LES ROYAUMES NUMIDES
Alors que Carthage rayonnait de toute sa puissance, les Royaumes Numide de Gaia, Massinissa et Syphax, avaient atteint in degré de développement exceptionnel sur les plans économique, social et culturel. Bien que peu, ou encore mal connu, cette période reste l’une des plus passionnantes de l’Histoire de l’Algérie.
Faute de repère plus précis, il faut remonter à l’histoire de Carthage pour accéder à la chronologie des Royaumes Numides.
Selon la chronologie chrétienne, et les récits de Virgile dans l’Énéide, Elissa Didon, sœur de Pygmalion, roi de Tyr, fuyant l’oppression de son frère, débarqua avec ses trésors et une poignée de fidèles Tyriens et Chypriotes sur la côte africaine de Tunis, vers 860-870 avant Jésus Christ. Entre le lac et les marais saumâtres, dans la péninsule formée par l’ancienne embouchure et les alluvions du fleuve Medjerda, elle fonda Carthage « Qart Hadast » (ville nouvelle).
C’est aussi dans l’Énéide, que nous trouvons trace du premier personnage historique du territoire occupé par l’Algérie d’aujourd’hui, Hiarbas ou Iarbas, roi de Getulie, ancienne contrée de l’Afrique en bordure de l’Atlas Saharien. Selon Virgile, Hiarbas, fils de Jupiter Amon et d’une nymphe, demanda à Didon de l’épouser. Ayant essuyé un refus, Hiarbas fit la guerre à Carthage.
Justin, dans les histoires Philippiques, résumé de la grande histoire universelle, adaptée par Trogue Pompée d’une œuvre grecque plus ancienne, nous présenta l’épisode ainsi :
« Des envoyés de Hiarbas, chef de la tribu (Maxyés) arrivèrent à Carthage pour demander la main de Didon au nom de leur maître . . . Mais ils n’osèrent pas brusquer les choses et cherchèrent un détour. Ils feignirent d’être en quête d’un prince qui consentît à enseigner à Hiarbas et à ses sujets les moyens de vivre d’une manière moins barbare . . . »
Hérodote, au V siècle avant J.C., nous a laissé un aperçu sur le cadre de vie et sur les habitudes des Numides :
« A l’Est du fleuve Triton, vivent les Maxyés, peuple de laboureurs sédentaires possédant des maisons. Selon la tradition, une moitié de leur tête est rasée, l’autre moitié arbore une longue chevelure ; ils se teignent le corps au henné. Ils prétendent descendre des Troyens. La région où ils vivent, montagneuse, plus boisée que le territoire des Nomades, plat et sablonneux, comme d’ailleurs le reste de la Lybie vers le Couchant, abonde en fauves et animaux sauvages de grande taille : lions, éléphants, ours, ânes cornés, bracochères, cynocéphales, serpents . . . »
Hérodote nous renseigne aussi sur l’organisation de l’agriculture et les hauts rendements agricoles de la région.
Il est difficile de déterminer avec exactitude l’origine des Numides, mais l’hypothèse de l’origine troyenne émise par les propos Maxyés, est acceptable. Salluste affirme, par ailleurs, que les Massyles et les Massaéysyles auraient été amenés par Hercule, au cours de son périple vers l’Espagne.
Strabon confirme Salluste en ce qui concerne l’authenticité d’Hercule, ce fabuleux roi Assyrien, qui serait venu d’Asie avant Cyrus.
Malgré l’ignorance profonde où nous nous trouvons en ce qui concerne la Numidie jusqu’au IV siècle avant J.C., tout laisse supposer que son développement a suivi le même itinéraire que celui des peuples méditerranéens.
Au plan politique, la Numidie connut des tribus indépendantes, des républiques villageoises, de vastes royaumes dotés d’un pouvoir fort qui s’est superposé aux structures tribales.
Quand la Numidie réapparut au IVe siècle avant J.C., elle formait au couchant; le royaume des Massaéysyles limité par l’Ampsaga (Rhumel) à l’est et par la Moulouya à l’ouest, avec Siga pour capitale et le royaume des Massyles dans la partie orientale du Constantinois, avec Cirta pour capitale.
Hérodote rapporte que des relations commerciales se développèrent très tôt entre Phéniciens et Numides, favorisant ainsi la pénétration de la langue et de la culture puniques assez profondément dans le pays.
Les Numides apprirent des Phéniciens les procédés agricoles et industriels de la fabrication de l’huile d’olive et du vin, l’exploitation et le travail du cuivre. L’influence culturelle, par contre, fut très limitée et s’exerça essentiellement par l’intermédiaire de Carthage; elle ne se manifesta de manière sûre que dans le domaine de l’art, dont nous retrouvons des exemples dans les grands médracens de l’Aurès et de Tipaza.
D’après Polybe, historien grec, né en 200 avant J.C. et connaisseur de l’Afrique pour y avoir séjourné longtemps, le premier roi des Massyles fut Navarase, beau-frère d’Hannibal (247-183 avant J.C.) grand général et homme d’État carthaginois.
Après la première guerre punique (264-241 avant J.C.) Carthage dut faire face à la guerre de mercenaires, et fut aidée par la cavalerie numide du prince Navarase.
Au cours des années qui suivirent cette guerre, la puissance carthaginoise s’affaiblit, ce qui permit au roi des Massyles, Gala, grand-père de Massinissa, d’entreprendre la conquête des villes côtières, dont Hippo-Regius, qui devint sa capitale. Il fut reçu triomphalement par la population qui chassa les Carthaginois.
Pendant la deuxième guerre punique (218-202) avant J.C.) Romains et Carthaginois se disputèrent avec acharnement l’alliance des royaumes numides.
Alliée à Hannibal, la cavalerie numide se distingua brillamment. Elle parvint à envahir l’Iberia, la Gaule, traversant les Pyrénées ; puis les Alpes, contribuant à remporter en 216 avant J.C. la bataille de Cannae, la plus célèbre victoire des troupes de Hannibal, demeurée, à ce jour, dans les annales militaires, comme un exemple de stratégie et de tactique.
La résistance et la robustesse des montures et des cavaliers numides y jouèrent un rôle considérable.
La deuxième guerre punique prendra fin avec la bataille de Zama. Ce sont les troupes numides de Massinissa, rallié à Scipion, qui contribuèrent à la défaite de Carthage, contrainte alors de reconnaître Massinissa comme roi de Numidie.
Au IIIe siècle avant J.C., la Numidie masséylienne était gouvernée par Syphax qui chercha à helléniser son pays, comme le faisaient à cette époque, les autres peuples de la Méditerranée.
La guerre en Iberia achevée et dans la perspective de la guerre en Afrique, Carthaginois et Romains recherchèrent l’alliance du roi numide.
Scipion décida alors de traverser le détroit de Gibraltar(Jebel Tarik) pour négocier avec Lui. D’après Tite-Live, alors que Scipion entrait au port, Hasdrubal y arrivait aussi. Ainsi, ces deux ennemis se retrouvaient-ils sur le territoire du prince numide flatté de voir les deux plus grandes puissances du monde venir solliciter, en même temps, son amitié.
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