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Alain Gresh : ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, fondateur des journaux en ligne Orient XXI et Afrique XXI, spécialiste du Proche-Orient. Rony Brauman : ancien président de Médecins Sans Frontières, enseigne au Humanitarian and Conflict Response Institute (HCRI), chroniqueur à Alternatives Economiques.
Rédigé le 17/05/2024 à 16:08 dans Gaza, Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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Rédigé le 14/02/2024 à 10:49 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Le massacre est sans précédent, et ce qui le rend encore plus cruel, c'est que ses chapitres et ses phases sont diffusés en direct à la télévision. Meurtres, incendies, bombardements, famine et siège sont observés par le monde entier sans qu'aucune action ne soit entreprise.
L'encre a beaucoup coulé depuis environ quatre mois, marquant le temps des crimes commis par les forces sionistes et leurs mercenaires en Palestine. Il est impératif de comprendre les raisons qui expliquent l'échec arabe généralisé face au massacre. Comprendre les causes de l'échec diffère de comprendre les causes du crime d'occupation dans la région, et cela implique de surveiller et de décomposer les réponses arabes à trois niveaux : officiel, populaire et élitaire.
Le rôle extérieur dans le massacre est clair, voire plus que cela, les récits arabes qui tentent de se concentrer sur l'acteur extérieur sont en réalité des récits trompeurs avec des objectifs spécifiques.
Alors, qui est responsable à l'extérieur du massacre ? Quelle est la responsabilité des acteurs internes aux niveaux politique, populaire et élitaire ? Pourquoi toutes les niveaux ont-ils échoué à empêcher le crime et à stopper l'effusion de sang ? Cela signifie-t-il qu'ils ont échoué à empêcher la récurrence du crime ?
L'acteur extérieur dans le massacre de Ghaza joue un rôle clé dans la dissimulation du crime, sa justification, son financement et son soutien. Il s'agit d'un comportement historique depuis la création de l'entité occupante, qui trouve ses racines dans une entreprise conjointe européenne-américaine. L'Occident a créé, avant son retrait militaire de la région après la fin de la Seconde Guerre mondiale, une base avancée au cœur du monde arabe, réalisant de nombreux objectifs. Parmi ces objectifs, se débarrasser de la question juive sur son territoire et créer une entité militaire alternative capable de le remplacer dans le Moyen-Orient pour empêcher le renouveau de la région et garantir sa domination économique, commerciale et culturelle.
Dans ce contexte, le soutien absolu de l'Occident au projet sioniste ne peut être considéré comme un événement nouveau ou surprenant, mais plutôt comme un comportement logique et une approche naturelle d'un système international basé sur le pillage des terres et leur occupation par le chaos, la guerre et les conflits internes. Le projet sioniste est indissociable du projet du système international envers la région arabe.
La question la plus importante est pourquoi de nombreuses narrations arabes se concentrent sur le rôle de l'acteur extérieur en attribuant toute la responsabilité des crimes à celui-ci ? La réponse est que rejeter la responsabilité sur l'extérieur exonère l'intérieur ou, dans le meilleur des cas, atténue la responsabilité de l'intérieur arabe, en particulier du pouvoir politique en place, pour les massacres et les guerres en cours.
Le régime officiel s'est habitué à diaboliser l'étranger, le colonialisme occidental, les puissances croisées et les conspirations internationales qui le ciblent ainsi que les patries, afin de se présenter sous l'apparence de la victime devant l'opinion publique. Cela lui permettra par la suite de réprimer toute voix dissidente ou critique en l'accusant de collusion avec l'étranger et d'hostilité envers la patrie. C'est là qu'émerge l'un des aspects les plus importants de la rhétorique nationaliste dans le régime autoritaire, qui consiste à créer des ennemis à l'intérieur et à les lier à l'extérieur.
Par l'intérieur, nous entendons le pouvoir officiel arabe et ses institutions, telles que l'armée, les médias, le gouvernement, la diplomatie, ainsi que les forces dures et douces. Le rôle de ces autorités ne passe pas inaperçu aujourd'hui, non seulement individuellement, mais aussi sous leur forme institutionnelle collective, telle que la Ligue arabe, le Conseil de coopération du Golfe, ou d'autres.
Le siège de Ghaza, que ce soit du côté égyptien par le passage de Rafah, des frontières jordaniennes, ou même du nord du Liban, est l'acteur principal qui aggrave la tragédie du peuple palestinien et le nombre de victimes. Les pays entourant la Palestine jouent un rôle central et efficace dans le massacre en cours, contribuant grandement à soutenir l'armée d'occupation en étouffant les Palestiniens et en coupant leurs lignes d'approvisionnement.
La Ligue des États arabes a tenu un sommet en faveur de Ghaza, mais toutes ses décisions ont été confrontées à l'opposition de certains États arabes, opposés à toute mesure capable de lever le siège et d'arrêter l'effusion de sang, confirmant ainsi la participation active de l'intérieur officiel au crime.
Ce parcours est également un parcours naturel et non surprenant, car les entités arabes officielles, à quelques exceptions près, sont des entités illégitimes créées à l'image de l'entité occupante pour assurer sa protection et garantir sa survie. Le régime autoritaire arabe est plus proche de l'occupation que de la base populaire ou de la résistance, car la résistance le met mal à l'aise et révèle sa complicité. Par conséquent, il est dans son intérêt de l'éliminer.
