uscule de sa vie, le chanteur français Enrico Macias ne désespère toujours pas de retourner un jour en Algérie, son pays natal. Dans un entretien publié, ce lundi 12 septembre, sur le quotidien régional Nice Matin, le chanteur de 83 ans est revenu encore une fois sur son vœu de visiter l’Algérie qu’il avait quittée, il y a plus de soixante ans. Tout en précisant qu’il n’est pas interdit de séjour en Algérie de manière officielle, Enrico Macias reconnaît toutefois la difficulté de voir son souhait exaucé.
Plus de soixante années après son départ d’Algérie, les blessures du chanteur Enrico Macias restent à vif. A chacune de ses nombreuses sorties médiatiques, celui qui a vu le jour à Constantine et qui a vécu une partie de sa jeunesse dans cette ville de l’Est algérien, ne cesse d’évoquer son rêve de visiter à nouveau son pays de naissance. Une question qu’il a soulevée à nouveau dans un entretien accordé ce lundi 12 septembre à Nice Matin.
Tout en refusant d’être le porte-parole des pieds-noirs, Enrico Macias avoue toutefois que la blessure de l’exil ne pourra jamais être refermée, soixante années après avoir quitté l’Algérie pour rejoindre la France. "Jamais. Pas tant que je porterai le deuil de mon beau-père Raymond", répond le chanteur. "Il faudrait une réconciliation entre tous les enfants d’Algérie, harkis, pieds-noirs et berbères", ajoute-t-il.
Pour Enrico Macias, la paix devra aujourd’hui laisser place à la haine, dans les relations entre les peuples français et algériens. "Quand on subit des épreuves comme la violence ou la guerre, on n’a pas envie de reproduire la même chose. Je n’ai pas d’esprit de revanche. J’ai choisi d’être prévenant et gentil parce que quand les gens sont gentils, on les agresse moins", affirme l’auteur de "J’ai quitté mon pays".
Enrico Macias affiche son désaccord avec Macron à propos de la colonisation
A une question sur son interdiction de séjour en Algérie et son souhait d’y revenir un jour, Enrico Macias répond : "Je ne suis pas interdit de séjour. Plus exactement, il n’y a rien d’officiel. J’ai failli y aller à trois reprises. A chaque fois, les autorités-pas la population- ont fait en sorte que ce voyage ne se fasse pas". Enrico Macias garde-t-il l’espoir de revenir un jour en Algérie ? "Maintenant je suis prudent. A 83 ans, je me suis fait une raison. Cela n’empêche pas la souffrance", répond-t-il.
Tout en refusant de répondre au polémiste Eric Zemmour qui affirmait qu’"on ne peut pas être un nazi lorsqu’on est juif", le chanteur a tenu par contre à exprimer son désaccord avec Emmanuel Macron qui avait qualifié "la colonisation de crime contre l’humanité". "Je ne suis pas d’accord. Un point c’est tout. Si j’avais eu l’occasion de le rencontrer, je lui aurai dit en face", explique Enrico Macias.
Sur cette question, le chanteur populaire a déjà été confronté aux défenseurs de la cause algérienne pendant la colonisation. Son débat avec Giselle Halimi reste encore dans les mémoires. L'avocate du FLN a entre autres expliqué au chanteur la différence entre antisémite et antisioniste. La colonisation française est considérée par les défenseurs des droits humains et pas seulement les Algériens comme un crime contre l'humanité. En 2022, seuls les nostalgiques de l'Algérie française continuent encore à le nier.
SOURCE : https://observalgerie.com/2022/09/12/societe/enrico-macias-venue-algerie/
http://www.micheldandelot1.com/
"J'ai reçu trop de mauvais coups": Enrico Macias ne veut plus parler de ce qui fâche
Soixante ans après la fin de la guerre d’Algérie, les blessures du chanteur restent à vif. Souvent agacé, le chanteur s'emporte contre Emmanuel Macron qui qualifie la colonisation de "crime contre l'humanité".
