... m’était contée…
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Le constat est plus que significatif : Internet n’est plus seulement utilisé par les algériens pour entretenir un réseau de connaissances. C’est aussi un moyen pour nos citoyens, notamment pour les plus jeunes d’entre eux, de créer des nouveaux liens.
A cet égard, les outils de communication historiques du web, tels que le chat et les forums, sont toujours privilégiés par les algériens. Or, depuis quelques temps les blogs font également fureur. La tendance n’est pas qu’un simple loisir. Loin s’en faut, les blogs sont devenus un véritable canal d’expression. Religion, actualité internationale, études, sexualité, économie, etc., les blogueurs algériens parlent de tout et de rien. Ils inventent avant tout un monde virtuel régi par ses propres codes et ses propres normes afin de s’émanciper d’un monde réel verrouillé, clos sur lui-même et hermétique à leurs sensibilités. Lumière sur un phénomène qui risque bien de bouleverser à l’avenir la configuration du paysage médiatique algérien…
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Effervescence cybernétique
Il est très difficile d’analyser le phénomène des blogs sans tomber dans la superficialité. Le phénomène est en réalité très complexe et exige surtout une culture cybernétique assez vaste pour sonder en profondeur ce nouveau mode d’expression très en vogue à travers le monde entier. Ainsi, pour les novices, un blog est un site Web ayant la forme d’un journal personnel où l’auteur communique ses idées et ses impressions. D’accord, mais le concept ou la pratique est loin d’être réductible qu’à cela.
De l’aveu même des internautes, ce qui est extraordinaire avec le web, c’est qu’il nous permet non seulement de communiquer, mais aussi d’écrire noir sur blanc ce qu’on rêve en couleur. Exutoire, défouloir, ou tout simplement un support d’expressions qui échappe à toutes les censures moralisatrices et totalitaristes ? La réponse est à chercher du côté de ces blogueurs et blogueuses qui se dévoilent sans gène sur la toile à force d’être brimés par une réalité sociale qui les marginalise sur plusieurs plans.
A cet effet, il faut dire que le mot blog est à peine accepté par les dictionnaires, qu’il a déjà pris la moitié de la planète, voire même plus dans sa déferlante !
Les Algériens n’ont, naturellement, pu résister à cette vague qui a ravi tous les cœurs sur son chemin. Preuve en est, les Algériens sont fortement présents aujourd’hui sur les plus importantes plates-formes de blog du monde notamment sur Skyblog, premier hébergeur de blogs au monde. Toutefois, fait nouveau, il y a lieu de signaler que la blogosphère algérienne dispose depuis bientôt deux ans de ces propres plates-formes. Elles ne sont aujourd’hui pas moins de trois plates-formes typiquement « DZ » à héberger des blogs à 100 % « made in Algeria ». En fait, il s’agit de http://dzblog.com, http://dzblog.net et http://dzayer.info. Première plate-forme de blogging en Algérie, Dzblog est aussi la plus importante de toutes les autres existantes actuellement. Lancée officiellement le 23 janvier 2006 par une start-up privée, « Actions Technologies », Dzblog héberge désormais plus de 7600 blogs. Pas moins de 32 mille articles y sont également publiés. La plate-forme a enregistré au début de cette année plus de 7 millions de visiteurs. Ainsi, en seulement 2 années d’existence, un peu plus de 14.000 internautes visitent chaque jour la plate-forme Dzblog, avec une moyenne de 40.468 pages vues par jour. En termes de référencement international Dzblog.com est répertorié 111.000 fois chez Google et 15.600 chez yahoo. Ces chiffres renvoient, selon plusieurs spécialistes du web, à une véritable sucess story.
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L’entrée dans l’air du blog
Il faut dire que grâce à Dzblog, l’Algérie est rentrée en force dans l’air du blog. En effet, avec un mot d’ordre : un blog pour chacun, Dzblog permet à chaque citoyen algérien de devenir un webmaster et créer son site perso d’autant plus que cela ne nécessite pas de connaissance techniques avancée ou d’une expérience avertie. En arabe, en tamazight ou en français, sur Dzblog les bloggueurs algériens, vivant en Algérie, ou à l’étranger, insèrent des textes ou des photos traitants de différents thèmes. Force est également de constater que des jeunes, des hommes des femmes, issus d’horizons divers, de différents milieux et ne partageant pas les mêmes sensibilités, ont pu faire du blog un trait d’union entre eux.