Ce critère est celui qui explique les déclarations de plusieurs responsables sionistes, révélant que lors de leurs visites dans les capitales arabes, les responsables locaux leur demandent d'éliminer la résistance, de discipliner Ghaza et de l'empêcher de se relever. Ce critère est également celui qui nie la simple inertie du monde arabe officiel face aux massacres et confirme sa participation effective au massacre, contrairement à ce qu'il déclare devant les médias.
En conséquence, compter sur le pouvoir arabe et ses institutions, y compris les armées et les organisations, pour lever le siège du peuple palestinien est une forme de naïveté résultant d'une absence de compréhension précise des liens et de la dépendance entre le projet sioniste et le projet autoritaire de certains pays arabes.
La récente guerre d'extermination a révélé une paralysie totale dans le mouvement arabe, tant du point de vue populaire que des élites. Malgré la douleur ressentie par de nombreux sympathisants de la cause palestinienne, ils ont réalisé plus que jamais que la rue arabe et ses élites sont incapables d'influencer le cours des événements.
L'impuissance populaire découle principalement du climat de despotisme et de répression qui a accumulé depuis des décennies des traditions spécifiques dans le traitement de la question palestinienne, que le système politique a utilisées pour diriger les masses et éviter toute détérioration de la situation.
Cette impuissance est clairement visible dans le paysage populaire égyptien, en particulier compte tenu de la densité de la population, de la conscience collective, de la proximité géographique et de l'interconnexion directe avec ce qui se passe à Ghaza. Les masses égyptiennes n'ont pas réussi à créer une quelconque pression ou menace pour, par exemple, ouvrir le passage de Rafah et soulager la souffrance des blessés et des victimes.
Quant aux élites égyptiennes, de toutes affiliations, qu'elles soient liées organiquement au régime ou relativement indépendantes, elles ont également échoué à fournir une quelconque forme de soutien réel aux assiégés en créant des outils de mobilisation collective à travers les syndicats, les associations, les partis ou les sociétés.
Cette situation est une autre manifestation naturelle de la domination politique, militaire et sécuritaire du régime au pouvoir après le renversement du pouvoir légitime et la prise en main de la société et de ses élites. La soumission des élites arabes au régime politique s'explique non seulement par la mainmise sécuritaire du régime, mais aussi par la fragmentation de ces élites, l'absence de projets et d'initiatives, et leur chute dans les pièges de leaderships et de dirigeants inefficaces ainsi que des intérêts personnels étroits, renforçant leur propension à la soumission et à l'échec.
La tragédie de Ghaza n'est qu'un écho des tragédies en Syrie, en Libye, au Soudan, au Yémen, en Irak et dans d'autres foyers enflammés, où la principale raison de leur éclatement réside dans la désintégration interne et la perte de toutes leurs capacités à résister et à éviter de sombrer dans la mort et ses causes. Bien que Ghaza soit une situation exceptionnelle, elle ne se détache pas du contexte arabe car elle porte les causes de sa tragédie à l'intérieur, que ce soit dans le contexte arabe ou palestinien.
Aujourd'hui, il est plus évident que jamais que nous sommes incapables d'empêcher dans le futur le renouvellement de ce qui se passe à Ghaza. Ce qui s'est passé là-bas a confirmé qu'il n'y a pas de moyen de se remettre de cette vulnérabilité à l'annihilation sans libérer l'intérieur arabe de son autorité, de ses élites et de la conscience de ses peuples. Sans atteindre les conditions de la récupération interne de la structure d'action arabe et la libération de l'homme de la répression du pouvoir et de la tromperie des élites, il restera ouvert à toutes les possibilités de chaos, de massacres et de violence.
La déclaration récente du ministre des Affaires étrangères de notre pays à la chaîne Al Jazeera : «L'Algérie s'oppose à la normalisation avec l'entité sioniste et refuse l'entrée de l'Autorité palestinienne à Ghaza à bord d'un char israélien.» Ce refus suggère l'existence d'un plan sioniste interne visant à imposer une domination coloniale renouvelée. Le refus et la condamnation d'ores et déjà de cette manœuvre par l'Algérie exprime clairement et ouvertement sa solidarité inébranlable avec le peuple palestinien. D'autre part, l'initiative de l'Algérie au sein du Conseil de sécurité, appelant à un cessez-le-feu immédiat et à la fourniture d'aide humanitaire, a suscité une vive réaction des États-Unis. Cet épisode révèle clairement la sincérité de notre diplomatie ainsi que la solidarité historique et profonde envers le peuple palestinien.
par Mustapha Aggou
Mercredi 14 février 2024
https://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5327516
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Rédigé le 14/02/2024 à 10:13 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
«Expulsez-les ! », disait Ben Gourion à Rabin en 1948 et le 6 octobre 2023, l'injonction s'accomplissait sous une forme plus maligne, puisque le sionisme était sur le point d'effacer la cause palestinienne. Le jour d'après, la Résistance menée par Hamas la revivifie dans le monde. Trois mois plus tard, des hommes de loi engagés dans la lutte pour les libertés, et à leur tête le jeune ministre de l'Afrique du Sud, adossés à la solidarité des peuples, lui ouvre la Cour internationale de justice pour accuser Israël de génocide. Là, Netanyahou trouve que le monde tourne à l'envers. C'est l'entame du jour d'après.
