Alain Gresh : ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, fondateur des journaux en ligne Orient XXI et Afrique XXI, spécialiste du Proche-Orient. Rony Brauman : ancien président de Médecins Sans Frontières, enseigne au Humanitarian and Conflict Response Institute (HCRI), chroniqueur à Alternatives Economiques.
Cent trois journalistes palestiniens tués à Gaza, interdiction d’Al-Jazira : Israël est loin d’être un paradis pour les voix critiques, comme le prouve la baisse de sa note au classement Reporters sans frontières de la liberté de la presse. De son côté, le discours dominant dans les médias européens exclut souvent les Palestiniens du champ politique. Comment écrit-on sur la Palestine quand on est à Jérusalem ? Observations d’une reporter française après cinq ans sur place.
29 novembre 2023. Un soldat israélien vise derrière un mur alors que des journalistes couvrent leur patrouille dans le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée.
Zain JAAFAR/AFP
Depuis plus de sept mois, les journalistes qui travaillent sur Gaza sont privés d’accès au terrain. L’État israélien interdit aux médias étrangers de se rendre dans l’enclave palestinienne, toujours considérée par l’Organisation des Nations unies (ONU) comme un territoire occupé par Israël, même après le retrait unilatéral décidé en 2005 par le premier ministre de l’époque, Ariel Sharon.
Quiconque s’est déjà rendu à Gaza n’a de doute sur la réalité de cette occupation. On ne voyait pas de soldats ni de colons israéliens au coin des routes, cependant Israël contrôlait les cieux. En permanence, résonnait le bourdonnement des drones, encore plus obsédant la nuit lorsqu’ils volaient à basse altitude. Les pêcheurs gazaouis qui tentaient de s’aventurer au-delà du périmètre autorisé par l’armée – sans cesse modifié – se faisaient tirer dessus par la marine israélienne. Et les agriculteurs risquaient de se prendre une balle s’ils s’aventuraient trop près de la barrière séparant Gaza du territoire israélien. Depuis le 9 octobre, l’enclave est coupée du monde par Israël qui laisse entrer une infime partie de l’aide humanitaire, bien trop insuffisante.
À EREZ, UNE FOUILLE MINUTIEUSE ET SOUVENT HUMILIANTE
Avant octobre 2023, les journalistes étaient parmi les rares à pouvoir visiter Gaza, sous blocus israélien depuis 2007. Non sans difficulté, il fallait obtenir une carte de presse israélienne, délivrée par le bureau gouvernemental de presse, qui convoquait parfois les reporters dont il n’appréciait pas beaucoup le travail pour une « discussion », avant la remise en main propre du précieux sésame. Il fallait aussi obtenir un permis auprès du Hamas. Un reportage réalisé un peu trop près du grillage séparant Gaza d’Israël sans avoir demandé d’autorisation préalable m’a valu quelques invitations à prendre un café au ministère de l’intérieur à Gaza. Dans l’enclave palestinienne, nous devions être systématiquement accompagnés d’un fixer : un journaliste gazaoui qui nous ouvrait les portes et son carnet d’adresses.
Aller à Gaza était donc coûteux. On s’y rendait en général plusieurs jours, pour une série de reportages. Le terminal d’Erez, point de passage entre Israël et Gaza, n’était ouvert qu’en semaine jusqu’à 15 heures, et fermait pendant les fêtes juives. Au retour, les journalistes subissaient une fouille minutieuse et souvent humiliante : depuis leurs bureaux vitrés en hauteur, des soldats israéliens nous donnaient des ordres par interphone. En bas, avec nous, les employés du checkpoint étaient tous arabes.
Les Palestiniens étaient encore plus malmenés. Nombre d’entre eux étaient de surcroît malades, car c’était l’un des rares motifs justifiant d’obtenir un permis de sortie par Erez. J’ai ainsi vu de mes propres yeux une vieille femme en chaise roulante obligée de passer un tourniquet debout, soutenue par les employés du terminal. Après avoir passé le contrôle, nos affaires nous étaient rendues éparpillées. Certains retrouvaient du matériel cassé ou s’étaient fait voler des produits de beauté.