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"Je ne sais pas ce qui va arriver. J’ai perdu mon procès, je suis ruiné. Mais j’essaye de ne pas trop y penser", confie le chanteur. Photo Dylan Meiffret
C’est un entretien crénelé de silences. Il faut deviner les soupirs de lassitude, l’agacement qui perce entre les réponses. "Je ne veux pas parler de politique", maugrée souvent l’interprète. "Seulement de mes chansons et de ma musique. J’ai reçu trop de mauvais coups."
Enrico Macias est à l’aise lorsqu’il évoque ses débuts au Théâtre de verdure de Nice, cette ville "si importante dans [sa] carrière" où il est "toujours heureux de revenir". Il sourit en revivant ses vacances en famille à Saint-Raphaël et Fréjus, où il ira égrener ses notes le 17 septembre (concert le 17 septembre à 20h30 au théâtre Le Forum de Fréjus.
Oui, mais… Enrico n’est pas n’importe quel artiste de variétés. Depuis soixante ans, il met des mots sur les maux d’un peuple déraciné. Son regard d’homme de paix, frappé au cœur, dit quelque chose de l’histoire tourmentée de notre pays. Jusque dans ses réticences à s’exprimer.
Il y a 60 ans, en interprétant "Adieu mon pays" à la télévision, vous êtes devenu l'un des porte-parole des pieds-noirs. Ce statut ne vous a jamais pesé ?
C’est un privilège, mais aussi une responsabilité énorme. Cela dit, je ne me considère pas comme un porte-parole. J’ai simplement raconté mon histoire…
Vous pensez que la blessure de l'exil pourra se refermer un jour ?
Jamais. Pas tant que je porterai le deuil de mon beau-père Raymond [assassiné par le FLN en 1961 à Constantine, ndlr]. Il faudrait une réconciliation entre tous les enfants d’Algérie, harkis, pieds-noirs, berbères.
L’assassinat de Cheikh Raymond a provoqué votre départ d'Algérie, onze mois avant la fin de la guerre. Comment avez-vous fait pour éviter la haine ?
Quand on subit des épreuves comme la violence ou la guerre, on n’a pas envie de reproduire la même chose. Je n’ai pas d’esprit de revanche. J’ai choisi d’être prévenant et gentil, parce que quand les gens sont gentils, on les agresse moins…
Vous êtes toujours interdit de séjour en Algérie. Espérez-vous y retourner un jour ?
Je ne suis pas interdit de séjour. Plus exactement, il n’y a rien d’officiel. J’ai failli y aller à trois reprises. À chaque fois, les autorités – pas la population ! - ont fait en sorte que ce voyage ne se fasse pas. Alors maintenant, je suis prudent. À 83 ans, je me suis fait une raison. [Long silence] Cela n’empêche pas la souffrance.
Vous avez déclaré que vous quitteriez la France si Marine Le Pen accédait au pouvoir. Or, de nombreux pieds-noirs votent à droite ou à l'extrême droite. Ils se trompent de colère ?
[Très agacé] Quand on m’a posé la question, on m’a piégé. Je voulais juste dire que j’étais contre les idées de cette dame. Je respecte le vote et l’opinion de chacun. Même au sein de ma propre famille…
Quid de Éric Zemmour, qui affirme qu'on ne peut pas être un nazi lorsqu'on est juif ?
Je n’ai aucune envie de parler de Zemmour ! Aucune !
En 2017, Emmanuel Macron a qualifié la colonisation de "crime contre l’humanité". Qu’en pensez-vous ?
[Glacé] Je ne suis pas d’accord. Un point, c’est tout. Si j’avais eu l’occasion de le rencontrer, je lui aurais dit en face.
Que restera-t-il de la culture pied-noir dans dix ans ?
Des humoristes comme Robert Castel, la musique orientale qui est liée à l’identité pied-noir. Aucune ethnie ne sera éliminée de la société française.
