu le destin de nombre de femmes immigrées, parties rejoindre un mari déjà exilé en France ?
Rédigé par Lionel Lemonier | Vendredi 7 Octobre 2022 à 11:25
https://www.saphirnews.com/Nos-silences-sont-immenses-ou-l-evocation-de-l-Algerie-rurale-sous-le-regime-colonial_a29170.html
.
Les commentaires récents