UNE COUVERTURE DÉSINCARNÉE
Ce n’est pas la première fois qu’Israël bombarde à huis-clos. Depuis mon arrivée à Jérusalem en 2018, dès qu’une opération militaire dure plus de quelques heures, Erez se retrouve fermé. Mais ce qui est inédit, en revanche, c’est la durée. Sept mois. Ma dernière visite à Gaza remonte à juin 2023. Pour une fois, j’avais un peu de temps. Je réalisais un reportage sur la coopération culturelle et, contrairement à mes dernières visites en mai 2021 et août 2022, l’enclave vivait une période d’accalmie relative.
De nouveaux restaurants et cafés avaient ouvert sur la corniche. À l’hôtel Deira, des étudiant·es fêtaient leur diplôme de master, dansant et riant sur des tubes égyptiens à la mode, face à la mer. Le matin, les coups de sifflet des maîtres-nageurs résonnaient sur les plages. Ils envoyaient des troupes de petits garçons en short et maillot de corps, affronter les vaguelettes de la Méditerranée. Depuis un an, la mer était propre, grâce à des travaux sur les infrastructures, financés par les bailleurs internationaux. Des souvenirs qui contrastent violemment avec les images parvenant de Gaza aujourd’hui. Désormais seuls sur le terrain, les journalistes palestiniens accomplissent une minutieuse documentation dans des conditions dantesques, payant parfois de leur vie ce travail essentiel.
Une partie de moi ne réalise pas l’ampleur des dévastations. La distance rend certaines réalités moins tangibles. C’est le but : nous garder hors-jeu. Qu’on ne sente pas, qu’on ne vive pas dans notre chair l’horreur des massacres israéliens à Gaza. Malgré tous les efforts déployés, notre écriture reste désincarnée. Il y a des événements qu’on ne voit pas. Depuis des mois, on est submergé de récits terribles et on manque de temps pour tout confirmer et documenter. Parfois, les informations sont vérifiées plus tard, alors que la machine médiatique est déjà passée à autre chose. D’autres fois il est impossible, en quelques minutes au téléphone, d’aborder certains sujets. Quel parent raconterait à une inconnue au bout du fil ce qu’il ressent après avoir enterré le corps déchiqueté de son enfant ? Un ami gazaoui sorti de l’enclave me confiait le mois dernier : « Ce que je vois dans les médias ne reflète pas le dixième de ce que nous avons vécu. »
LES BOMBES ISRAÉLIENNES HORS CHAMP
Cette distance crée un déséquilibre. Après le 7 octobre, des envoyés spéciaux du monde entier ont été dépêchés en Israël pour couvrir les crimes du Hamas et des combattants palestiniens dans les kibboutz. Pendant de longues heures, ils ont interviewé les rescapés, photographié les lieux, les mémoires. À Tel-Aviv, ils ont enchaîné les directs sous le feu des roquettes palestiniennes. Les bombes israéliennes, même lorsqu’elles anéantissent une famille entière en quelques secondes sont restées, elles, majoritairement hors champ, faute de journalistes étrangers sur place. La fumée des explosions, le bruit, la peur dans l’enclave palestinienne n’ont pas saturé les écrans occidentaux.
Ceux du monde arabe, en revanche, si. Car les images existent : nos consœurs et confrères palestiniens réalisent un travail remarquable. Les images sont, pour beaucoup, atroces. Elles alimentent une grande partie de nos articles. Ces journalistes sont nos yeux et nos oreilles sur place, les seuls témoins des massacres en cours. Leur courage est immense et ils devraient être davantage sollicités par les médias occidentaux. Le discrédit que certains cherchent à attacher à leur travail, sous le seul prétexte qu’ils sont Gazaouis, devrait être dénoncé avec force.
Car les Palestiniens documentent avec précision leur propre histoire. Pourtant souvent, elle n’est exposée que lorsque d’autres, non-Palestiniens, s’en emparent pour l’analyser. Ainsi, les récits de la Nakba (la catastrophe), l’exode de 900 000 Palestiniens avant et après la création d’Israël en 1948, ont émergé notamment après le travail des « nouveaux historiens » israéliens qui, dans les années 1980, ont exhumé des archives israéliennes et britanniques documentant cette période. Depuis longtemps, les Palestiniens avaient déjà compilé les récits des réfugiés, sans rencontrer le même écho.