Vous n'avez été candidat qu'une seule fois à une élection : en mars 1992, aux régionales en Provence-Alpes-Côte d'Azur, sur la liste menée par Bernard Tapie. Cela vous a vacciné de la politique ?
Je l’ai fait pour Bernard Tapie que j’adorais. Je n’étais pas en position éligible ; c’était ma façon de combattre l’extrême droite. [Silence] J’ai toujours été un citoyen engagé, dès lors qu’on m’a donné les moyens de l’être.
En 1997, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, vous a nommé ambassadeur itinérant pour la paix et la défense des enfants. Un mot sur le conflit en Ukraine ?
Allez demander à des spécialistes ! Moi, je suis pour la paix dans le monde entier.
Depuis 2008, vous vous battez pour conserver votre villa de Saint-Tropez. Vous avez été condamné à rembourser 30 millions d'euros. Serez-vous contraint de quitter les lieux ?
Décidément, vous ne posez que des questions embarrassantes ! Je ne sais pas ce qui va arriver. J’ai perdu mon procès, je suis ruiné. Mais j’essaye de ne pas trop y penser.
En avril, à l'Olympia, vous avez eu une extinction de voix. Pendant deux heures, le public a chanté à votre place. Sa fidélité vous surprend ?
Mieux que cela : elle me ravit. J’aurais dû partir et annuler. Mais je suis resté, spectateur de mon propre concert ! Je crois que je suis le seul chanteur au monde à avoir fait cela.
En décembre, vous aurez 84 ans. Le mot "retraite" ne fait pas partie de votre vocabulaire ?
Comme Aznavour, je chanterai jusqu’à mon dernier souffle.
SOURCE : https://www.nicematin.com/people/jai-recu-trop
-de-mauvais-coups-enrico-macias-ne-veut-plus-parler-de-ce-qui-fache-793125
C'était en 2019 au temps du Hirak en Algérie
Enrico Macias ne nous dit pas tout !!!
mais il espère que la jeunesse algérienne
qui n'a pas connu la guerre d'indépendance
sera plus tolérante pour lui ?
Cliquez sur ce lien pour d’abord l’écouter :
https://www.facebook.com/Algerie360/videos/792959824405239/
Invité de l'émission C à vous ce vendredi 22 mars, Enrico Macias s'est confié sur la crise actuelle en Algérie et son possible retour dans ce pays où il est interdit de territoire depuis 1961.
Il est et restera l'un des chanteurs les plus connus en France ! Aujourd'hui, alors qu'il vient de célébrer ses 80 printemps, Enrico Macias ne semble toujours pas prêt à prendre sa retraite. Une décision qui fait le plus grand bonheur de ses nombreux fans et qui semble même lui octroyer une seconde jeunesse. Invité de l'émission C à vous sur France 5 ce vendredi soir, le chanteur est venu pour parler de son dernier projet fou : un rôle dans une série Netflix.
Mais avant d'aborder la promotion de l'interprète du titre Les filles de mon pays, le journaliste Antoine Genton semblait bien décidé à connaître le ressenti de son célèbre invité sur la crise politique qui fait actuellement rage en Algérie et qui s'oppose au cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika. En effet, si on ne le présente plus aujourd'hui, nombreux sont ceux qui oublient le fait qu'Enrico Macias est né et a grandi dans ce pays d'Afrique du Nord.
Il est interdit de territoire depuis 1961
« Ça me donne de l'espoir que tout va changer » affirme alors le chanteur face aux journalistes de l'émission. Et même s’il admet être très « frustré » de ne pas pouvoir se rendre en Algérie (il a été interdit de territoire en 1961 après avoir affiché son soutien à Israël), Enrico Macias se dit « prêt à prendre tous les risques » pour y retourner. Une preuve de son attachement à ce pays qu'il n'a jamais oublié et pour lequel il voue encore une admiration sans équivoque.
