Dédié aux martyrs de la révolution du 25 janvier en Egypte, ce poème de Hassan Teleb, écrit quatre jours après son déclenchement, est un chant qui appelle à l’éveil, à préserver et savourer l’éclat de la liberté.
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Aux martyrs de la révolution du 25 janvier ainsi qu’à tous les jeunes Egyptiens libres
Plus de « Mabrouk » désormais,
Ni de « Moubarak » * !
Le jour s’est levé.
Qu’il soit bonheur,
mon compagnon.
Savoure son éclat,
Annonce-le à ton ami
Et réveille ton voisin.
Si tu ne te lèves,
Ton sommeil n’aura pas été repos
Et la nuit ne t’aura pas porté conseil.
Lève-toi mon compagnon,
Secoue la poussière qui recouvre tes yeux.
C’est la fontaine de la rébellion.
Approche-toi,
Lave-toi maintenant.
Nettoie ton corps de ses
noirceurs.
Accomplis ta mue, jette ta peau d’esclave.
Indigne-toi
Et, pour la vérité,
Dis tout haut tes pensées secrètes.
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La lumière ne viendra pas à toi.
A toi d’aller à sa rencontre.
Résiste à ton silence,
Et bannis l’indolence.
Si tu te tais, ils t’humilieront,
Et enfonceront le dernier clou dans ton cercueil.
Ils n’auront scrupule à t’arracher ton âme
Et à planter tes champs de chardons.
Rassemble ton courage, affermis ton cœur
Et, devant les dépravés dépravateurs,
Erige toi-même tes murailles.
Ne laisse aucun scélérat
Gravir tes remparts.
Et ce ne sera que justice si sur
eux
Tu déchaînes tes tempêtes.
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Dis ton mot maintenant, épanche ton cœur.
Crie, hurle ta rage.
Peins, écris
Jusqu’à tarir l’encre de tes colères.
Purifie-toi avec le sang de tes blessures.
Sur l’arène, déclame ton poème.
Soigne-toi avec tes livres
Et de la liberté, fais ton baume bienfaisant.
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Dis ton mot maintenant,
Redis-le, une fois, deux.
Ne t’épouvante pas. Tu récolteras
Ce que tu auras semé.
Trêve de « si »,
Trêve de « mais » !
Invoque tes puissances invisibles,
Contre la veulerie,
Dis non à l’arbitraire !
Espère, répands l’espérance, détruis pour bâtir.
Ne t’éloigne que pour te rapprocher. Et chante.
Fredonne ton air spontané
Jusqu’à ce que résonne ta lyre
De ton Air éternel.
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A l’Emir du pays, dis :
« Tu t’es couronné prince et, l’âme aride,
Tu as sombré dans l’opprobre,
Seul ton départ lavera ton
ignominie ! »
Dis ton mot maintenant, non demain.
Et éclaire ton phare pour ceux qui vont venir.
Fais de la Raison ton juge
suprême
Et de ton cœur ton arbitre.
Rattrape ce que tu as perdu,
Rattrape-le !
Elève ta voix sur la Place et proclame :
Plus de « Mabrouk » désormais,
Ni de « Moubarak » * !
Plus de « Mabrouk » désormais,
Ni de « Moubarak » * !
Traduction de Yassin Temlali
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(*) Les noms propres « Mabrouk » et « Moubarak » sont tous deux dérivés de la racine arabe « baraka », qui signifie « bénédiction ». Le poète fait allusion, à travers leur ressemblance phonétique, à la similitude qu’il peut y avoir entre deux politiques en dépit de la différence de leurs intitulés ou de leurs symboles.
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