UNE ANALYSE CLÉ EN MAIN
De même, pour documenter ce qui se passe en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, les médias occidentaux s’appuient beaucoup sur des sources israéliennes : sécuritaires, politiques ou médiatiques. En Israël, la presse écrite est relativement libre bien que très orientée, à l’exception de quelques publications, notamment le quotidien Haaretz. Les journaux israéliens sont facilement accessibles : une partie sont traduits en anglais. L’équivalent côté palestinien n’existe pas. En anglais, la chaîne qatarie Al-Jazeera est la plus exhaustive. Aujourd’hui, sa couverture de Gaza est unique, avec des reporters presque partout et une large variété de sources. Elle n’est pas locale, mais elle est née de la volonté de placer la question palestinienne au centre de sa couverture. Sa présence en Israël est mise en cause : le 1er avril dernier, le parlement israélien a voté une loi permettant d’interdire la diffusion en Israël de médias étrangers portant atteinte à la sécurité de l’État, ce que le gouvernement israélien vient de faire pour Al-Jazeera. Les autres médias sont en arabe, comme Arab 48, le journal en ligne des Palestiniens citoyens d’Israël, l’un des rares à couvrir l’actualité israélienne et palestinienne avec des analyses et des actualités factuelles.
De manière générale, trouver des informations côté israélien est relativement facile : les numéros de téléphone des responsables et porte-paroles gouvernementaux sont accessibles sur un site internet référencé. Le bureau gouvernemental de presse publie des extraits de discours des responsables politiques et organise des tours thématiques en Israël ainsi que dans les colonies. D’autres organismes proposent des visites de terrain aux journalistes étrangers et des visioconférences en anglais avec des chercheurs, professeurs ou anciens responsables de l’armée.
Dans l’urgence médiatique, lorsque l’article est à rendre dans deux heures, recueillir une analyse « clé en main » sur une actualité qui vient de tomber est évidemment bien pratique. À mon arrivée dans le pays, l’un des premiers courriers électroniques reçus émanait de l’organisation Israel Project1qui n’existe plus aujourd’hui. À l’époque, ce lobby mettait en contact les journalistes avec toutes sortes d’experts et responsables politiques. Israel Project organisait des soirées « whisky et sufganiyot » (beignets dégustés lors de la fête juive de Hanoukka), en plus de visites dans le pays. À une période, celles-ci se faisaient en hélicoptère pour « comprendre la géographie d’Israël », pays pourtant bien plus petit que la France.
LA CHRONIQUE DES MORTS PALESTINIENNES DANS L’INDIFFÉRENCE DU MONDE
Avant le 7 octobre, la communauté internationale avait embrassé la marginalisation de la question palestinienne orchestrée par Israël. Les manifestations monstres qui secouaient le pays depuis le début de l’année 2023 intéressaient bien davantage les rédactions. Peu de médias parlaient de la répression féroce de l’armée israélienne en Cisjordanie, depuis une série d’attentats en Israël au printemps 2022 et l’émergence de poches de résistance dans différentes villes comme Naplouse ou Jénine. En juin 2023, au cours de quelques semaines, j’avais couvert l’assassinat d’un petit garçon de deux ans et demi, Mohamed Tamimi, par un sniper israélien devant chez lui, à Nabi Saleh, dans le centre de la Cisjordanie. Un jeune Palestinien, Omar Jabara, avait également été tué d’une balle dans la poitrine par la police israélienne alors qu’il tentait de défendre son village, Turmus Ayya, aux alentours de Ramallah, contre une attaque de colons particulièrement violente. Mon travail consistait à tenir la chronique des morts palestiniennes, dans l’indifférence du monde. Cumulés, le nombre de personnes tuées atteignait des niveaux inégalés depuis des années. Cependant au jour le jour, certains passaient sous les radars, et l’effet de masse était effacé.