A la lumière de ces données, l’on est plus que tenté de dire que le blog est en pleine expansion en Algérie. Néanmoins, il serait utile de préciser que la blogosphère algérienne se distingue par ces spécificités et ses particularités. « Les blogs algériens sont en vérité le miroir d’une société d’internautes, d’artistes virtuels qui chaque jours s’expriment et se dévoilent à travers leur espace personnel sur notre plate-forme », nous explique à ce sujet Mme Sahnine, responsable d’Actions Technologies et co-conceptrice de Dzblog. « Les bloggueurs algériens ne se contentent pas seulement de parler que de leurs passions, leurs occupations ou leur vie intimes. Leurs blogs sont avant tout un défouloir où ils transgressent les interdits et cassent les tabous pour s’affranchir de tous les carcans. Politique, sexualité, religions, sur notre plate-forme on ne connaît point la censure », poursuit notre interlocutrice qui nous rappelle à juste titre que Dzblog est une initiative qui visait, au départ, à la création d’au moins un site pour chacune des 1541 communes. « Depuis le lancement de notre plate-forme, nous avons toujours invité les bloggueurs à parler de leurs villes, de leurs régions et de leurs quartiers. Il était question pour nous de promouvoir une autre image de l’Algérie. Ainsi, le citoyen s’implique lui-même dans l’information qui circule sur sa commune. Il contribue également de ce fait à la promotion du tourisme dans sa région en faisant connaître son patrimoine et son actualité », relève encore M. Sahnine.
Quant à l’avenir, notre interlocutrice envisage de lancer des concours des meilleurs blogs et des bloggueurs des communes, des wilayas et des associations qui seront prochainement sensibilisés à travers une campagne nationale de vulgarisation et d’initiation en association avec les directions des universités, des maisons de jeunes, des maisons de culture et des cybercafés. Par ailleurs, « Actions Technologies » caresse le projet d’organiser une deuxième journée d’information sur le weblog qui sera placée sous le signe de la continuité de « Al Djazaïr Dzblog Day’2006 », première journée d’information organisée par les concepteurs de Dzblog. C’est dire donc que l’effervescence risque bien de perdurer encore sur la toile algérienne…
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Confessions de blogeurs
Le regard limpide, le visage imberbe, le sourire large, Malik, 18 ans, affiche toujours une mine joyeuse lorsque on lui parle de son blog. « Mon blog, je l’ai créé il y a plus de deux ans. Pour moi, il est loin d’être un simple journal intime publié sur la toile. Mieux encore, il représente une ouverture sur le monde. Grâce à lui, je me suis approprié un espace propre à moi. Avec mon blog je publie mes points de vues sur l’actualité et les phénomènes de société, je parle de mes passions, de mes hobbys, je raconte ma vie et mes projets d’avenir », nous confie-t-il d’emblée. Ainsi, pour notre jeune bloggueur, tenir un blog sur la toile ne se réduit guère à un simple étalage d’âme. Bien au contraire, à l’instar de la plupart de nos bloggueurs, Malik n’hésite pas à qualifier les blogs de véritable révolution cybernétique. Hayet, 23 ans, étudiante, partage, pour sa part, cette vision. « Personnellement, j’ai pris connaissance de ce phénomène grâce à une amie tunisienne. Elle avait elle-même son propre blog et en me montrant en quoi consister la pratique, j’étais rapidement séduite. La liberté que m’offrait le blog m’a paru fabuleuse », révèle-t-elle.
De son côté, Khaled, informaticien de son état, immigré algérien en France, se dit ébahi par la vitalité des blogs algériens. « Croyez-moi, je préfère visiter les blogs de mes compatriotes plutôt que de lire les journaux en ligne. Les blogeurs algériens reflètent une image crédible de ce qui se passe dans notre pays. Documentés avec des photos et, surtout, des commentaires de lecteurs, les blogs sont un miroir vivant de notre pays notamment de notre jeunesse », analyse-t-il en nous citant quelques évènements majeurs que notre pays a connu récemment et qui ont été « merveilleusement » rapportés par les blogeurs, selon notre interlocuteur. « Lors des élections législatives, beaucoup de blogeurs ont donné les résultats de leurs communes et ont pris à juste titre la température de l’atmosphère électorale de leurs quartiers ou régions. C’était vraiment instructif », poursuit-il.
Enfin, à entendre ces blogeurs, une société algérienne de l’information est bel et bien en train de naître. Ce qui augure, pour les mois à venir, de nombreux changements à l’horizon…
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par Semmar Abderrahmane
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