Après avoir tout essayé pour se maintenir en poste, Donald Trump s’est résolu à partir. Heureusement pour la démocratie, rares sont les perdants cloîtrés à ce point dans le ressentiment. Mais pour les chefs d’État, partir est toujours difficile : comment fait-on le deuil du pouvoir ? Peut-on se réinventer ou reste-t-on un éternel « ex » ?
Donald Trump a quitté le pouvoir comme il a gouverné : avec fracas. Son appel à marcher sur le Capitole, le 6 janvier 2021, restera dans les annales. Tout comme ses supporteurs – putschistes et clownesques à la fois – errant dans les couloirs du Congrès, appelant à « pendre Mike Pence », le vice-président, ou taguant sur les murs « Assassinez les médias ».
→ RÉCIT. Le déroulé heure par heure d’une soirée de chaos au cœur de Washington
Une attaque en règle des institutions démocratiques… dans la ville même de George Washington, lui qui avait organisé la première passation de pouvoir démocratique de l’histoire. C’était en 1797. Autre époque, autres mœurs.
Le 6 janvier 2021, pendant quelques heures, la démocratie américaine a tutoyé l’abîme. Elle a finalement tenu, dotée de puissants garde-fous. L’épisode nous rappelle une réalité presque oubliée dans nos républiques bicentenaires : un candidat peut accéder au pouvoir par les urnes et, ensuite, en refuser le verdict.
« Assurer une transition apaisée est fondamental : cela permet la continuité de l’État malgré l’alternance politique »
La démocratie, comme tous les régimes politiques, est bel et bien mortelle. « Le vote et le fait de rendre des comptes, donc de quitter le pouvoir, sont les deux expériences démocratiques fondatrices. Si l’un des deux fait défaut, on ne peut plus à proprement parler de démocratie », rappelle Pierre-Henri Tavoillot, maître de conférences en philosophie à la Sorbonne.
Si quitter le pouvoir suppose de partir en fin de mandat, savoir quitter le pouvoir requiert beaucoup plus. Et, notamment, d’admettre la régularité du scrutin, de concéder ouvertement sa défaite, de reconnaître une pleine et entière légitimité à son successeur… tout ce à quoi s’est refusé Donald Trump ces deux derniers mois.
→ EXPLICATION. De plus en plus isolé, Donald Trump sera jugé dès le 8 février
« Assurer une transition apaisée et une passation de pouvoir sans accroc est fondamental : cela permet la continuité de l’État malgré l’alternance politique », indique Vincent Martigny, professeur de science politique à l’université de Nice et à l’École polytechnique. Quitter le pouvoir avec la manière ne relève donc pas que de l’élégance républicaine, encore moins du savoir-vivre : c’est l’essence même du processus démocratique.
Qui pouvait imaginer que Donald Trump, qui avait avalisé le scrutin de 2016 (après avoir néanmoins déjà dénoncé une « fraude massive » l’ayant empêché de remporter le vote populaire), torpillerait à ce point, quatre ans plus tard, le processus électoral ? Qui pouvait imaginer qu’il jouerait autant la meute (les affidés de QAnon, les Proud Boys, les suprémacistes blancs…) contre le peuple ?
Sa démagogie assumée, son art consommé des infox, ses diatribes incendiaires sur Twitter et sa façon d’ériger ses détracteurs en « ennemis du peuple » avaient alerté certains avant même sa prise de fonction. Barack Obama était de ceux-là.
« Nous ne sommes que des occupants temporaires de ce poste »
Adressant en 2016, comme le veut la tradition, un courrier à son successeur pour son arrivée à la Maison-Blanche, le démocrate avait écrit à Donald Trump : « Nous ne sommes que des occupants temporaires de ce poste. Cela fait de nous des gardiens des institutions et des traditions démocratiques telles que l’État de droit, la séparation des pouvoirs, la protection des droits civiques. (…) Quelles que soient les tensions politiques au jour le jour, il nous appartient de laisser ces instruments au moins aussi forts que dans l’état dans lequel nous les avons trouvés. » Des mots glaçants de prémonition.
Quitter le pouvoir n’est jamais aisé. Et plus encore lorsqu’on a occupé la fonction suprême. On préside aux destinées d’un pays et, du jour au lendemain, on appartient au passé. Exit la puissance, fini les honneurs, bienvenue chez les « ex ». Ex-président de la République, ex-chancelier, ex-premier ministre, ex-président du Conseil… Qu’importe le titre, votre place est désormais dans les livres d’histoire !