Probablement l’un des plus scrutés, le récit médiatique sur la Palestine est façonné par des poncifs qui brouillent la réalité sur le terrain. Après quelques semaines à Jérusalem et quelques lectures, il apparait vite évident que décrire la situation comme un « conflit entre deux parties » est totalement inopérant. Il s’agit bien d’une situation coloniale, avec un État colon et un peuple colonisé, privé de son droit à l’autodétermination. Que signifie donc le concept de « coexistence » au sein même de la société israélienne, alors qu’ONG israéliennes et internationales ont documenté une situation d’apartheid ?
Ces dernières semaines, le récit autour de Gaza tend à se cristalliser autour de la question humanitaire. On invite des travailleurs d’ONG à répondre à l’armée israélienne en plateau plutôt que de laisser la parole aux Palestiniens. Ces derniers sont des abstractions, ils sont dépolitisés. Rapporter leurs voix, les replacer au centre du récit et leur donner une importance vaut d’être taxé de militant·e. Une manière de décrédibiliser le travail effectué, présenté comme forcément partial et hors du cadre de « l’objectivité journalistique ».
UN TRAVAIL SOUS PRESSION
Lorsqu’on se trouve sur le terrain, certains biais deviennent évidents. Ainsi, depuis des décennies, dans le récit médiatique dominant, les Palestiniens « meurent » ou « périssent » quand les Israéliens sont « tués ». En 2021, alors que des foules de jeunes hommes prenaient la rue, parfois violemment, pour affirmer leur identité palestinienne tout en étant détenteurs d’un passeport israélien, ils étaient partout décrits comme des « Arabes israéliens ». Eux se percevaient comme « Palestiniens citoyens d’Israël ». C’est donc ainsi que je l’ai écrit dans mes articles, parce que cette désignation contient une revendication identitaire — celle d’être Palestinien. Perçue par Israël comme une menace, elle a déclenché une avalanche de réactions indignées à mon encontre, dont une série de tweets d’un représentant des autorités israéliennes. Pourtant, qui sont ces 20 % d’Israéliens, s’ils ne sont pas les descendants de Palestiniens restés sur leurs terres au moment de la Nakba, et ayant de cette façon obtenu la citoyenneté israélienne ?
Dans une tour du sud de Jérusalem, une armada d’employés du bureau gouvernemental de presse israélien épluchent soigneusement les productions des médias internationaux sur Israël, en langue originale. Puis, un de leurs représentants vient se plaindre de l’utilisation de tel ou tel terme, dénonce un « manque d’éthique journalistique » ou remet en question des informations, parfois sur X (ex-Twitter), parfois directement par email, sans toujours mettre l’auteur en copie mais en s’adressant directement à sa hiérarchie. En 2018, l’ambassadrice d’Israël en France avait demandé par écrit à la direction de France Télévisions d’annuler la diffusion d’un reportage d’Envoyé spécial consacré aux milliers de manifestants blessés par les balles des snipers israéliens le long de la barrière séparant Israël de la bande de Gaza lors de la « marche du retour ». La chaîne publique n’avait néanmoins pas cédé.
Des sites internet effectuent également ce travail de surveillance, en publiant des articles à charge contre des reportages ou des analyses. Aux États-Unis, les plus puissants sont Canary Mission ou Camera. En France, à une échelle bien plus modeste, le site internet InfoEquitable du journaliste de France Télévisions Clément Weill-Raynal décortique les productions de médias francophones. Ces pressions ne sont pas sans conséquence. Certaines rédactions cèdent, modifient ou s’abstiendront la prochaine fois. Inconsciemment aussi, parfois, s’insinue l’autocensure.
La pression s’est étendue aux organisations humanitaires et aux universitaires. Souvent, sous un article à propos de Gaza posté sur internet, certains écrivent : « Et les otages ? » Une assignation à la symétrie, comme si les souffrances des Palestiniens devaient être ramenées à celles des Israéliens, constamment. Cette question fait écho à une autre, que m’ont posée beaucoup d’Israéliens depuis cinq ans : « Pourquoi vous n’écrivez pas sur le génocide ouïgour ou le Soudan ? » Comme si les crimes commis ailleurs dédouanaient les crimes commis ici. « J’ai choisi de travailler à Jérusalem, c’est de cet endroit dont je parle », leur répondais-je.
