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L'histoire antique de l'Afrique du Nord vient d'être revisitée, de la plus belle des manières, par Josiane Lahlou et Jean-Pierre Koffel. Les deux auteurs signent ensemble, un très bel ouvrage dédié à «Ptolémée de Maurétanie, dernier pharaon». Edité par Senso Unico éditions, avec le soutien de la BMCI, l'ouvrage fourmille de détails et de précisions historiques sur celui que les auteurs considèrent comme un libérateur et qui finit, assassiné sur l'autel de son ambition.
"Bousculades, poussières jaillissant sous les sabots des chevaux, crinières au vent, longues queues balayant l'espace lumineux, hurlements de fureur ; indescriptible enchevêtrement de cordes et de colis. Un étalon se cabre, luisant de sueur, l'oeil en furie. Son maître au milieu de la foule, à la fois goguenarde et menaçante...". Nous sommes au coeur d'une action qui ira crescendo jusqu'à l'acte final et qui, à l'image de ces belles tragédies romaines, se termine par un acte criminel et la mort du héros.
L'histoire de «Ptolémée de Maurétanie, dernier pharaon» que proposent les deux écrivains nous fait remonter le temps et voyager au coeur d'une civilisation qui avait marqué de son empreinte une époque bien révolue. Avec une patience infinie, les deux chercheurs ont réussi à mettre bout à bout les pièces d'un puzzle et à révéler un pan d'une histoire que les Marocains ont trop souvent tendance à méconnaître.
«Fils de Juba II (52 av. J.-C.-23 ap. J.-C.), lui-même fils du roi de Numidie Juba Ier, et de Cléopâtre Séléné (40 av. J.-C.-6 ap. J.-C.), unique fille de Cléopâtre VII et de Marc Antoine. Ptolémée possède donc un héritage à la fois africain, grec et romain. Il est cousin germain de l'empereur romain Claude et cousin issu de germain de Néron et Caligula.
Ptolémée et sa soeur Drusilla reçoivent une éducation romaine. En l'an 19, son père le nomme co-monarque. Quatre ans plus tard, Juba II meurt et Ptolémée monte sur le trône. En 24, Ptolémée, avec l'assistance du gouverneur romain, met fin à la révolte des Garamantes et du mercenaire Takfarinas. Pour cette victoire, le Sénat romain accorde à Ptolémée un sceptre en ivoire et une tunique de triomphe, et le reconnaît comme roi, allié et ami ». Mais cette fulgurante ascension n'eut pas l'heur de plaire à Caligula qui se sent en danger et décide de l'assassiner. C'était en 40 après J.C. La mort violente d'un symbole de la liberté et de l'affranchissement de l'Afrique du Nord du Joug de Rome avait suscité la colère et le soulèvement des tribus maures. Elles furent écrasées dans un bain de sang.
«Le souvenir du dernier roi Ptolémée, fils du Juba, s'efface peu à peu de la mémoire des hommes sur les sables des déserts et des plages de Maurétanie, parmi les tombes oubliées, dans les creux des vallées, au pied des douces collines où le printemps fait fleurir de blanches anémones, de délicates gouttes de sang, de vives renoncules, dans Volubilis, Luxus, Sala, Banassa, Tipasa, dans toutes ces villes mortes livrées aux cigognes, aux hérons garde-boeufs, au chiendent, aux liserons, dans ce calme auréolé de gloires anciennes » écrivent les deux auteurs.
Avec un talent de conteur bien inspiré, Jean-Pierre Koffel a tissé des liens entre le passé romain du Maroc et son présent. Son récit, émaillé d'anecdotes, de faits véridiques, revient aussi sur l'histoire des rois numides, du dernier Aguellid, descendant de Massinissa, de Tacfarinas
Les deux auteurs ont planté le décor de ce magnifique ouvrage dans le Maroc antique et à Tipaza (Algérie), lieu de naissance de Ptolémée, mais aussi dans les jardins des Hespérides (Luxus), à Volubilis, à Tingis (Tanger) et enfin à Rome.
Tout au long des 270 pages, magnifiquement illustrées (p120 images), Josiane Lahlou et Jean-Pierre Koffel restituent le contexte d'une époque révolue, s'attachent à suivre les traces du dernier Pharaon. Un livre rare à consulter pour s'imprégner de ces moments précieux d'une histoire à jamais révolue.
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Khadija Alaoui
Libération (Casablanca)
22 Décembre 2006
Publié sur le web le 22 Décembre 2006
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Ptolémée de Maurétanie
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Nous savons que l'empereur Caligula(Gaius Julius César Augustus) séjourna à Lyon, avec quelques rois vassalisés, dont Ptolémée de Mauritanie, fils de Juba II. Caligula fit assassiner Ptolémée durant ce séjour,
Le séjour de Gaius [Caligula] qui eut lieu pendant l'été 39 se signale par divers événements dont effectivement le meurtre de Ptolémée, fils de Juba : «Nous savons aussi qu'au nombre des divertissements variés offerts aux lyonnais fut un combat de gladiateurs sur lequel nous ne possédons aucun détails. Ce combat fournit à Gaius l'occasion d'un meurtre mémorable, celui du roi de Maurétanie, Ptolémée, fils de Juba et cousin de l'empereur, puisqu'ils descendaient l'un et l'autre du triumvir Marc-Antoine, le roi par Séléné, fille de Cléopâtre, l'empereur par Antonia, fille d'Octavie et mère de Germanicus. Gaius avait jusque là témoigné à Ptolémée beaucoup d'estime et d'affection. Il l'avait appelé et retenu à Rome, emmené avec lui en Gaule. Or comme ce personnage venait prendre sa place dans l'enceinte où les gladiateurs allaient combattre, tous les regards de l'assistance se portèrent sur lui, car l'éclat de son grand manteau de pourpre faisait sensation. Il paya de la vie cette entrée à effet. Dans un accès fou de défiance, Caligula eût tôt oublié ses bonnes relations personnelles avec Ptolémée ; à plus forte raison ne se souvint-il plus des signalés services que Ptolémée avait rendus sous Tibère, au peuple romain dans la guerre longue et difficile contre le numide Tacfarinas»
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Citation de Philippe FABIA. Il s'intitule : Gaius à Lyon et est extrait de la Revue d'Histoire de Lyon, Tome IV, 1905 pp 274-289
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