Persuadé de l'amour des Algériens à son égard, le chanteur aux dizaines de millions d'albums vendus ne paraît toutefois pas convaincu de son retour sur la terre de ses ancêtres. En effet, même si les manifestations actuelles semblent promettre un changement dans la politique actuelle et son possible retour, l'homme précise que son « cas personnel n'a rien à voir avec ce mouvement ». Des révélations émouvantes de la part de ce chanteur au grand cœur touché par de nombreux malheurs ces dernières années.
Mais Enrico Macias n'a jamais démenti cela :
Enrico Macias et la guerre d’Algérie :
Quand Gaston chassait du Fellaga...
Enrico Macias est un homme redoutable. Militant sioniste déclaré, il a toujours entretenu des rapports ambigus avec l’Algérie, dont il a largement contribué à imposer cette image de pays de la douceur de vivre et de la kémia, une image qui a nourri tant de nostalgie chez les pieds-noirs.
Ses tirades sur le pays du soleil et de la haine, de la joie de vivre et de la passion, ce pays perdu dont on ne se console jamais, ont arraché des larmes à de nombreuses générations de pieds-noirs. Mais Gaston Ghenaïssia – le vrai nom de Macias – n’a jamais abordé le volet le plus sombre de son histoire algérienne. Il n’a jamais dit comment il a lui-même contribué à mettre le feu à ce pays bien aimé.
Il a, en fait, réussi à maintenir un voile pudique sur son militantisme de cette époque, un militantisme qui l’a mis dans la même tranchée que Maurice Papon ! Enrico Macias évoque régulièrement sa volonté de revoir son «pays natal», et comment il en est empêché. Sa visite devait se faire en 2007, en compagnie de Nicolas Sarkozy. Auparavant, il avait affirmé que le président Abdelaziz Bouteflika lui-même l’avait invité, mais que des méchants, héritiers de la tendance obscurantiste du FLN, s’étaient opposés à son retour.
Qu’en est-il au juste ? A Alger, on affirme officiellement qu’Enrico Macias peut se rendre en Algérie quand il veut, mais qu’il est hors de question d’en faire un évènement politique. Certains fonctionnaires montrent un certain embarras devant le tapage médiatique provoqué par Enrico Macias lui-même. «Il n’a pas envie de revenir, il ne viendra pas, et il le sait parfaitement», a déclaré, sûr de lui, un ancien haut responsable.
«Et ce n’est pas seulement à cause de son soutien public à Israël», ajoute-t-il, estimant que le thème Algérie ne constitue pour Enrico qu’un «fond de commerce». Pour cet homme, qui avoue avoir apprécié la musique de Enrico dans sa jeunesse, Enrico Macias ne reviendra pas en Algérie parce qu’il y a commis des crimes pendant la guerre de libération.
Selon lui, Enrico faisait partie d’une milice locale, les «unités territoriales», composées de partisans de l’Algérie française, qui formaient des milices de supplétifs de l’armée coloniale. L’unité à laquelle appartenait Enrico Macias a commis de nombreuses exactions, et a participé à des ratonnades, affirme cet ancien haut fonctionnaire. A cette époque, Enrico Macias est un jeune artiste prometteur, qui joue dans la troupe du «Cheikh Raymond», le plus célèbre artiste juif de Constantine.
Raymond Leyris est alors au faîte de sa gloire : notable de la communauté juive, ami des «arabes» de la ville, il est riche et célèbre. Sa musique est si appréciée qu’une jeune recrue FLN, en pleine guerre d’Algérie, rejoint le maquis ALN en wilaya II avec des disques de «Cheikh Raymond », nous raconte un ancien moudjahid qui a passé toute la guerre dans le Nord Constantinois ! Raymond Leyris n’avait pas d’enfants.
Il en a adopté deux, dont Enrico Macias. Celui-ci est donc à la fois l’enfant adoptif, le disciple et l’héritier de Cheik Raymond. A-t-il été l’héritier en tout ? Seul Macias pourra le dire. En tous les cas, les réseaux FLN avaient alors une conviction. Pour eux, Raymond Leyris avait été contacté par les services spéciaux israéliens.