Alors que des discussions sont toujours en cours pour une trêve entre le Hamas et Israël et que l’inquiétude monte au sujet d’une possible offensive à Rafah, le Qatar appelle à empêcher un « génocide ».
Un enfant devant un batiment détruit dans un bombardement israélien à Rafah, dans la bande de Gaza, le 8 mai 2024. - / AFP
Le Qatar a appelé mercredi 8 mai la communauté internationale à agir pour empêcher un « génocide » à Rafah, face à la menace d’une offensive d’ampleur de l’armée israélienne sur cette ville devenue un refuge pour 1,4 million de Palestiniens à la lisière sud de la bande de Gaza.
Le pays du Golfe, médiateur dans les négociations sur une trêve entre Israël et le Hamas palestinien, a appelé dans un communiqué « à une action internationale urgente qui permettrait d’empêcher que la ville ne soit envahie et qu’un crime de génocide ne soit commis ».
L’armée israélienne a multiplié les frappes aériennes mercredi dans plusieurs secteurs de la bande de Gaza, notamment à Rafah où elle a déjà déployé des chars mardi et pris le contrôle du passage frontalier avec l’Egypte. Doha a critiqué mercredi la prise de ce passage stratégique, ajoutant « condamner fermement » les bombardements sur la ville, dont les quartiers ont été évacués par des dizaines de milliers de familles à la suite d’un appel des autorités israéliennes en prévision d’une éventuelle opération terrestre.
Des discussions en cours pour une trêve
L’appel du Qatar intervient alors que les médiateurs égyptien, qatari et américain tiennent des discussions au Caire en vue d’un cessez-le-feu et une libération des otages retenus dans le territoire palestinien.
En représailles, Israël a lancé une opération militaire dans la bande de Gaza qui a fait jusqu’à présent 34 789 morts, principalement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
omantique avant tout, Darwich n’a jamais eu pour ambition d’être la voix du nationalisme arabe. Lui voulait être un poète de l’amour. La mystérieuse Rita, dont le nom a fait le tour du monde arabe grâce à Marcel Khalifé, est évoquée dès les premiers recueils (La Fin de la nuit, Les oiseaux meurent en Galilée…). En 1995, Darwich raconte enfin l’histoire de cette danseuse juive (nommée Tamar dans la réalité), rencontrée autrefois au bal du Parti communiste israélien, dont il était adhérent. La guerre des Six-Jours (1967) aura eu raison de leur intense idylle… « Entre Rita et mes yeux : un fusil. Et celui qui connaît Rita se prosterne. Adresse une prière. A la divinité qui rayonne dans ses yeux de miel. » Rita incarne l’amour impossible. A travers elle, Darwich, toujours très métaphorique, pleurait à la fois la femme et sa terre bafouée. le poème revient sur l’histoire d’amour (tragique?) qu’aurait vécu le jeune Darwich, musulman palestinien, avec Rita, une juive israélienne…
Entre Rita et mes yeux, un fusil Et celui qui connaît Rita se prosterne Et adresse une prière à la divinité qui rayonne dans ses yeux de miel Moi, j’ai embrassé Rita quand elle était petite Je me rappelle comment elle se colla contre moi Et de sa plus belle tresse couvrit mon bras Et moi, je me rappelle Rita Ainsi qu’un moineau se rappelle son étang Ah Rita! Entre nous, mille oiseaux, mille images D’innombrables rendez-vous criblés de balles par un fusil Le nom de Rita prenait dans ma bouche un goût de fête Le corps de Rita dans mon sang était célébration de noces Et deux ans durant, je me suis perdue dans Rita Et deux ans durant, Rita a dormi sur mon bras Nous prêtâmes serment autour du plus beau calice, nous brulâmes dans le vin de (nos) lèvres et nous ressuscitâmes. Ah Rita! Qu’est-ce qui aurait pu éloigner mes yeux des tiens, Hormis le sommeil et les nuages couleur de miel, avant ce fusil ? Il était une fois Ô silence du crépuscule Au matin, ma lune a émigré, loin dans ces yeux couleur de miel Et la ville a balayé tous les aèdes…et Rita. Entre Rita et mes yeux, un fusil.