→ ENTRETIEN. Comment « bien » quitter un poste à responsabilités
La plupart des sortants accusent pourtant le coup et font bonne figure. Conscients des enjeux, ils savent se hisser à la hauteur de l’événement. Certains veillent même, par quelques gestes symboliques, à asseoir la légitimité de leur successeur. Ainsi, George Bush père, sèchement battu par Bill Clinton en 1992, s’était montré magnanime dans la défaite.
S’adressant à son successeur dans le courrier qu’il lui a laissé pour sa prise de fonction, il écrivait ceci : « Votre succès est le succès de votre pays. (…) Je vous soutiens totalement. (…) Ne laissez pas les critiques vous décourager ou vous faire dévier de votre trajectoire. »
Des destins hors normes
Autres latitudes, autre geste. François Mitterrand marque les consciences, le 8 mai 1995, en invitant Jacques Chirac, élu la veille, à participer à ses côtés aux commémorations de la victoire des Alliés. À l’époque, quelques esprits chagrins avaient raillé leur complicité (surjouée, à leurs yeux), ratant par là même la force du symbole : deux hommes – et, à travers eux, deux camps – faisaient fi des querelles partisanes au nom de l’intérêt supérieur du pays. La tradition s’est d’ailleurs perpétuée depuis.
→ ANALYSE. Entre les Français et leur président, une part de sacré
Gare, toutefois. Ces leçons de dignité peuvent cacher une fausse sérénité. Souvent, le départ a des allures de deuil. « Il y a un vrai travail psychique à engager », insiste le psychanalyste Roland Gori, auteur de La Nudité du pouvoir (Les Liens qui libèrent, 2018).
« Quitter le pouvoir fut douloureux pour tous les présidents de la Ve République »
Reprenant à son compte la théorie des « deux corps du roi », il l’applique à la figure présidentielle : « Le président est doté d’un corps personnel, physique, mais aussi d’un corps symbolique, politique, voire quasi mystique. Ces deux corps s’unissent en lui le temps de son mandat mais, au moment de partir, il lui faut faire le deuil du corps politique pour se replier sur son seul corps de mortel. Il y a là quelque chose de l’ordre de… l’amputation. C’est forcément violent. »
Sur le perron, au moment du départ, les sourires de façade masquent de vrais tourments. « Quitter le pouvoir fut douloureux pour tous les présidents de la Ve République », considère Jean Garrigues, professeur d’histoire politique à l’université d’Orléans, auteur des Perdants magnifiques (Tallandier, 2020).
Charles de Gaulle, l’orgueil blessé
À commencer par le premier d’entre eux, le général de Gaulle. Jouant son destin à quitte ou double au référendum du 27 avril 1969, il perd et quitte l’Élysée dans la foulée. La nuit même des résultats, il envoie un communiqué à l’AFP : « Je cesse d’exercer mes fonctions de président de la Ve République. Cette décision prend effet aujourd’hui à midi. » Deux lignes, pas une de plus. Plus laconique, on ne fait pas.
« Je ne suis plus concerné »
« Je ne suis plus concerné », répète-t-il ensuite à ceux qui lui rendent visite à Colombey-les-Deux-Églises. Un détachement en guise d’armure. Car, derrière la bouderie somptueuse, l’homme est éprouvé, l’orgueil à jamais blessé. À sa mort l’année suivante, Yvonne, sa confidente de toujours, aura d’ailleurs ces mots devant la dépouille de son mari : « Il a tant souffert depuis deux ans… » (1).
Jacques Chirac, le sourire brisé
Ses successeurs tairont, eux aussi, la mélancolie de l’après-pouvoir. Elle affleure parfois dans leurs Mémoires. « Une formule de bon sens recommande de savoir quitter le pouvoir avant qu’il ne vous quitte’. (…) J’ai mis du temps à m’habituer à l’idée. (…) En fait, je ne crois pas m’y être réellement préparé », écrit Jacques Chirac dans les dernières pages des siens (voir ci-dessous).
« Savoir quitter le pouvoir avant qu’il ne vous quitte »
Lui qui s’était si souvent répété en lorgnant sur l’Élysée « chaque pas est un but » quitte le palais présidentiel en mai 2007 le sourire brisé. Qu’il est loin ce jour de décembre 1994 quand il planifiait ses vieux jours avec Jean-Louis Debré : « Si je ne suis pas élu, on va ouvrir une agence de voyages. Tu vas la tenir et moi je vais voyager ! » Fini de blaguer, vingt ans plus tard, au moment de se mettre en retrait du pouvoir, absent aux autres et, certains jours, absent à lui-même.
