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Robba fille d’El-M’cid et Benian :
première dame résistante de l’Algérie antique
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Souvent,
quand on évoque l’ère chrétienne en Algérie antique, fièrement, on cite
St Augustin de Souk Ahras. Parallèlement, on balbutie sur l’évêque
Donat des Nemmemchas, exilé par Rome pour avoir résisté à son église
expansionniste. Le donatisme, doctrine religieuse purement algérienne,
a marqué l’histoire de l’église de Rome pendant sa présence en Numidie.
Du IIIème au VIème siècle, malgré les persécutions et la destruction de
leur basilique, les donatistes, issus du prolétariat berbère, ont
durement résisté jusqu’à la conquête arabo-musulmane. Robba en est un
exemple édifiant et immortel. Son épitaphe, extraite de son caveau par
Gsell, est exposée à ce jour au musée du Louvre.
Les fouilles
archéologiques faites en 1898 par Monsieur Stéphan GSELL à Benian (Ala
Miliara) en 1898, dans la wilaya de Mascara, ont mis en évidence la
basilique donatiste érigée à la mémoire de la religieuse Robba
assassinée le 25 Mars 434 après J.C par les traditeurs(1). La basilique
est construite sur les caveaux des dignitaires donatistes. Ils sont
disposés en ligne droite, à l’extérieur et à l’est de la place forte,
au sommet d’une pente rapide qui descend vers la rivière (Oued Taria).
Ils étaient presque adossés au rempart. On cite :
- L’ évêque Nemessanus qui vécut soixante ans, mourût le 22 décembre 422.
- La religieuse Julia Geliola, soeur de Nemessanus, morte le 07 octobre 422. Elle a vécu cinquante ans.
- Le prêtre Victor décédé le 21 septembre 433.
- L’évêque Donatus décédé à quatre-vingts ans après l’année 439.
- La religieuse Robba assassinée le 25 mars 434 à l’âge de cinquante ans et reçut la palme de Martyre.
- Le Prêtre Cressens mort le 27 février 434 à l’âge de cinquante ans.
- Le prêtre Donatus décédé le 11 mars 446, douze années après la martyre Robba.
La
basilique mesure 26,80 m de long, sur 16 m de large. Elle est située
sur la partie orientale du camp donatiste qui est entouré d’une
muraille avec deux sorties, l’une à l’ouest faisant face à la basilique
et l’autre au sud comme décrit sur le schéma de Gsell.
Aujourd’hui,
une partie de la muraille est apparente. Les caveaux repérés, grâce à
l’aide de l’APC de Benian, ont situé avec exactitude l’emplacement de
la Basilique. Benian, demeure un patrimoine mondial dilapidé au cours
des fouilles de 1898.»_Ce sont des monuments africains qui forment la
meilleure part du musée chrétien du Louvre. Nous y avons envoyé
l’inscription de notre martyre donatiste (Robba), les épitaphes de
l’évêque Donatus, du prêtre du même nom. enfin un des chapiteaux de la
colonne de l’abside», conclut Gsell dans son fascicule intitulé : « les
fouilles de Benian ».
Après l’indépendance, les coopérants de
différentes nationalités, informés de très près sur le site et, après
de minitieuses fouilles de surface, ont pris dans leurs bagages de la
monnaie et des bijoux berbéro-romains.
Cette fameuse et antique
cité berbéro-romaine, nous l’avons découverte à travers un passage où
Charles André Julien cite : «les fouilles opérées à Ala Miliara
(Benian), en 1898, nous permettent d’évoquer les rencontres sanglantes
entre hérétiques et orthodoxes dans la Maurétanie occidentale où le
donatisme restait puissant. Elles mirent à jour les caveaux de
plusieurs dignitaires de la secte, notamment celui de la religieuse
Robba, qui, pour avoir succombé, en 434, sous les coups des traditeurs
mérita la palme de martyre et l’érection d’une basilique». (C.A. Julien
- histoire de l’Afrique du Nord - des origines à la conquête arabe -
SNED - Alger).
Le nom Robba, nous a automatiquement orientés
vers Djebel Robba dans la plaine d’El-Mcid (Sfisef). Une histoire
légendaire racontée de génération en génération : «lors du passage d’un
cortège de mariage, et lors d’une pause au niveau du djebel, une dame,
après que son enfant ait fait ses besoins, lui aurait fait sa toilette
avec un gâteau d’origine berbère (msémène). La colère divine s’abattit
sur le groupe de fêtards qui a été transformé selon la légende en
pierre. La dame incriminée a subi une «ascension». C’est la version
transmise de père en fils pour justifier les différentes formes de
pierres incrustées dans le djebel. Depuis, ce relief de 100 m de
hauteur, à peu près, est appelé par les autochtones «Djebel Lalla
Robba». Souvent, les jours de repos, les habitants et plus
particulièrement les femmes de la région effectuent des pèlerinages sur
le lieu. Fréquemment, Le prénom de Robba est attribué à la progéniture
féminine de la région.
Robba n’est plus une légende. Une réalité
dans l’histoire de l’Algérie antique d’une part, et un patrimoine de
l’humanité d’autre part. En Afrique du Nord, plus particulièrement en
Maurétanie Césarienne, l’église romaine trouva une résistance farouche
de la part des Berbères autochtones chrétiens refusant d’intégrer
l’église impériale c’est-à-dire le catholicisme. Ils devinrent les
ennemis du pouvoir romain qui, à plusieurs reprises, les persécuta très
durement. L’histoire de l’église africaine du troisième à la fin du
cinquième siècle est toute remplie par les mille épisodes de la lutte
acharnée des dissidents (donatistes) et des catholiques.