Depuis 125 jours, le Capital bombarde Ghaza, pour les raisons que tout le monde connaît, et aujourd'hui il parle du jour d'après. C'est sa façon de nier l'échec de son gendarme au Moyen-Orient face à la résistance palestinienne et faire oublier les autres, à commencer par la plus récente, la trêve et sa négociation avec Hamas. Toutes les autorités occidentales ont qualifié la mort des colons en Israël, le 7 octobre, de terrorisme, tout en transformant cet évènement tragique en une opportunité pour tourner le dos à l'Ukraine comme si les « terroristes » du Hamas les avaient secourus en les délivrant des mains de la Russie. Ces dernières semaines les Occidentaux reviennent cahin-caha de cette ingratitude et de ce racisme qu'ils héritent de leur longue période coloniale, entamée depuis le XVe siècle par le génocide des Amérindiens.
Le pouvoir étasunien, boosté par le pétrodollar, est à la fois, selon l'opportunité, allié aux juifs, aux chrétiens et aux musulmans, tout en empruntant à l'empire romains sa devise, diviser pour régner. Il ne cesse de provoquer l'autre, ce non allié, ce non aligné, cet étranger, ce russe, cet arabe, ce noir, ce juif, ce musulman, pour avoir l'occasion de le déposséder de sa terre natale, de sa richesse naturelle, ou de l'abattre. Aujourd'hui le sionisme, cet avatar du colonialisme de peuplement, de l'apartheid, du national-socialisme et du national-religieux est en échec comme il est arrivé maintes fois à ses prédécesseurs. N'étant plus capable de tuer tout le monde, les pouvoirs israélien et étasunien optent pour la deuxième méthode du génocide qui consiste à priver d'eau, de nourriture et de soins la population ghazaouie, pour l'affamer, tout en la bombardant.
La résistance reprend de dessus à l'image du monde qui retrouve, grâce à son retour sur le terrain de la lutte armée, la solidarité des peuples, en sus des manifestations, celle d'user du droit international qui condamne le génocide et de la loi universelle qui donne droit à l'autodétermination des peuples colonisés, votée le 14 décembre 1960 à l'ONU. Pourquoi le sioniste qui prétend lutter pour son indépendance ne revendique t-il pas l'application de cette loi ? Est-ce parce qu'elle lui rappelle les manifestations du peuple algérien et le sort des colons pieds-noirs ? Le gouvernement de Netanyahou paraît comme un avatar de l'OAS. C'est à croire que la colonisation de peuplement accouche forcément d'un monstre avant sa défaite.
Il faut rappeler que le moyen le plus sûr dans la lutte de libération est la lutte armée que la victoire du Capital sur l'URSS a fini par faire oublier à Arafat qui depuis l'a abandonnée pour emprunter avec l'aide des Etats du Golfe le chemin de la paix avec le sionisme. Le leader de l'OLP avait fini par ne plus croire que la victoire est au bout du fusil, et que la libération de la terre natale, celle des ancêtres, est au-dessus de tout clivage politique et religieux. Il n'y a que l'ennemi de l'autodétermination des peuples qui prétend le contraire
Le 10 octobre, des étudiants de Harvard avaient pris position contre le génocide des palestiniens. Quelques jours plus tard ils ont été accusés de complicité avec le terrorisme.
Le 26 novembre, Mary Lawlor, la rapporteuse spéciale des Nations Unies, des droits de l'homme, après une visite de dix jours, fait 10 recommandations à l'Algérie. La question est : pourquoi Blinken ne les prend-il pas en compte, avant de nous menacer de sa nouvelle arme, celle de sa « liberté de culte » ? Une liberté qui aux mains de M. Blinken et ses acolytes est de nier toutes les autres pour nous mettre une épine sous le pied, pour avoir initié le projet de traîner son gendarme au Moyen-Orient à la CPI.
Pour faire taire un tel perturbateur, ce secrétaire aux Affaires étrangères fourbit une arme pour réoxygéner les islamophobes occidentaux et sa 5e colonne dans le monde musulman, à astreindre l'autre à la liberté de culte. A ce stade du Capital, l'intérêt des pouvoirs occidentaux s'aligne sur ceux des islamistes, des juifs, des chrétiens, des rois et avec tout celui qui est contre la citoyenneté, et qui leur permet de légaliser démocratiquement les inégalités et l'exploitation. Le souci des étatsuniens est d'étouffer toutes les libertés qui mettent en péril leur empire dont la stratégie est de donner raison exclusivement aux extrémistes. Là c'est la liberté des riches de s'enrichir par tous les moyens y compris par le vol, le pillage et la guerre, et la liberté de culte pour tous les autres. Cette stratégie a permis au Capital d'allier l'extrême droite à l'antisémite, le bourreau à sa victime.
L'antisémitisme comme le colonialisme ont en commun le racisme qui neutralise jusqu'aux talentueux intellectuels français. Dans les débats télévisés ces derniers sont terrorisés au point de ne pouvoir parler de la guerre en Palestine. Ils en font allusion sans pouvoir prononcer ne serait-ce que le nom de Ghaza, alors que si le cœur y est, la gorge est sèche, par la crainte d'entamer l'actualité qui contredirait le récit juif qui formate le sionisme dans leurs médias.
Le choc que subissent les habitants de Tel-Aviv, groggy depuis le 7 octobre à ce jour, découle de l'image qu'ils avaient de leur armée et ses services de sécurité, en l'absence de la lutte due aux divisions dans les rangs de la Résistance minée par l'illusion de la paix des braves en sus de l'accord d'Abraham, initié par Trump le républicain et que Biden le démocrate poursuit. Le Capital a fait croire que le sort des Palestiniens était scellé et qu'il est aux mains du sionisme et de ses larbins, les royaumes et les émirats arabes.