François Hollande, la rude rupture
François Hollande ne s’épanche pas beaucoup plus sur son retrait. Mais, là encore, quelques lignes dans ses Mémoires (voir ci-dessous) trahissent la blessure que constitue son départ de l’Élysée et, plus encore, son choix de ne pas briguer de second mandat.
« D’un agenda surchargé à la page blanche, la rupture fut rude »
Revenant sur l’allocution dans laquelle il l’annonce aux Français, le socialiste précise qu’elle dure sept minutes et que ce sont là « sans doute les plus longues de (sa) vie ». Sur son retour à la vie civile, il dit sa difficulté à passer « d’un agenda surchargé » à « la page blanche » et finit par concéder : « la rupture fut rude ».
Valéry Giscard d’Estaing, l’inguérissable nostalgie
Valéry Giscard d’Estaing fut, au fond, le seul à assumer la douleur du départ. Et à dire combien son renvoi, en 1981, l’avait meurtri. Figé dans son geste d’adieu – un « Au revoir » se voulant simple mais qui, par ses accents tragiques, frisait le ridicule –, l’ancien président s’épancha à plusieurs reprises sur ses tourments d’après-défaite.
« Ce que je ressens n’est pas de l’humiliation, mais la frustration de l’œuvre inachevée. »
« Ce que je ressens, ce n’est pas de l’humiliation mais quelque chose de plus sévère : la frustration de l’œuvre inachevée, écrit-il dans ses Mémoires (voir ci-dessous). J’en garderai une morsure d’une inguérissable nostalgie. » Revenu en politique, l’ancien président s’est longtemps rêvé en recours à droite. En vain. À chaque fois qu’une présidentielle approchait, ses espoirs de revanche s’éclipsaient.
« Il faut une telle hybris, un tel narcissisme pour arriver jusqu’à la présidence qu’on ne peut pas bien vivre sa fin de mandat », affirme le chroniqueur Alain Duhamel. À l’entendre, la souffrance des « ex » serait à l’aune de leur ambition pour accéder au pouvoir suprême : démesurée.
En France comme ailleurs. On imagine l’amertume de Donald Trump après sa défaite en novembre, lui qui peut tweeter sans l’ombre d’un second degré : « Je ne suis pas intelligent, je suis un génie. » Céder sa place est toujours rude, mais sans doute l’est-ce plus encore lorsqu’on est doté d’un ego qu’aucun surmoi ne canalise.
« Tout le monde a son heure de gloire, mais certaines heures durent plus longtemps que d’autres »
La trace, fragile et éphémère, laissée dans l’Histoire ajoute encore à la frustration des sortants. Car, tous le savent, seule une poignée d’entre eux se fraie une place dans la mémoire collective. « Tout le monde a son heure de gloire, mais certaines heures durent plus longtemps que d’autres », s’amusait Winston Churchill, convaincu pour sa part d’avoir marqué le siècle. En France, le général de Gaulle pensait de même. « L’Histoire, c’est la rencontre d’une volonté et d’un événement », répétait l’homme du 18-Juin, en parlant de lui…
François Mitterrand
Voilà pour les destins hors norme. Mais quid de tous les autres ? La plupart des dirigeants ne croient pas à leur postérité. Ou feignent, par coquetterie peut-être, de ne pas y croire… C’était le cas de François Mitterrand.
« On se souvient tout juste de Toutankhamon. Que dira-t-on de moi dans quelques milliers d’années ?
Obsédé par l’idée de laisser sa trace dans l’Histoire, et ayant tenté de « griffer le temps » avec ses grands travaux, le socialiste n’en déclarait pas moins en avril 1995, à la veille de son départ : « On se souvient tout juste de Toutankhamon. Que dira-t-on même du général de Gaulle, de Pompidou, de Giscard, de moi et du prochain dans quelques milliers d’années ? »
Voilà qui rappelle Marguerite Yourcenar, sondeuse géniale des états d’âme de l’empereur romain Hadrien (2), qui définissait la postérité ainsi : des « siècles de gloire » précédant des « millénaires d’oubli ».
Faire son deuil du pouvoir est d’autant plus douloureux que chacun aurait souhaité faire plus, mieux, plus vite. « La marge d’action des politiques devient de plus en plus étroite du fait de la mondialisation et de l’hégémonie du marché, analyse Alain Duhamel. On assiste à une forme de dépossession du politique : les ressorts du pouvoir se brisent les uns après les autres et les hommes de gouvernement ont parfois le sentiment de n’être que des figurants. »
Rester en poste le plus longtemps possible
Grisés par la puissance au départ, tous ensuite se cognent au réel : le temps file, les réformes achoppent, l’impopularité gagne. D’où l’envie de la plupart d’entre eux de se maintenir en poste. Qu’importe l’âge ou la maladie !
