Pendant quatre ans, Charline a été réalisatrice pour l'Agence d'images de l'Armée française. Formateur mais éprouvant. Témoignages dans "Les Soldats de l'image", vendredi 13 septembre, 23h30, LCP.
Pourquoi êtes-vous entrée dans l'armée ?
Charline : Je rêvais d'être reporter de guerre mais, jeune journaliste, je n'avais pas de réseau... J'ai entendu parler de l'ECPAD, l'agence qui filmait et photographiait les théâtres d'opérations où les forces françaises étaient déployées. J'ai rejoint l'armée en 2008, à 27 ans, comme officier sous contrat. J'ai été reporter pour l'armée de l'air cinq ans avant d'intégrer l'ECPAD en 2012.
Quelles étaient vos attributions ?
Partir avec un cameraman et un photographe et produire des images en réponse aux commandes quotidiennes de l'État-major. Ces images étaient ensuite proposées aux JT des chaînes. Mais je filmais aussi le quotidien des soldats : documenter la guerre pour les archives c'est essentiel. Et j'ai parfois réalisé des 26 minutes sur des angles particuliers : la médecine de guerre au Mali...
Vous souvenez-vous de votre première mission ?
J'étais à l'ECPAD depuis quelques mois quand le conflit en Centrafrique a éclaté. Mon chef m'a convoquée, je partais sous 48 heures. Je me souviens de notre arrivée à Bangui, la chaleur, la vision de cet immense camp de réfugiés... C'était très violent. J'ai un autre souvenir, celui du crash du vol Air Algérie au Mali. Je suis arrivée le matin au travail pour apprendre que je partais 4 heures plus tard de Villacoublay avec les équipes du BEA qui recherchaient les boîtes noires et l'IRCGN qui allait identifier les victimes. Je n'ai même pas pu repasser chez moi, j'ai pris les sacs que l'on doit tenir prêts au cas où et j'ai appelé une copine qui avait mes clés pour qu'elle vide mon frigo et la machine de linge...
Sur place, êtes-vous un soldat comme un autre ?
J'ai eu une formation de combattant, je porte un gilet pare-balles, un casque lourd, un Famas et un pistolet 9 mm, c'est moi qui assure la protection du photographe et du cameraman lorsqu'ils travaillent. Mais je n'ai jamais eu à tirer.
Étiez-vous préparée à la violence de la guerre ?
Avant la Centrafrique, j'avais la vision fantasmée d'une guerre "propre". En Afghanistan en 2009 je n'avais pas vu de cadavres. À Bangui, je me suis retrouvée face à des actes de cannibalisme, des gens qui découpent à la machette... J'étais chef de groupe alors flancher ne m'a pas traversé l'esprit mais à Paris, quatre mois plus tard, j'ai eu le contrecoup. Les insomnies, les cauchemars, les idées noires...
C'est pour ça que vous avez fini par quitter l'ECPAD, après quatre ans ?
Probablement. Mais cela reste les quatre meilleures années de ma carrière.
https://www.telestar.fr/societe/temoignage-charline-filmer-la-guerre-c-est-essentiel-456363
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