MAHMOUD DARWICH
Mahmoud Darwich et Rita
MJahmoud Darwish - Algerie 1983 محمود درويش في الجزائر
Malgré la répression policière qui s'abat sur les étudiants
Parie des campus américains et faisant parfois l'objet d'une répression policière, elle a gagné Paris, Lausanne, Berlin, Montréal, Mexico ou encore Sydney.
Le mouvement étudiant contre l'agression barbare sioniste dans la bande de Ghaza continue dans le monde: parti des campus américains et faisant parfois l'objet d'une répression policière, il a gagné Paris, Lausanne, Berlin, Montréal, Mexico ou encore Sydney.
Etats-Unis: Depuis le 17 avril, une vague de mobilisation pour Ghaza a déferlé sur les campus américains, dans une quarantaine d'universités, d'est en ouest, évoquant les manifestations contre la guerre du Vietnam. Au total près de 2.000 personnes ont été interpellées, selon un bilan établi par plusieurs médias américains. Ces derniers jours, la police a procédé à une série de démantèlements manu militari de campements pro palestiniens, comme à l'université de New York (NYU) vendredi à la demande de l'établissement. Des manifestants barricadés dans la prestigieuse université Columbia, épicentre à New York de la mobilisation estudiantine, ont ainsi été chassés. A l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA), des dizaines d'étudiants ont été arrêtés. A rebours d'autres institutions, l'université Brown (Rhode Island, est) s'est accordée avec les manifestants sur le démantèlement de leur campement en échange d'un vote sur un éventuel «désinvestissement» de «sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza». Longtemps muet, le président Joe Biden a martelé jeudi que «l'ordre devait prévaloir».
France: Les forces de l'ordre ont évacué vendredi les militants propalestiniens qui occupaient depuis la veille la prestigieuse école parisienne Sciences Po, qui accueille 5.000 à 6.000 étudiants.Une semaine après une mobilisation émaillée déjà de tensions à Sciences Po Paris et une précédente évacuation de locaux, «91 personnes ont été évacuées, sans incident», a précisé la préfecture de police de Paris. L'administrateur provisoire de l'école, Jean Bassères, a affirmé qu'il n'était pas question, comme le réclament certains étudiants, d'»investiguer» les relations de Sciences Po avec des universités israéliennes.La mobilisation étudiante en faveur de Ghaza et des Palestiniens reste circonscrite à Sciences Po Paris, ses campus en régions (Lille, Le Havre, Dijon, Reims ou Poitiers) et aux Instituts d'études politiques (IEP) mais peine à faire tache d'huile dans les universités. La ministre de l'Enseignement supérieur Sylvie Retailleau a demandé jeudi aux présidents d'université de veiller au «maintien de l'ordre» public, en utilisant «l'étendue la plus complète des pouvoirs» dont ils disposent.
Allemagne: La police est intervenue vendredi pour évacuer les manifestants pro palestiniens rassemblés devant l'université Humboldt de Berlin, au centre de la capitale. Certains manifestants ont été expulsés «par la force» après avoir refusé un autre lieu proposé, a indiqué la police berlinoise sur X. Le maire de Berlin, Kai Wegner, a critiqué la manifestation, écrivant sur X que la ville ne voulait pas de «situations comme aux Etats-Unis ou en France».