Il organisait des collectes, montait des réseaux, et travaillait en sous-main avec les services spéciaux israéliens, qui avaient alors un objectif : organiser le transfert massif des juifs des pays arabes vers Israël. En Algérie, leur première cible était Constantine, avec ses 25.000 à 30.000 juifs : il y avait presque autant de juifs à Constantine que dans les grandes villes israéliennes. En mai 2005, le journal israélien Maariv citait un ancien officier du Mossad chargé de piloter l’opération.
Cet officier affirme avoir recruté deux agents, Avraham Barzilaï et Shlomo Havilio, qui arrivent dans la région de Constantine début 1956, sous la couverture de modestes enseignants. Quatre mois plus tard, une grenade explose dans un café fréquenté par les Juifs de Constantine, rue de France. S’ensuit une opération de vendetta organisée par les cellules mises en place par le Mossad, selon l’officier en question. Les ratonnades font de nombreux morts.
L’historien Gilbert Meynier, qui l’évoque dans une de ses études, et parle de «pogrom», est contraint à une longue mise au point. (http:// etudescoloniales.canalblog.com/archives/ 2007/03/14/4319574.html). Quel est le rôle exact de Raymond Leyris ? Difficile à dire. Mais l’homme surfe déjà sur une vague de célébrité et de respectabilité. Artiste adulé, il a atteint une renommée qui va au-delà des communautés. Il est le notable juif par excellence.
Il garde le contact avec les arabes qui veulent préserver la communauté juive ; il reste l’interlocuteur des autorités coloniales au sein de la communauté juive ; il poursuit une activité clandestine avec le Mossad. Mais peu à peu, les réseaux FLN acquièrent la certitude que Cheikh Raymond n’est plus un artiste aussi innocent. Il est partie prenante dans l’action de réseaux que le FLN n’arrive pas encore à identifier. Des témoins avaient vu des armes transportées à partir de chez lui, en pleine nuit.
Au FLN, la prudence reste de mise. Des consignes strictes sont données pour tenter de conserver de bonnes relations avec la communauté juive. Des contacts réguliers sont établis. Début 1961, le FLN envoie de nouveau un émissaire auprès des notables de cette communauté. L’émissaire envoie un message à Raymond Leyris, et prend rendez-vous. L’organisation fonctionne alors selon un cloisonnement très strict. L’émissaire du FLN est tué alors qu’il gagnait le lieu du rendezvous.
Ce fait, troublant, intervient après d’autres évènements suspects. L’organisation du FLN en tire une conclusion : seul Raymond Leyris pouvait avoir organisé la fuite pour permettre aux autorités coloniales d’éliminer le responsable du FLN. Les anciens moudjahidine de la Wilaya II, qui étaient opérationnels à ce moment là, sont toutefois formels : aucune instance du FLN n’a prononcé un verdict clair contre Raymond Leyris.
Aucun responsable n’a, formellement, ordonné une exécution. Mais le doute planait, et dans le Constantine de l’époque, ce n’est qu’une question de temps. Le 22 juin 1961, neuf mois avant le cessez- le-feu, Raymond Leyris croise Amar Benachour, dit M’Djaker, membre d’une cellule locale de fidayine, qui l’abat en plein marché, devant des dizaines de témoins. La personnalité de Amar Benachour, l’homme qui a abattu Raymond Leyris, posera aussi problème.
Il s’agit en effet d’un personnage qui répond peu au profil traditionnel du moudjahid. Benachour est plutôt un marginal, plus branché sur le «milieu» que sur les réseaux nationalistes. Ce qui a d’ailleurs jeté une ombre sur l’affaire : Benachour a vécu jusqu’au début du nouveau siècle, mais l’opération qu’il a menée a toujours été entourée de suspicion, certains n’hésitant pas à parler de provocation ou de manipulation.