Illustrations. À son retour en 1958, le général de Gaulle est presque septuagénaire. Il n’hésite d’ailleurs pas à jouer de son âge : « Pourquoi voulez-vous qu’à 67 ans, je commence une carrière de dictateur ? »
De l’autre côté de la Manche, Winston Churchill a 77 ans lors de son come-back au 10 Downing Street, en 1951. Le président Pompidou est emporté par la maladie alors qu’il était en fonction, à l’instar de Franklin Roosevelt, décédé en poste après avoir été élu quatre fois à la tête des États-Unis. Une réforme, votée en 1947, limitera ensuite à deux le nombre de mandats présidentiels outre-Atlantique.
Tous les présidents américains ou presque se représenteront à l’issue de leur premier mandat, non sans succès (Eisenhower, Nixon, Reagan, Clinton, Bush Jr., Obama). Qu’on ne s’y trompe pas, rester en poste le plus longtemps possible n’est pas une manie propre aux régimes présidentiels.
Les grandes démocraties parlementaires n’échappent pas à la règle, comme en témoigne la longévité de Margaret Thatcher à la tête de l’Angleterre, les reconductions successives de Helmut Kohl ou d’Angela Merkel à la tête de l’Allemagne, ou encore les allers-retours successifs de Silvio Berlusconi au Palais Chigi…
« Pour certains, l’exercice du pouvoir relève quasiment de la raison d’être »
Certains tentent un retour, mais en vain. Comme Nicolas Sarkozy, candidat malheureux des primaires de la droite en 2016. Son souhait de revenir aux affaires avait surpris jusque dans son propre camp, lui qui affirmait, les yeux dans les yeux, à Jean-Jacques Bourdin lors de la campagne présidentielle de 2012 : « Si je perds, j’arrête la politique. »
Peut-être, sur le coup, était-il sincère ? Présider aux destinées d’un pays est un immense honneur mais l’âpreté de la tâche, le poids des responsabilités, la solitude de celui qui a le dernier mot peuvent aussi, certains jours, relever du fardeau. Nicolas Sarkozy, alors président, s’en était d’ailleurs confié à Charles Jaigu, journaliste au Figaro, en 2010 : « Aujourd’hui, mon travail me passionne, mais cette vie ne me plaît pas. »
Pourquoi revenir alors ? « Parce que, pour certains, l’exercice du pouvoir relève quasiment de la raison d’être », décrypte Jean Garrigues. Peut-être y avait-il de cela chez Nicolas Sarkozy, lui qui avoue sans fard être « tenaillé » par l’ambition présidentielle depuis l’adolescence (3). « On peut voir, chez tous ces politiques attachés au pouvoir, une question d’ego, bien sûr. Mais il n’y a pas que cela : derrière cette ambition, il y a aussi la volonté d’aller jusqu’au bout d’un projet politique », nuance l’universitaire.
Ceux qui passent le cap
D’autres passent sans difficulté le cap de l’après-pouvoir. En intégrant, par exemple, les instances internationales : ce fut le cas de Tony Blair, l’ancien premier ministre britannique nommé ensuite émissaire du Quartet pour le Moyen-Orient, ou de son successeur, Gordon Brown, qui a depuis rejoint le Forum économique mondial.
Certains se reconvertissent plutôt dans le privé, comme les ex-chanceliers allemands Helmut Schmidt (devenu rédacteur en chef de l’hebdomadaire Die Zeit) ou Gerhard Schröder (recruté par le géant russe Gazprom).
La plupart de ces « ex » donnent des conférences aux quatre coins du globe, faisant fructifier leur carnet d’adresses. Au risque d’alimenter la polémique, comme ce fut le cas de l’ancien président de la Commission européenne José Manuel Barroso, recruté par la banque Goldman Sachs et soupçonné ensuite de faire du lobbying… auprès de l’Union européenne.
Le rajeunissement de la classe politique devrait banaliser encore ce type de reconversion. Emmanuel Macron, dépeint un temps comme un météore politique pour avoir accédé à l’Élysée à 39 ans, est désormais entouré de quadras en Europe.