En Occident et particulièrement chez les étatsuniens règnent la phobie de la pauvreté. Cette dernière est le revers de leur médaille. Pour l'oblitérer, le Capital se sert entre autres du fascisme, de l'islamophobie, de l'écologie, du communautarisme LGBT, etc. M. Blinken et son ambassadeur au culte devraient s'occuper de leurs pauvres et non du culte des autres, surtout quand on s'adresse à un pays qui améliore la vie de ses citoyens, de moyens dont l'enseignement gratuit ouvre la perspective d'élargir leurs libertés et où les jeunes chômeurs ont une allocation qui les protège des circuits de commerce où le gain facile n'a pas de limite comme le domaine de la drogue, de la prostitution où règne de roi de l'Ouest, cet archi milliardaire du phosphate marocain et sahraoui.
Les voyages de Blinken au Moyen-Orient apparaissent comme de la poudre de perlimpinpin. Son véritable trajet pour arrêter des bombardements de Ghaza serait celui d'aller à la Maison Blanche dire à son Président Biden d'arrêter de vendre les armes à Israël ou encore de lui dire de stopper les milliards de dollars d'aide à cet État terroriste. En réalité, M. Blinken veut s'assurer que les royaumes arabes partagent les objectifs d'Israël jusqu'à financer la reconstruction de ce qu'Israël a détruit.
La réussite de l'Afrique du Sud à traîner Israël à la Cour internationale de justice le 11 du mois en cours, nous ramène au rapport de force mondial en faveur de la liberté des peuples des années 60, la période du Mouvement de libération national, le MLN. Comment consolider cet acquis, pour que le Capital ne reprenne pas la main, est l'affaire de tout le monde épris de liberté, de toutes les libertés
par Saadeddine Kouidri
Mercredi 14 février 2024
https://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5327518
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Rédigé le 14/02/2024 à 09:49 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Si beaucoup de Gazaouis se sont transformés en journalistes reporters d’image pour documenter le massacre en cours, les vidéos ne manquent pas du côté des militaires israéliens, qui eux filment leurs exactions, brandissent leurs forfaits, avec la complicité de leur hiérarchie.
https://orientxxi.info/IMG/logo/soldats-couv_copy.jpg?1707837301
Dans toutes les guerres, des militaires exhibent les ennemis tués ou torturés comme autant de preuves de leur supériorité. Chacun se souvient de cette soldate américaine tenant en laisse un prisonnier dans la prison d’Abou Ghraib en Irak. Mais, jusqu’alors ce type d’images était réservé à un cercle restreint et n’arrivait au grand public que grâce à d’autres soldats indignés.
Avec les réseaux sociaux et en raison de la nature même de la guerre d’Israël contre les Palestiniens de Gaza, les bombardements, les destructions, les humiliations, sont mis en scène par des soldats, et les images partagées avec la population. Il n’y a plus d’hommes, de femmes ou d’enfants, mais des « ennemis » à abattre, des « choses » à faire disparaître. Voici quelques exemples parmi les très nombreuses vidéos publiées sur X (ex-Twitter), Instagram, TikTok etc. adressées au grand public israélien que nous avons pu visionner, vérifier, sélectionner. Et faire commenter.
Ce qui frappe en tout premier lieu c’est le nombre de photos et de vidéos venant de militaires heureux, hilares même, totalement inconscients de leurs propres crimes, tel un couple de soldats se demandant en mariage dans une école fraîchement bombardée au nord de Gaza. Ou ce militaire qui célèbre ses fiançailles avec ses camarades, comptant à rebours jusqu’à l’explosion d’une bombe dans un immeuble civil juste derrière lui.
On pourrait citer aussi ce militaire s’amusant avec des affaires abandonnées d’enfants gazaouis1, ces soldats forçant un coffre-fort dans une maison, et chantant au milieu des ruines en exhibant le rouleau de la Torah, ou encore cette scène invraisemblable à Jénine, en Cisjordanie, où des guerriers au repos fument la chicha, mangent des chips ou l’équivalent, se sentent à l’aise dans la maison de Palestiniens qui apparaissent les yeux bandés et les mains menottées en arrière-plan – le tout dans une atmosphère décalée qui siérait à un groupe de copains revenant de ballade.
Toujours à Jénine, on voit un soldat chanter des prières juives au minbar d’une mosquée (là où se tient l’imam pour le prêche du vendredi). Ici, un autre militaire se vante d’avoir détruit les bâtiments de l’université Al-Azhar dans la ville de Gaza. Là, deux soldats fument une cigarette pendant la destruction d’un bloc entier d’habitations civiles. Il y a aussi cette vidéo montrant deux soldats devant un camion d’aides alimentaires destinées aux civils gazaouis, avec ce commentaire de l’un, tout sourire : « C’est le deuxième jour d’Hanouka [la fête juive des lumières] (...) que tout le monde passe de joyeuses fêtes », avant de mettre le feu aux provisions.
On pourrait être surpris de voir ces images si ardemment publiées, tant elles peignent un tableau peu glorieux de l’armée qui aime à se présenter comme « la plus morale du monde ». Mais au final, il s’agit de présenter la participation à l’écrasement d’un peuple et à l’anéantissement de toute forme d’infrastructure dans l’enclave comme un divertissement. La banalité des crimes de guerre !
