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Monsieur le Président,
Vous avez appris avec « une immense émotion » qu’un avion de ligne s’était écrasé en Ukraine, avez immédiatement demandé que tout soit mis en œuvre pour faire la lumière sur les circonstances de cette tragédie et avez exprimé votre solidarité aux proches.
Savez-vous qu’en ce moment même des Palestiniens sont assassinés par une armée d’occupation, l’armée israélienne ?
Je m’étonne que vous n’ayez jamais eu le moindre mot pour ces victimes. On déplore le meurtre de plus de 300 Palestiniens à ce jour, dont une majorité de civils et beaucoup d'enfants. Le bilan ne cesse d’augmenter mais ce sont encore plus de 2 200 blessés, près de 2 000 maisons détruites, dont celle du Consul de France, plus de 40 000 personnes déplacées. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU, 900 000 personnes, c’est-à-dire la moitié de la population de Gaza est sans eau.
Le gouvernement israélien s'est lancé dans une nouvelle escalade meurtrière en décidant l'intervention terrestre à Gaza.
La politique d’Israël est claire : isoler toujours plus la bande de Gaza, contrecarrer toute possibilité d’union palestinienne et détourner l’attention de son offensive coloniale sur la Cisjordanie. Israël multiplie les crimes et les dénis de droit afin de maintenir l’apartheid imposé à la Palestine. Toute négociation est devenue vaine pour l’arrêter, il faut des actes forts, concrets et coercitifs.
Les justifications des autorités israéliennes qui présentent leurs exactions comme des représailles sont irrecevables. D’abord parce qu’elles frappent des civils qui sont maintenus sous un blocus inhumain depuis plus de six ans et, qu’à ce titre, elles constituent des crimes de guerre. Enfin parce qu’aucune autorité en place à Gaza ne sera jamais en mesure d’empêcher des actions violentes contre le siège de Gaza qui prend en otage une population de plus de 1,6 million d’habitants, la coupant délibérément de ses liens avec la Cisjordanie. La résistance à l’occupant est un droit et même un devoir, et non du terrorisme. Notre pays aussi a connu l’occupation pendant la Seconde Guerre mondiale.
En déclarant qu’il appartient « au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces », vous incitez à la guerre et jouez la carte de l’affrontement, vous cautionnez les pires exactions, les plus abominables crimes. C’est grave et complètement irresponsable.
En exprimant « la solidarité de la France » avec Israël sous le prétexte de tirs de roquettes en provenance de Gaza, sans prononcer le moindre mot sur les bombardements, les assassinats, les rafles, les emprisonnements de masse et les ratonnades en Palestine occupée, vous entendez impliquer notre pays dans une opération criminelle contre un peuple en lutte pour sa survie, le peuple palestinien. Cela ne peut qu’attiser les haines aveugles d’extrémistes, y compris en France.
Vous invoquez des « risques pour l’ordre public » pour justifier l’interdiction, par la préfecture de police, d’une manifestation en faveur de la paix juste et durable aujourd'hui à Paris. Il s’agit d’une nouvelle provocation, d’une entrave manifeste à une liberté constitutionnelle, celle de manifester, qui ne peut être justifiée par les débordements de la semaine dernière devant des synagogues de quelques fous furieux qu’il conviendrait d’ailleurs d’identifier et d’appréhender. J’en profite pour réclamer la dissolution administrative de la Ligue de Défense Juive, organisation criminelle, classée organisation terroriste par le FBI, et interdite d'activité en Israël comme aux États-Unis. L'impunité de ces barbares dont le seul but est de créer un amalgame entre judaïsme et sionisme est inacceptable.
Le conflit israélo-palestinien n’est pas un conflit religieux, il est un conflit de droit international. Le viol du droit international par Israël ne concerne pas uniquement les Palestiniens. Il ne concerne pas uniquement les militants de la cause palestinienne de part le monde et en France. Ce déni de droit et de justice concerne tous les Français, quelles que soient leurs opinions politiques, quelles que soient leurs éventuelles croyances. Car quand Israël viole le droit international, il viole aussi notre souveraineté nationale dans la mesure où ce droit international est supérieur même à notre droit national. C’est le sens des mobilisations pacifiques des Françaises et Français pour la paix, juste et durable, fondée sur l’application du droit international et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Exiger la reconnaissance du droit du peuple palestinien à un Etat souverain aux frontières aussi sûres et reconnues que celles de l’Etat d’Israël, ce n’est pas importer un conflit présenté habillement comme « bilatéral », c’est inscrire la politique française dans les principes qu’elle prétend défendre, qu’elle devrait normalement défendre, ce qui n’est pas le cas.
Votre responsabilité est écrasante, honteuse pour tout le peuple français.
Avec le soutien des pays européens, Israël a par exemple été élu à la Vice-Présidence de la commission de l’ONU en charge de la décolonisation. C’est un comble ! Comment la France a-t-elle pu donner son accord à une telle décision ?
Comment est-il possible que les autorités françaises acceptent que des citoyens français intègrent une armée étrangère d'occupation (l’armée israélienne), violant ainsi les lois internationales ?
Comment pouvez-vous accepter un mur de près de 700 kilomètres, une construction condamnée par les instances internationales ? Comment pouvez-vous accepter l’apartheid instauré en Cisjordanie occupée, l’intensification de la colonisation ?
La France devrait non pas aller à la « retenue » et à la « mesure », elle devrait non pas chercher à flatter telle ou telle communauté, mais condamner de la manière la plus ferme les actes d’Israël, sur la base du droit.
Le Conseil de Sécurité de l'ONU doit se réunir d'urgence pour condamner les exactions d’Israël et mettre en œuvre les moyens nécessaires à la protection et la sécurité des populations. Quand mobiliserez-vous la communauté internationale face à la colonisation, aux bombardements et à l’envahissement de la Palestine ?
L'absence de sanctions à son égard est un encouragement à la poursuite de sa politique de colonisation, d'agression permanente contre le peuple palestinien. A quel moment comptez-vous prendre des sanctions contre Israël, en stoppant, notamment, l’accord d’association Union européenne et Israël ?
La France, en tant que Haute Partie contractante à la quatrième Convention de Genève a l’obligation de respecter et de faire respecter la Convention en toutes circonstances (article 1) et de prendre toutes les mesures nécessaires pour poursuivre les personnes ayant commis, ou donné l’ordre de commettre des infractions graves à la quatrième Convention de Genève (article 146). Quand ferez-vous appliquer la quatrième Convention de Genève ?
La France doit agir pour qu’Israël mette fin au blocus criminel qu'il impose à la population de Gaza dont les conditions de vie ne cessent de se dégrader et accéder à l'ensemble des revendications palestiniennes : ouverture de Rafah par l’Égypte, accès libre de Gaza à la mer et libération des prisonniers libérés dans le cadre d'un accord et à nouveau incarcérés. Que comptez-vous faire ?
Le peuple palestinien n’en peut plus de l’hypocrisie. Aucune paix ne naîtra sans la constitution d’un État israélien et d’un État palestinien dans des frontières sûres et reconnues, celles de 1967, avec pour capitale Jérusalem-Est. Quand mettrez-vous en œuvre votre engagement électoral de reconnaissance internationale de l'État palestinien ?
L’année 2014 a été déclarée « année internationale de la Palestine » par l’Assemblée générale de l’ONU. Etiez-vous seulement au courant ? Quand la diplomatie de notre pays sera-t-elle à la hauteur de la situation ?
Dans l’attente de vous lire et que vous agissiez enfin,
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma haute considération.
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Jean-Jacques CANDELIER,
Député
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