Le chancelier autrichien, Sebastian Kurz, a 35 ans. Son alter ego danoise, Mette Frederiksen, vient de fêter ses 42 ans. La première ministre finlandaise, Sanna Marin, a tout juste 35 ans. Leur homologue belge, Alexander De Croo, a 45 ans. Jacinda Ardern, à la tête de la Nouvelle-Zélande, vient de passer le cap de la quarantaine.
« Cette génération a accédé aux responsabilités en sachant pertinemment qu’elle se reconvertirait un jour », note Vincent Martigny, professeur de science politique à l’école polytechnique. Il y a une vingtaine d’années encore, prendre les rênes d’un pays signait la fin d’une longue ascension politique. C’est de moins en moins vrai. De quoi, sans doute, rendre moins douloureux le départ…
D’autres encore, comme Bill Clinton ou Nelson Mandela, choisissent de « servir autrement » leur pays, en créant une fondation. Mais, là encore, les pratiques évoluent : le couple Obama, convaincu du pouvoir de l’image, a créé une société de production, Higher Ground, promouvant les questions « de race, de classe, de démocratie et de droits civiques ». Des documentaires labellisés « Obama » sont aujourd’hui diffusés sur Netflix dans le monde entier.
→ CRITIQUE. À la Maison-Blanche, avec Barack Obama
« Une manière de continuer à façonner l’opinion et, quelque part, à gouverner les conduites », décrypte le psychanalyste Roland Gori. On repense alors à la célèbre formule de Carl von Clausewitz : « La guerre n’est rien d’autre que la continuation de la politique par d’autres moyens. » Deux siècles plus tard, on pourrait réécrire la fameuse maxime : la guerre de l’image n’est rien d’autre que la continuation de la politique par d’autres moyens…
« Ma foi exige que je fasse tout ce que je peux, où que je sois, chaque fois que je le peux, aussi longtemps que je le peux »
Plus rare, certains « ex » se réinventent totalement. Jimmy Carter est de ceux-là. Élu à la Maison-Blanche à 52 ans, il est battu en 1980 par Ronald Reagan. Douze ans plus tard, le démocrate se voit décerner le prix Nobel de la paix pour ses médiations dans différents conflits internationaux.
« Ma foi exige que je fasse tout ce que je peux, où que je sois, chaque fois que je le peux, aussi longtemps que je le peux », expliquait-il. Son engagement témoigne aussi d’une certaine conception de la politique : la politique comme recherche insatiable du bien commun, et non comme recherche obstinée des honneurs.
Ainsi accueillit-il sans rancune cette remarque du comité Nobel lors de la remise de son prix : « L’Histoire ne retiendra peut-être pas Jimmy Carter comme le président le plus efficace des États-Unis. Mais il est assurément le meilleur ancien président que ce pays ait jamais eu. » Preuve qu’il y a une vie après la présidence ! Puisse Donald Trump, entre deux swings sur les greens de Floride, s’en convaincre…
Pour aller plus loin
► Un podcast
« Quitter le pouvoir »
Dans ce podcast en trois épisodes, « La Fabrique de l’histoire », sur France Culture, revient sur les départs de l’Élysée sous la Ve République. Que dire lorsque l’on quitte ses fonctions ? Quels souvenirs laisse-t-on dans la mémoire collective ? Pourquoi certains choisissent-ils de dresser leur bilan et de faire leurs adieux, quand certains décident de ne rien dire ? Autant de questions auxquelles journalistes et politiques répondent
en confrontant leurs points de vue.
franceculture.fr (mots-clés : quitter pouvoir).
♦ Un livre
Le Deuil du pouvoir
L’ouvrage retrace les derniers jours des présidents de la Ve République. Il permet de toucher du doigt l’ambiance des fins de règne mais aussi la vérité de l’homme derrière le dirigeant. Le tout sans verser dans l’impudeur, ni le pathos.
Sous la dir. de Solenn de Royer et d’Alexis Brezet, Éd. Perrin-Le Figaro, 280 p., 17,90 €.
► Un film
Le Promeneur du Champs-de-Mars
Ce long-métrage, adaptation du roman de Georges-Marc Benamou (Le Dernier Mitterrand), retrace la fin de la vie et les dernières semaines à l’Élysée de l’ancien président, incarné à l’écran par un Michel Bouquet bluffant… et césarisé pour le rôle !
De Robert Guédiguian, 2005, 1 h 57.
► Un débat
« De Gaulle, l’homme derrière le mythe »
Diffusé sur Public Sénat à l’occasion des 50 ans de la mort du Général, ce documentaire suivi d’un passionnant débat revient sur les derniers mois de la vie du grand homme.
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