Un deuxième type de publications relève de la mise en scène minutieuse. Ces petits films, de courte durée, scénarisés, soigneusement écrits, montrent par exemple des soldats face caméra préparer des lance-missiles, installer des bombes pour détruire des structures civiles à Gaza sur fond de musique entraînante - mimant des tutoriels et adoptant le langage visuel des vidéos TikTok - et se féliciter de chaque explosion. D’autres s’amusent dans une maison vidée de ses habitants avant d’y mettre le feu, et finissent leur « sketch » par un « restez connectés [pour de prochaines vidéos] ».
Le dernier chic pour les militaires israéliens est de signer avec des messages plus ou moins guerriers un obus. Un geste repris par le président israélien Yitzhak Herzog lui-même, le 25 décembre 2023, lors d’une visite sur le terrain. À la demande, on peut faire dédicacer une frappe de missile à un être cher à son cœur, comme on le ferait d’une chanson à la radio. Ou, comme cette influenceuse, inscrire des messages sur les obus puis accompagner les soldats pendant qu’ils les tirent sur Gaza.
Car ce tableau serait incomplet s’il ne donnait pas à voir le rôle des influenceuses et influenceurs professionnels, dont les comptes sur les réseaux sociaux étaient déjà suivis par des millions de « followers » avant le 7 octobre. Parmi eux, le blogueur-soldat Guy Hochman que l’on peut voir, par exemple, faire un tour dans une maison gazaouie détruite, comme s’il visitait une location sur Airbnb. Sur un ton extrêmement moqueur, il pointe tour à tour le toit en lambeaux, le sol jonché de débris et de sable, les murs tagués de messages anti-palestiniens : « Tout ce séjour est gratuit en utilisant le code ‘FREE PALESTINE’ pour réserver vos vacances », ajoute-il avant d’aller se baigner dans la mer de Gaza. « Ce sable, il est à nous. Cette mer, elle est à nous », martèle-t-il dans une autre vidéo toujours filmée à Gaza où le ton est, là, au premier degré.
On peut également suivre cet influenceur populaire, Shita Hakdosha, qui fait des vidéos en anglais, invitant à « profiter » d’un coucher de soleil et d’une glace devant les bombardements à Khan Younès, en compagnie de soldats en jeep. Si l’on en croit ses publications les plus récentes, il se serait enrôlé dans l’armée de terre déployée dans Gaza.
Tout comme la réserviste Natalia Fadeev, créatrice de contenu « confirmée » sur TikTok et Instagram, qui se présente elle aussi dans sa biographie comme « réserviste de l’armée de défense israélienne ». Cette fan de cosplay2 titre toutes ses stories à la une avec le mot « war » (guerre) et les illustre d’un personnage de manga en tenue militaire israélienne. Si elle ne se filme pas en train de commettre des exactions, ses publications visent plutôt à donner une image « sexy » d’Israël, de son armée et de la guerre génocidaire contre Gaza. Sans surprise, la presse conservatrice israélienne glorifie souvent ces soldats et les présente comme des héros de guerre3, notamment en les invitant sur les plateaux télé et en leur donnant la parole.
En dehors des cercles médiatiques israéliens, on peut trouver sur les réseaux sociaux des vidéos de personnalités tournées vers un public international, tel que l’influenceur proche de Benyamin Netanyahu, Hananya Naftali, ou le journaliste arabophone Edy Cohen.
« Je n’ai pas été surpris que cela émerge du traumatisme du 7 octobre, commente le militant israélien contre l’occupation aujourd’hui installé en Allemagne Nimrod Flaschenberg. Il y a eu un processus rapide de légitimation de l’agressivité et du racisme. C’est ce qui a causé cette atmosphère et a permis aux artistes et aux politiciens de s’exprimer librement dans un langage génocidaire ».
Cette plongée dans la guerre représentée par les guerriers eux-mêmes met à nu ce que le professeur en sociologie politique Yagil Levy nomme la « déshumanisation par mépris » - soit la déshumanisation « passive » par mépris qui s’est installée chez une grande partie de la société israélienne, parallèlement au modèle de déshumanisation « active » vis-à-vis de l’ennemi à éradiquer. Un exemple en est donné par les vidéos qui ont défilé pendant des mois d’Israéliens grimés en Palestiniens, un Minstrel show4 contemporain se moquant cruellement d’un massacre à quelques kilomètres d’eux.
« Ce qui est troublant, poursuit Nimrod Flaschenberg, c’est qu’ils se filment en train de célébrer le bombardement des universités et des maisons à Gaza. C’est fou le degré de joie et de fierté que ces soldats éprouvent à raser un pays et sa population. Cette déshumanisation est si gangrenée qu’ils ne pensent pas faire quelque chose de mal. » Encore ne voit-on que l’écume, car « l’armée censure et monitore les images qui filtrent du front ». En fait, assure-t-il :
Dans le psychisme israélien, les Gazaouis n’existent pas. Ce qui arrive aux civils à Gaza n’est pas montré. Seul le Hamas existe, et il est responsable des pertes civiles. En Israël, les gens ordinaires qui ne veulent pas que l’occupation continue, ne sont pas conscients des souffrances causées par les bombardements. La conversation se déroule uniquement dans le confort intra-israélien : « Allons-nous ramener les otages ? Allons-nous mettre fin au règne du Hamas ? » Les Gazaouis ne sont nulle part dans l’équation…
Mais ces images largement diffusées posent une autre question, plus franco-française celle-là. Pourquoi n’en entend-on presque jamais parler en France, alors qu’elles sont accessibles à tous en Israël, et que des journalistes vivant dans la bande de Gaza – ou plutôt survivant quand ils ne sont pas tirés comme des lapins par l’armée israélienne – ont très largement documenté des faits semblables ? Pourquoi les journalistes n’utilisent pas ces données qui circulent en toute liberté sur les réseaux sociaux et dans les médias israéliens, alors que le gouvernement israélien leur interdit l’accès à l’enclave sauf s’ils sont « accompagnés » par l’armée et baladés dans les circuits adéquats ?