En l’an
303, Dioclétien avait ordonné la destruction des églises et des livres
de la religion chrétienne. Beaucoup d’évêques de l’église africaine
sainte autochtone avaient faibli, ils avaient remis à l’autorité
impériale Romaine colonisatrice les saintes écritures. Ils étaient
qualifiés de «traditeurs» par les durs. Ces derniers épousèrent les
thèses de l’évêque Donat de Numidie (Donatus de Casae Nigrae) et
constituèrent le mouvement DONATISTE, vite épousé par le prolétariat
puissant du sud de la Maurétanie Césarienne. Ils constituèrent une
Eglise séparée, l’Eglise des Saints.
De la plaine d’El-Mcid
(Sfisef) à la plaine de Ghriss, les évêques donatistes ne se plièrent
jamais à la pression et la persécution de la force impériale, entre
autres Honoratus évêque d’Aqua Sirens (Hamam Bouhanifia), frère de la
religieuse donatiste Robba, et Nemessanus évêque d’Ala Miliara
(Benian), citadelle de la résistance prolétarienne de la Maurétanie
Césarienne. Ala Miliara était le nom d’un régiment de cavalerie
romaine, composé de mille hommes stationnés autour de cette place forte
donatiste. C’était une des places les plus importantes de la frontière
stratégique établie en Maurétanie Césarienne.
En 429, devant
l’affaiblissement de l’Empire romain, les Vandales, de religion
chrétienne (ils confessaient l’arianisme), envahirent les Maurétanies.
Leur rage de destruction s’était tournée contre les églises catholiques
tout en épargnant les basiliques chrétiennes donatistes. Profitant de
la présence des Vandales, le mouvement donatiste se mobilisa de
nouveau. Robba se distingua pendant cette période (429-434), pour
engager une campagne de sensibilisation et venir à bout des Berbères
romanisés catholiques qui ont bénéficié du statut de «colons». Ces
derniers se sont emparés des meilleures terres des plaines d’El-Mcid et
de Ghriss. Le Prolétariat berbère, acquis au mouvement Donatiste,
s’engagea de coeur auprès de la religieuse Robba dans sa lutte contre
les colons « Romains ». Pendant plus de cinq ans, le sud-ouest de la
Maurétanie Césarienne était la scène de troubles sanglants entre
Donatistes et Berbères romanisés. Robba est assassinée le 25 mars 434.
Les Donatistes l’élevèrent à la dignité de Martyre. L’érection de la
basilique de Robba, et Djebel Robba symbolisent la grandeur de cette
combattante. « Dans la lutte pour le nombre fut, nous dit Mesnage,
aussi prévoyant qu’audacieux; les villes étant occupées par les
catholiques de la «bourgeoisie», dirions-nous, il dirigea ses efforts
vers les campagnes où il eut un immense succès ».
Les chefs
donatistes étaient révoltés par rapport à l’autorité romaine alliée de
l’Eglise officielle, impériale. Robba la religieuse, la berbère
autochtone de la Maurétanie Césarienne profonde, avec sans doute
l’appui de l’évêché d’Aqua Sirens ( Bouhanifia ) et celui d’Ala Miliara
(Benian) a choisi le moment propice, c’est-à-dire l’invasion vandale
pour organiser les prolétaires dans un mouvement de révolte contre
l’église «officielle» et les «colons». Son action avait un double
impact, religieux et politique. Dans ce sens, Mesnage écrit : «quant
aux indigènes, c’était toujours des vaincus frémissant sous le joug; on
proteste comme on peut contre le joug qui oppresse; ne point parler la
langue du maître, c’est déjà se séparer de lui par quelque chose
d’essentielle, mais, prier autrement que lui, est beaucoup plus encore,
car cela constitue, une révolte morale, qui satisfait mieux les
sentiments de nationalité». (J. Mesnage. Le Christianisme en Afrique.
Revue Africaine. Volume 57. p499. (1913).
Pour sa part enfin, E.
Guernier impute l’échec du Christianisme en Afrique du Nord : «La
grande faute du Christianisme, en cette terre de Berbérie si bien faite
pour l’accueillir, fut de calquer ses institutions sur celle de la Rome
impériale. La chute de Rome entraîna la chute de l’Eglise et dans un
Christianisme en perte de vitesse morcelé par le morcellement même de
ses évêchés, c’est-à-dire de sa structure interne diminuée par
l’effritement de la doctrine due au schisme et plus particulièrement à
l’arianisme. L’islam eut beau jeu, puisqu’en pénétrant au Maghreb, il
ne trouvait que des chrétiens répudiant le dogme trinitaire,
répudiation qui est la base essentielle de leur doctrine».
Ainsi,
après l’an 630, les Berbères chrétiens donatistes embrassèrent à leur
majorité l’Islam. Le nom de Robba fut intégré dans le lexique des noms
arabo-musulmans, au même titre que Kahina, Dihia, Tinhinane, Thiziri...
En
conclusion, Robba, un petit nom certes, mais, un monument historique au
même titre que la grandeur et la beauté du Djebel lalla Robba.
Ancestrale, elle demeure vivante dans la mémoire collective de
l’histoire de l’humanité. Benian, la plus belle cité berbéro-romaine de
la Maurétanie Césarienne, n’a pas livré à ce jour tous ses secrets.
Gsell se limita à la localisation et la fouille superficielle de la
Basilique de Robba au niveau de la place forte. En plus de la basilique
de Robba, aujourd’hui s’ajoute « Djebbel Robba », symbole de la lutte
donatiste en Maurétanie Césarienne, jadis.
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par Belkacem Tedjini Ziane
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