La commune de Marengo se nomme présentement Hadjout, à quelques dizaines de km au sud de de la Wilaya de Tipaza.
Marengo / Hadjout
UN VILLAGE PARMI TANT D'AUTRES ... SURGI DU NEANT
La partie occidentale de la Mitidja, dépression limitée au sud par l'Atlas Tellien au nord par la chaîne des collines du Sahel, collines de faible hauteur (268 m au point le plus haut, dominé par "le tombeau de la Chrétienne") se trouvait privée de tout exutoire vers la mer sur une distance de 40 kilomètres entre l'Oued Nador à l'ouest et l'Oued Mazafran à l'est. Les eaux provenant de l'Atlas ne pouvant atteindre la mer, une vaste zone marécageuse s'était formée, zone comprenant en son point le plus bas le lac Halloula.
La superficie de ce dernier variait considérablement entre les périodes de pluies et les périodes de sécheresse. Il était une des causes essentielles de l'insalubrité de la région, laquelle était couverte de broussailles et de palmiers nains. En 1830, cette partie de la Mitidja n'était pas peuplée, le paludisme et le choléra régnaient en maîtres. Elle ne comprenait pour toutes voies de communication que de rares sentiers qui se frayaient un chemin dans les broussailles. Vivaient à sa périphérie des tribus parmi lesquelles la tribu des Hadjouties, tribu guerrière. Ces derniers, qui s'avérèrent redoutables pour les soldats français et pour les colons, profitaient de leur position de tribu maghzen pour vivre au dépend des tribus avoisinantes et cela sur un vaste territoire concédé par le Beylick.
L'ARRIVEE DES COLONS EN ALGERIE
Le contraste entre le départ de la Métropole, avec des cérémonies orchestrées par le gouvernement qui engendraient l'enthousiasme, et l'arrivée sue les lieux des colonies pouvait abattre le moral des plus optimistes. L'armée, avec les faibles moyens dont elle disposait pour assurer cette tâche, pallia, au mieux qu'elle put, toutes les insuffisances. Parmi les 42 centres prévus, 3 étaient situés dans la Mitidja de l'Ouest.
En 1848, en France, le Gouvernement provisoire se heurte à d'importants problèmes de chômage, aggravés après les émeutes de juin par la présence d'éléments turbulents" qu'il désire éloigner de la Métropole. Le 19 septembre une loi prévoit la création en Algérie de 42 colonies agricoles, cette loi relève plus de la volonté de résoudre des problèmes intérieurs que de la volonté de créer de nouveaux aménagements en Algérie. Ce programme entrepris dans la plus grande précipitation se réalisa aussi dans la plus grande confusion :
- le voyage des émigrants était organisé dans des conditions épouvantables.
- aucune infrastructure n'était prête à l'arrivée des nouveaux colons.
- le pays était souvent insalubre .
- il manquait d'eau potable.
- la sécurité n'était pas toujours assurée .
- les décisions administratives n'arrivaient pas,
- etc.
Marengo, primitivement appelée Meurad, était un de ces trois centres. Sa création fut confiée au capitaine du Génie Victor de Malglaive qui fit une oeuvre remarquable, qui sut prendre des initiatives, et n'hésita pas à engager la dot de son épouse décédée pour suppléer au manque de crédits. Jugeant que le site prévu par une commission n'était pas le meilleur, il n'hésita pas à le déplacer, de son propre chef, de quelque cent mètres. Cela lui valut des arrêts de rigueur symboliques et des félicitations ...officieuses.
Le programme qui prévoyait l'installation de 150 feux fut ramené à 100 feux alors que l'enceinte fortifiée du village était en pleine édification. De Malglaive décida de ne rien changer à l'enceinte et de supprimer simplement l'aménagement des lots du centre, ce qui créa une très grande place centrale que certains critiquèrent la considérant comme une zone désertique. Ce fut par la suite une aubaine pour le village car elle permit de créer une zone urbaine centrale (mairie, école, jardin public, place des fêtes avec kiosque) qui fit de Marengo la petite ville la plus attrayante de la région. Les premiers colons quittèrent Paris le 19 novembre 1848, soit deux mois jour pour jour après la promulgation de la loi, et arrivèrent à Marengo le 19 décembre après un mois de voyage harassant. Commençait alors une longue et tragique lutte pour la survie, lutte qui ne prit fin vraiment que 78 ans plus tard avec l'assèchement du lac Halloula. Les conditions d'accueil étaient épouvantables : deux baraques ont pu être montées par l'armée. On y entasse les femmes, très nombreuses, et les enfants. Les hommes doivent coucher sous la tente sur des jonchées de diss ou de palmier nain. L'eau potable est si rare que les familles se la disputent. Très vite les maladies apparaissent, d'autant plus facilement que les conditions minimales d'hygiène ne peuvent être observées. La première année le taux de mortalité effrayant atteingnait 23,4 %, le quart de la population ! Ce taux est d'autant plus effarant qu'il concerne une population d'âge moyen très bas, comprenant peu de personnes âgées.