Au moins 4 000 Français et Franco-israéliens combattent aux côtés des forces israéliennes, rapportait déjà Europe 1 en octobre 20235. Le député de la France insoumise Thomas Portes a réclamé en décembre 2023 qu’ils soient poursuivis en justice pour participation à des crimes de guerre. Deux combattants français cagoulés, en tenue militaire et portant des obus, lui ont adressé depuis Gaza un message vidéo : « Merci pour votre soutien, joyeux noël khouya [mon frère, en arabe] ».
Au moins deux Français combattant à Gaza figurent dans des vidéos qui pourraient servir de preuve de participation à des crimes de guerre, dont un Franco-israélien de Nice qui a participé à l’enlèvement et à la torture d’ouvriers gazaouis au mois d’octobre. Confronté par plusieurs internautes sur X (ex-Twitter), il a verrouillé ses comptes sur les réseaux sociaux, affirmant qu’il n’a fait que relayer les vidéos d’autres soldats, sans participer lui-même aux actes de torture.
C’est principalement sur ces vidéos et sur les faits documentés par l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) que les représentants de l’Afrique du Sud ont appuyé leur plainte à la Cour de justice internationale (CIJ), déposée le 29 décembre 2023, montrant qu’il s’agit « du premier génocide diffusé en direct ».
Malgré les campagnes de signalement dont font l’objet ces vidéos, elles continuent d’être visibles en ligne, alors que les contenus relatant ce qui se passe à Gaza sont régulièrement censurés. L’ONG 7amleh (pour « hamleh », « campagne » en arabe), qui milite pour les droits numériques palestiniens, a interpellé le 7 février 2024 plusieurs plateformes qui hébergent toujours ce type de contenu, dont Meta (Facebook, Instagram et Whatsapp), X (ex-Twitter), Telegram et TikTok. L’organisation signale la prolifération des discours de haine, de déshumanisation et d’incitation à la violence et au génocide contre les Palestiniens. Elle rappelle que l’ordonnance de la CIJ nécessite que les plateformes assument leur responsabilité juridique et morale en matière de respect des droits humains et de prévention de la diffusion de contenus compromettants. Elle rappelle aussi que ces plateformes ont attisé par le passé des discours favorables au génocide en permettant leur diffusion en ligne, notamment en Éthiopie et au Myanmar.
Depuis le 7 octobre, 7amleh compte près de trois millions de contenus haineux ou incitant à la haine des Palestiniens en ligne, contre au moins 4 400 cas de censure côté palestinien, considérés par l’ONG Human Rights Watch comme « systémique ». De son côté, Meta prévoit uniquement de revisiter ses règles en estimant désormais que l’usage des termes « sioniste » et « sionisme » relève du discours haineux à l’encontre de personnes juives ou israéliennes.
FATMA BEN HAMAD
Journaliste couvrant l’actualité notamment par le prisme des réseaux sociaux
https://orientxxi.info/magazine/a-gaza-les-soldats-israeliens-mettent-en-scene-leurs-crimes-en-video,7062
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Rédigé le 14/02/2024 à 07:44 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Par Saadeddine Kouidri
Mardi 13 février 2024
https://www.lequotidien-oran.com/?news=5327059
Rédigé le 13/02/2024 à 21:25 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Le 4 février une délégation de 22 députés français s'est rendue à Rafah. Et de là, de cet endroit, à la porte de Gaza, ils ont lancé un appel solennel au cessez-le-feu et à la fin du génocide.(*)
Cette délégation est conduite par Éric Coquerel, député de «la France insoumise». Elle est composée de députés de ce parti ainsi que de députés de divers autres partis de la gauche française.
Honneur à eux!
Honneur à vous, Éric Coquerel, Thomas Portes, Alma Dufour, Sébastien Déloque, et Ersilia Soudais de la «France Insoumise», honneur à Sabrine Sebaihi (écologiste), à Anna Pic (socialiste), Soumya Burouaha (communiste). Il faudrait tous vous citer , hommes et femmes de bonne volonté, pour que vos noms soient inscrits au fronton de la mémoire humaine.
Honneur à vous! Vous n'avez pas voulu vous arrêtez à des dénonciations verbales. Vous vous êtes demandés ce que vous pourriez faire de plus. Là où il y a une volonté, il y a toujours une voie. Vous êtes allés aux portes mêmes de Gaza, à Rafah, dénoncer le colonialisme israélien et le génocide qu'il est en train de commettre? Vous vous êtes portés au secours de Gaza. Vous avez agi. Vous avez donné l'exemple.
