La question du jour du mercredi 8 juillet réunissant deux intellectuels algériens m’avait choqué à lire ci-après). Je m’étais demandé à quel titre La Croix publiait ce point de vue qui aurait été justifié si les auteurs avaient été interdits de tribune en Algérie. J’avoue avoir été déconcerté par le souhait commun des deux protagonistes de voir la France exprimer des excuses, seul moyen pour eux de soulager les Algériens et de les aider dans leur quête de démocratie. Les lettres de lecteurs parues dans le journal du 10 août ne font, à mon avis, que retourner l’argumentaire sur la colonisation et de ce fait enferment la nécessaire réflexion sur un avenir. De mon point de vue, le meilleur service à rendre à nos amis algériens est de les inciter, cinquante-huit ans après l’indépendance de leur pays, à effectuer un vrai travail de recherche de leur histoire en commençant par l’histoire du territoire que recouvre le pays aujourd’hui. Histoire dont le point de départ ne serait pas le début de la colonisation mais remonterait aux racines linguistiques culturelles et cultuelles de ce que forment aujourd’hui les différentes wilayas aussi éloignées que celles d’Annaba et Oran sur la largeur de la Méditerranée ou celles d’Alger à Tamanrasset sur la profondeur du continent africain. L’ensemble du territoire n’a pas connu la conquête romaine comme les routes commerciales transafricaines n’ont pas profité à toutes les régions. Que ces recherches passent par l’histoire de la colonisation et de la décolonisation française est une évidence mais il a existé un avant forcément riche de grandeurs et de décadences expliquant la période pré-contemporaine comme il existe un après qu’il va falloir comprendre, expliquer en profondeur sous ses aspects idéologiques, religieux, politiques, économiques, pour éviter de le reproduire. Le vrai sujet pour nos amis est de rechercher dans ce passé les richesses des diversités et comment se le réapproprier dans une unité nationale respectueuse du passé intégrant, digérant les racines régionales linguistiques, religieuses, économiques… Les soubresauts actuels et la remise en cause d’errements du pouvoir est une opportunité à saisir, et les Algériens sont bien placés pour savoir que faire table rase du passé n’enfante pas automatiquement un avenir radieux.
Jean-Yves Lehu
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https://www.la-croix.com/Debats/excuses-colonisation-lAlgerie-2020-09-09-1201113034
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