Canada: Le mouvement étudiant propalestinien s'est implanté dans plusieurs villes dont Vancouver, Ottawa, Toronto et Montréal. Le premier campement érigé et le plus important, celui de la prestigieuse université McGill à Montréal, a débuté le 27 avril et pris de l'ampleur. Les centaines de manifestants ont fortifié leur campement ces derniers jours en raison de la menace d'un démantèlement par les forces de l'ordre. Ils se disent déterminés à occuper les lieux aussi longtemps qu'il le faudra, jusqu'à ce que McGill coupe tout lien financier ou académique avec Israël. La direction de l'établissement a déclaré mercredi souhaiter que le campement soit démantelé «sans délai», affirmant qu'il s'agissait d'une demande «non négociable». Selon elle, «un certain nombre de manifestants ne font pas partie de la communauté étudiante». La police de Montréal, qui dit préconiser une dénouement «pacifique» de la situation, n'est pour l'instant pas intervenue pour démanteler le camp.
Australie: A l'université de Sydney, des centaines de manifestants pro palestiniens et pro-sionistes se sont retrouvés face-à-face vendredi. Malgré quelques échanges tendus, les deux rassemblements sont restés pacifiques et la police n'est pas intervenue. Des militants pro palestiniens campent depuis dix jours sur une pelouse face au tentaculaire bâtiment gothique de l'université de Sydney, un bastion du savoir académique australien. Comme leurs homologues américains, les protestataires veulent que l'université de Sydney coupe ses liens avec les institutions sionistes et refuse les donations de sociétés d'armement.
Mexique: A Mexico, des dizaines d'étudiants propalestiniens de l'Université nationale autonome du Mexique (UNAM), la plus grande du pays, ont dressé un camp jeudi dans la capitale, scandant «Vive la Palestine libre!» et «De la rivière à la mer, la Palestine vaincra!». Ils ont notamment demandé au gouvernement mexicain de rompre les relations diplomatiques et commerciales avec Israël. Suisse: Une centaine d'étudiants pro palestiniens occupent depuis jeudi soir le hall d'entrée du bâtiment Géopolis de l'Université de Lausanne (UNIL), exigeant un boycott académique des institutions israéliennes et un cessez-le-feu immédiat. L'occupation s'est poursuivie pacifiquement vendredi et prévoit de durer jusqu'à demain.
Le recteur de l'université de Glasgow et chirurgien britanno-palestinien Ghassan Abu Sittah, qui devait raconter au Sénat son expérience de médecin à Gaza depuis l'offensive israélienne, est empêché d'entrer en France, samedi 4 mai, a-t-il annoncé dans un message sur X. En apprenant la nouvelle, certains sénateurs ont fait part de leur indignation et de leur colère. C'est le cas de Raymonde Poncet Monge, sénatrice du Rhône. Elle est l'invitée de France24
Bosnie, Algérie, Rwanda, Iran, Irak, Afghanistan, Yémen...la grand reporter Patricia Allémonière a couvert la plupart des conflits de ces 30 dernières années. Invitée d' "Au Coeur de l'Info" elle nous livre un témoignage personnel et rempli d'humanité, de cette expérience exceptionnelle, et nous explique comment elle a jonglé entre ce métier passion et sa maternité, question centrale de son livre "Au coeur du chaos".
L’humoriste Guillaume Meurice a annoncé jeudi 2 mai la décision de Radio France de le suspendre jusqu’à la tenue d’un entretien pouvant aller « jusqu’à la rupture anticipée de contrat pour faute grave ». Cette décision intervient six mois après ses propos polémiques sur France Inter, lors de l’émission « Le grand dimanche soir ».
Pourquoi reparle-t-on du sketch de Guillaume Meurice sur Benyamin Netanyahou ?
Guillaume Meurice a annoncé jeudi 2 mai sur X (ex-Twitter) être suspendu par Radio France dans l’attente d’une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. Il ne participera pas aux deux prochaines émissions du « Grand dimanche soir » animée par Charline Vanhoenacker sur France Inter.