Honneur à vous! Vous êtes allés aux portes de Gaza ceints du drapeau de votre pays. Vous avez montré qu'il y a une autre France que celle qui justifie les actes d'Israël. Vous avez dit que vous aviez une autre conception de son honneur.
Honneur à vous. Dans ce monde que veulent imposer les maitres actuels de l'Occident où ils donnent Israël en exemple, où les valeurs humaines sont écrasées au nom des «valeurs occidentales», vous avez dit non à ce discours.
Honneur à vous. Votre action a une signification immense. Contre le projet des dirigeants de l'Occident d'isoler, de séparer les peuples occidentaux du reste du monde, vous avez témoigné que la cause de Gaza, la cause palestinienne étaient universelles, vous avez exprimé l'unité de l'humanité.
Merci à vous. Dans ces jours d'une tuerie qui parait sans fin, vous avez apporté aux gens de Gaza, au peuple palestinien, à nous tous, du baume au cœur, du réconfort à un moment où il le fallait, à un moment où on pouvait parfois douter de l'utilité de tant de sacrifices. Vous êtes apparus, ce jour du 4 février, sur nos écrans, devant la porte de Gaza. Nous n'en avons pas cru nos yeux. Vous étiez devant Gaza. C'était donc possible. Les médias occidentaux officiels et officieux qui ont transmis quelques minutes ces images, les ont vite arrêtées. Ils avaient compris le danger. Ils en avaient compris la signification Vous avez apporté votre solidarité au peuple palestinien de Gaza au nez et à la barbe de ses bourreaux. Vous avez symboliquement, moralement, forcé la porte de Gaza. Vous avez remporté, pour tous, une grande victoire.
(*)
https://www.youtube.com/watch?v=zXgp5p8ya3k
https://twitter.com/i/status/1754
par Djamel Labidi
Mardi 13 février 2024
https://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5327517
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Rédigé le 13/02/2024 à 20:53 dans Israël, Paléstine, Plastique | Lien permanent | Commentaires (0)
© AFP PHOTO / FAMILY HANDOUTLe corps de Hind Rajab, une Palestinienne de 6 ans, a été retrouvé samedi, à Gaza.
« Hind et tous ceux qui se trouvaient dans la voiture ont été tués, a déclaré à l’AFP son grand-père, Baha Hamada. Ils ont été retrouvés par des membres de (notre) famille qui sont allés à la recherche de la voiture et l’ont trouvée près de la station-service. »« Pendant plus de trois heures, la fillette a désespérément imploré nos équipes de venir la sauver de ces chars (israéliens) qui l’entouraient, subissant les tirs et l’horreur d’être seule, prisonnière, au milieu des corps de ses proches tués par les forces israéliennes », a relaté le Croissant-Rouge palestinien (PRCS). Son grand-père est le dernier à avoir entendu le son de sa voix, lors d’un échange téléphonique. « Elle était terrifiée et elle était blessée au dos, à la main et au pied », avait-il raconté à l’AFP.pour cibleInterviewée par l’AFP, la mère de Hind, Wissam Hamada, a dénoncé « les mécréants Netanyahou, Biden et tous ceux qui ont conspiré contre Gaza et sa population », disant vouloir les interroger « devant Dieu sur ce jour où (s) a fille a lancé des appels à l’aide (…) sans que personne ne vienne à son secours ». Le Hamas a appelé « les institutions des droits de l’homme et les Nations unies à une enquête sur ce crime odieux ».C’est un fait dramatique établi par les statistiques : les enfants sont les plus massivement touchés lors de tous les conflits depuis la Seconde Guerre mondiale. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou le sait parfaitement : ils ne sont donc pas des victimes « collatérales » mais
http://www.micheldandelot1.com/hind-rajab-morte-a-6-ans-une-tragedie-ordinaire-de-la-guerre-a-gaza-a215403811
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Rédigé le 13/02/2024 à 15:08 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Un cimetière de Gaza profané (photo ajouté par Michel Dandelot) en provenance du site Courrier International
Israël commet des crimes odieux à Gaza depuis le début de la guerre actuelle. Parmi ces crimes, il y a l’invasion des cimetières et la profanation des tombes.
À un moment où Israël avait imposé une coupure d’Internet et des communications, son armée a récemment conduit des chars dans la zone à l’ouest de Khan Younis, au sud de Gaza.
Le complexe médical Nasser est situé dans cette zone. Beaucoup de mes proches sont enterrés dans un cimetière voisin.
Pendant la panne d’Internet, nous comptions sur la radio pour nous informer. C’est ainsi que nous avons été informés que l’armée israélienne avait creusé et rasé des tombes au bulldozer.
Quand ma mère a appris cette nouvelle, elle nous a rappelé que des membres de sa famille avaient été enterrés dans le cimetière en question.
Mon frère s’y est rendu et a vu qu’Israël avait détruit les tombes de mon grand-père et de ma grand-mère. Nous avons beaucoup pleuré quand nous avons appris cela.
Ragheb, mon grand-père, est mort il y a presque exactement deux ans. Il détestait beaucoup les guerres.
Chaque fois que nous subissions une attaque majeure, il essayait de nous dire que les jours difficiles passeraient. Il nous apporterait son soutien.
Malgré sa grande patience, les précédentes guerres d’Israël contre Gaza ont affecté sa santé mentale.
Pendant la guerre actuelle, j’ai dit à ma mère que mon grand-père aurait été extrêmement triste s’il était encore en vie et témoin des horreurs infligées à Gaza.