Les principales causes de décès sont les privations, le choléra et le paludisme. Ces décès engendrent le découragement. Mais sous la direction toujours active et intelligente de De Malglaive, les autres colons s'accrochent, de nouveaux arrivants comblent les vides.
Sur le millier de parisiens, il ne reste plus que 40 familles. Alsaciens, Lorrains, Italiens, Maltais, Espagnols arrivent et s'intègrent en une grande communauté fraternelle. Avec l'aide de l'Armée des maisons en pisé sont construites, le défrichement est commencé, le problème de l'eau potable est tant bien que mal résolu, d'abord par le captage de deux maigres sources dans le lit de l'oued Meurad, ensuite par le captage d'une troisième source, toujours dans le lit de l'oued Meurad mais à 8 kilomètres de Marengo. Si le problème de l'eau potable est à peu près résolu, celui de l'irrigation reste entier. Après de longues tergiversations l'administration adopte en 1852 le projet de construction d'un barrage sur l'oued Meurad, projet préconisé par de Malglaive. Le barrage est prévu à 7 kilomètres en amont de Marengo. Il fallut attendre 1854 pour obtenir les premiers crédits qui furent rognés dès 1855, pauvres crédits ! Le barrage commença à fonctionner en 1855, et fut un facteur important de richesse pour la région. C'est par décret en date du 11 février 1851 que Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République Française donna à Marengo son nom définitif. Il eut été plus juste qu'il s'appele "MALGLAIVE" .
Mais le problème le plus important, celui de l'insalubrité, restait entier. De nombreuses tentatives d'assèchement de la région sont faites avec peu ou pas de résultat. - percement de la couche imperméable du sol, détournement d'oueds, construction de drains énormes, etc ...
Son vignoble s'étendait sur 2276 hectares avec une moyenne de 19 Ha 60 par propriétaire. En 1955, ce vignoble produisit 127627 hectolitres de vins, soit une production moyenne de 1.139 hecto-litres par producteur. Une forêt communale de 220 hectares, remplaçant les broussailles et palmiers nains de l'origine, apportait sa contribution à l'amélioration du climat.
L'équipement de la ville était complet, il comprenait :
- Services publics : 1 Mairie, 1 Gendarmerie, 1 Justice de Paix, 1 Hôpital, 1 Collège d'Enseignement Général, 3 Ecoles de garçons, 3 Ecoles de filles, 1 Ecole maternelle, 1 Poste, 1 Jardin public etc... Tous les services d'états ou communaux y étaient représentés.
- Services privés: Commerces de toutes sortes, Artisanat actif (mécanique, forge, chaudronnerie, bourrellerie, travaux publics, briqueterie, etc., 5 banques et organismes de prêts.
- Vie associative : Elle y était très développée : Associations agricoles, d'Anciens Combattants, de Prisonniers de Guerre, Dames de Charité, Ligue de l'Enseignement, Union musicale, Société de Chasse, etc...
Les sports y étaient largement pratiqués sur des terrains aménagés.
Avant de conclure nous rappellerons que Marengo paya un lourd tribut aux deux guerres, celle de 1914 -18 et celle de 1939-45.
Nous emprunterons notre conclusion à notre ami Clément Bollé, ancien directeur d'école de Marengo, qui a fait une étude remarquable et précise sur la région.
"Ceux qui, journellement ou occasionnellement, traversaient cette merveilleuse plaine, bordée de collines au nord, des montagnes, parfois couvertes de neige, de l'Atlas au sud, au milieu, des vignobles et des orangeraies, ont-ils songé parfois à ce qu'elle était un peu plus d'un siècle auparavant ? Ont-ils eu un souvenir ému pour ces pionniers qui venaient chercher là, sinon la fortune, du moins une vie plus facile, et qui ne trouvèrent que peine, maladie et mort ? "
Pour terminer précisons que Marengo ne fut pas un cas particulier, les drames, les souffrances et les seuils que connurent les premiers pionniers présidèrent également à la création de la plupart des colonies agricoles.
RESUME DE L’HISTOIRE DE HADJOUT
Hadjout autrefois Marengo est l’un des premiers centres de la colonisation créés en Algérie. Implanté à l’extrémité occidentale de la Mitidja, il fut créé sur la rive droite de l’oued Meurad, sur un plateau d’une altitude de 113 mètres. Pendant la colonisation Française de 1835, le Capitaine François de Malglaive fut envoyé par son gouvernement pour construire des ouvrages de défense contre les Hadjoutis qui s’étaient insurgés contre la conquête de leur territoire par les Français. Malgré cette révolte qui a duré plusieurs dizaines d’années, la Colonie Française a pu s’implanter.
Hadjout fut érigée en commune de plein exercice le 11 février 1851. La commune englobait alors les territoires de Tipaza, Boukika, Sidi-Rached, Meurad, et Ahmer-el-ain.
Hadjout a pris le nom de Marengo. Ce n’est qu’au lendemain de l’indépendance de notre pays que la ville a pu retrouver son appellation d’origine « HADJOUT ».
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