Si Radio France a précisé que l’humoriste continuerait d’être rémunéré, le groupe n’a pas transmis la raison de cette suspension. Cette décision intervient alors que, le dimanche 28 avril, Guillaume Meurice a réitéré des propos polémiques sur le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, déjà tenus sur la station fin octobre : « Il y a des choses qu’on peut dire. Par exemple, si je dis “Netanyahou est une sorte de nazi mais sans prépuce”, c’est bon. Le procureur, il a dit “c’est bon”. » Ce vendredi 3 mai, l’humoriste souligne avec ironie sur X : « Nous sommes le vendredi 3 mai et c’est la Journée mondiale de la liberté de la presse. Bonne journée la liberté de la presse ! »
Depuis l’annonce de la suspension de l’humoriste par Radio France, de nombreux soutiens se sont exprimés en sa faveur. Notamment celui de l’animatrice Charline Vanhoenacker sur X, qui caractérise la situation comme « très inquiétante » et ajoute que « la troupe reste mobilisée au service de la rigolade. Soutien à mon camarade ».
► Qu’est-ce qui a tout déclenché ?
Dimanche 29 octobre 2023, 18 heures, comme tous les dimanches soir depuis septembre, Charline Vanhoenacker et sa bande sont sur France Inter pour l’émission « Le grand dimanche soir ». Parmi les personnes présentes dans le studio, l’humoriste Guillaume Meurice, qui collabore avec l’animatrice depuis 2014 et la création de l’émission « Si tu écoutes, j’annule tout », devenue « Par Jupiter ! » puis « C’est encore nous ! » Ce soir-là, dans sa chronique, il suggère comme costume pour Halloween un « déguisement Netanyahou », « une sorte de nazi mais sans prépuce ». Le 6 novembre, la direction de Radio France acte une sanction disciplinaire à l’encontre de l’humoriste, qui décide de la contester devant le conseil des prud’hommes.
► Que dit la loi ?
Les propos tenus par Guillaume Meurice ont conduit à un dépôt de plainte de l’Organisation juive européenne (OJE) pour « provocation à la violence et à la haine antisémite et injures publiques à caractère antisémite » le 6 novembre. Après une enquête préliminaire dirigée par le parquet de Nanterre et confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne, la plainte a été classée sans suite le 18 avril au motif que l’infraction n’était pas suffisamment caractérisée.
Dans un entretien accordé à La Croix le 7 novembre, Nicolas Hervieu, juriste en droit public et droit européen des droits de l’homme, expliquait que, au niveau de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), « en matière de liberté d’expression, le principe est clair : la protection (de l’humoriste) s’impose prioritairement ». Dans le même entretien, le juriste rappelait que les humoristes bénéficient d’une plus grande protection de leur liberté d’expression et qu’ils ont le droit d’user de l’impertinence satirique même si cela conduit à provoquer. Et ce en raison de leur fonction et de leur utilité démocratique.
► Quelle avait été la réaction de Guillaume Meurice ?
Le dimanche 12 novembre, Guillaume Meurice fait son retour sur les antennes de France Inter. L’émission « Le grand dimanche soir » habituellement réalisée en présence d’un public, est exceptionnellement privée de ce dernier en raison des menaces, notamment de mort, reçues par l’humoriste pour qui «L’humour, c’est un marqueur de la liberté ».
Dans une chronique intitulée « Le grand pardon », il plaide pour son droit à l’outrance. Jamais l’humoriste n’a accepté de s’excuser, assumant ses propos. Pour donner son récit de la polémique, il publie un livre le 15 mars aux éditions du Seuil, Dans l’oreille du cyclone. Guillaume Meurice a aussi porté plainte à la suite des messages d’insultes et de menaces qu’il a pu recevoir.
► Et France Inter dans tout ça ?
Le 7 novembre, lendemain de l’annonce de la sanction de Guillaume Meurice par France Inter, la direction de l’antenne du groupe Radio France est convoquée, comme les autres directions des chaînes de télévision et stations de radio publiques et privées, par l’Arcom afin d’aborder le traitement médiatique de la guerre qui oppose Israël au Hamas. L’Arcom finira par adresser, fin novembre, une mise en garde à Radio France, estimant que les propos de Guillaume Meurice avaient « porté atteinte au bon exercice par Radio France de ses missions et à la relation de confiance qu’elle se doit d’entretenir avec l’ensemble de ses auditeurs ». Cet avertissement constitue indéniablement l’arrière-plan de la sanction qui vise aujourd’hui l’humoriste récidiviste et dont on devrait connaître les détails dans les prochains jours.
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