Plusieurs moudjahidine qui étaient dans la région au moment des faits continuent d’ailleurs à soutenir l’idée d’une manipulation. La mort de Raymond Leyris accélère le départ massif des juifs de Constantine, un exode largement engagé auparavant par les catégories les plus aisées. Mais la mort de Raymond Leyris sonne également le début d’une opération de vengeance meurtrière, à laquelle Enrico Macias participe, selon des moudjahidine de la Wilaya II.
Il est impossible d’établir exactement le bilan exact des expéditions punitives. En 1956, après l’attentat de la rue de Constantine, Gilbert Meynier n’écarte pas le chiffre de cent trente morts. En mai 1961, la même folie furieuse se déchaîne mais, curieusement, affirme un constantinois qui a vécu les évènements, les Juifs de Constantine étaient plus préoccupés par l’idée de départ que par la vengeance.
A l’exception d’Enrico, qui garde un silence pudique sur cet période, se contenant d’évoquer la mémoire de Raymond Leyris, un homme innocent doublé d’un artiste qui aimait la vie, mais qui a été assassiné par le FLN, selon lui. Selon cette image, très médiatique, Enrico lui-même n’était qu’un jeune homme amoureux de la vie et des filles, un modeste instituteur de campagne, devenu un immense artiste grâce à son talent.
A Chelghoum Laïd, où il a enseigné, son nom est connu mais il est presque impossible de trouver des gens qui l’ont côtoyé. A Constantine, par contre, un spécialiste de la musique affirme que de nombreux «ouled el bled» lui rendent visite régulièrement en France. Par ailleurs, le discours de Enrico Macias a longtemps bénéficié d’une cacophonie chez les responsables algériens, qui n’ont jamais adopté une position claire sur le personnage.
En fait, côté algérien, plusieurs points de vue se côtoyaient : ceux qui faisaient l’éloge de l’artiste, ceux qui prônaient la réconciliation, ceux qui dénonçaient son soutien à Israël, et ceux qui étaient d’abord soucieux d’établir les faits historiques. Un ancien haut fonctionnaire affirme toutefois que Enrico n’avait aucune chance de revenir en Algérie. Les anciens pieds- noirs étaient classés en plusieurs catégories, explique ce fonctionnaire.
Enrico Macias fait partie d’une sorte de liste rouge officieuse, qui comporte les noms de militaires, colons et ultras ayant commis des exactions. Ceux-là ne peuvent pas entrer en Algérie, dit-il. Autre détail troublant dans l’histoire d’Enrico : quand il sévissait au sein des «unités territoriales», il collaborait avec un personnage célèbre, Maurice Papon ! Celui-ci a en effet exercé comme préfet à Constantine, où il a contribué à organiser de redoutables escadrons de la mort.
Milices, unités paramilitaires, escadrons de la mort, tout ce monde collaborait joyeusement quand il s’agissait de réprimer. Des témoins sont encore vivants. Autre curiosité dans l’histoire de Enrico Macias en Algérie : les Ghenaïssia, sa famille, sont des Algériens pure souche, installés en Algérie depuis plusieurs siècles, affirme un historien. Ils se sont francisés à la faveur du décret Crémieux, qui offrait la citoyenneté française aux Juifs d’Algérie, en 1871.
A partir de là, les Juifs se sont rapprochés de l’administration coloniale, accédant à l’école et à la citoyenneté. Mais une frange des Ghenaïssia a gardé son ancienne filiation, prenant le chemin inverse de celui de Enrico Macias. Ainsi, Pierre Ghenaïssia, né à Cherchell, a rejoint les maquis du FLN en mai 1956 dans la région du Dhahra, entre Ténès et Cherchell. Il est mort au maquis un an plus tard dans la région de Chréa, près de Blida, comme combattant de l’ALN. A l’indépendance de l’Algérie, une rue de Ténès, sur la côte ouest, a été baptisée à son nom. Quelques années plus tard, elle a été rebaptisée rue de Palestine!
SOURCE : Enrico Macias et la guerre d'Algérie: Quand Gaston chassait du fellaga... (lequotidien-oran.com)Abed Charef
http://www.micheldandelot1.com/
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