Les personnes âgées souffrent terriblement d’être déplacées et de la peur des bombardements.
Il est douloureux de voir la tombe d’un être cher détruite. On a l’impression qu’Israël efface tout ce qui concerne le peuple de Gaza.
La guerre contre les morts ?
S’agit-il maintenant d’une guerre contre les morts, ainsi que contre les vivants ?
Il n’y a pas de combattants dans les cimetières. Ou n’importe quelle personne vivante.
La perte de tombes ajoute au chagrin de Gaza.
L’Observatoire Euro-Med des Droits de l’Homme a accusé Israël de cibler la plupart des cimetières de Gaza.
Ces attaques violent le droit international, qui exige que les morts soient respectés en temps de guerre.
Khaled al-Sir, 55 ans, est un habitant de Khan Younis
Après une nuit de violence intense – principalement dirigée contre le complexe médical Nasser et ses environs – Israël a retiré ses chars de la zone attaquée. Dans la matinée, al-Sir est allé vérifier l’état d’un cimetière local.
« Nous avons constaté que les tombes avaient été détruites », a-t-il dit. « Certains d’entre eux n’avaient plus de corps à l’intérieur. L’armée israélienne les avait volés.
« J’ai vu un jeune homme pleurer à côté du cimetière parce qu’il n’arrivait pas à trouver la tombe de sa mère », a ajouté al-Sir.
« Il a dit qu’il avait l’habitude de venir visiter sa tombe tous les jours et de lui raconter sa journée, ce qui le rendait heureux et ce qui l’attristait. Cela soulagea son chagrin pour elle. Comment peut-il se rendre sur sa tombe maintenant qu’elle n’en a pas ?
Raeda Salama, 35 ans, a été choquée d’apprendre que la tombe de son père avait été attaquée.
« Ma mère a beaucoup pleuré quand elle a appris que la tombe de mon père avait été détruite », a déclaré Salama. « C’était comme s’il était mort à nouveau. »
« Elle avait l’habitude d’aller lui rendre visite tous les mois, de lui faire des bonbons et de les distribuer aux gens du cimetière, en leur demandant de prier auprès de mon père. En détruisant sa tombe, l’occupation israélienne lui interdit désormais de lui rendre visite.
http://www.micheldandelot1.com/israel-a-profane-la-tombe-de-mon-grand-pere-a215405263
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Rédigé le 13/02/2024 à 13:53 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Dans le cimetière à ciel ouvert qu’est devenue la bande de Gaza, reposent les âmes de plusieurs dizaines de journalistes, tués en bravant le blocus médiatique imposé par Israël depuis le 7 octobre 2023. On sait peu de choses d’eux, à part leur nombre et leur attachement inébranlable à leur mission d’information. En rassemblant des fragments de vie, Mediapart a tenté de reconstituer leurs histoires. Afin que l’on se souvienne d’eux, pas seulement par leur nombre, mais aussi par leur nom, leur visage, leur destin.
Par Yunnes Abzouz, Rachida
El Azzouzi, Donatien Huet, Prisciana Le Meur, Jean-Claude Simpson et Simon Toup
11 février 2024
cCLIQUEZ SUR CHAQUE NOM POUR AVOIR PLUS DE DÉTAILS SUR LE JOURNALISTE EN QUESTION.
Dans le cimetière à ciel ouvert qu’est devenue la bande de Gaza, reposent les âmes de plusieurs dizaines de journalistes, tués en bravant le blocus médiatique imposé par Israël depuis le 7 octobre 2023. On sait peu de choses d’eux, à part leur nombre et leur attachement inébranlable à leur mission d’information. En rassemblant des fragments de vie, Mediapart a tenté de reconstituer leurs histoires. Afin que l’on se souvienne d’eux, pas seulement par leur nombre, mais aussi par leur nom, leur visage, leur destin.
Par Yunnes Abzouz, Rachida El Azzouzi, Donatien Huet, Prisciana Le Meur, Jean-Claude Simpson et Simon Toupet
11 février 2024
Après la mort de son frère dans un bombardement visant sa maison familiale au nord de la bande de Gaza, Muhammad Abdelfattah Atallah avait décidé de faire une pause et de rejoindre un endroit plus sûr, ne désespérant pas de reprendre son activité de journaliste lorsque le feu de l’aviation israélienne aurait baissé d’intensité. Il a été tué le 29 janvier 2024 par un raid israélien sur le camp de réfugié·es d’Al-Shati, où il avait fui les bombardements aux côtés de plusieurs membres de sa famille, aussi tués par la frappe.
Âgé de 24 ans, Muhammad travaillait comme rédacteur pour le site d’information Al-Resalah. Il écrivait aussi pour le site Raseef22. « Il s’intéressait particulièrement aux récits de vie quotidienne des Gazaouis, malgré le blocus, la corruption et les intérêts politiques contraires dans l’enclave », raconte Ayman Sharrouf, rédacteur en chef de Raseef22.
Il souhaitait servir d’amplificateur aux voix palestiniennes étouffées et ignorées, et voulait montrer qu’en dépit des montagnes de difficultés quotidiennes, Gaza était pleine de vie et d’espoir. « Malheureusement, il a été tué avant d’être devenu le journaliste qu’il rêvait d’être ; et le plus horrible, c’est qu’il pensait survivre », déplore Ayman Sharrouf auprès du Comité pour la protection des journalistes.
Animateur pour la radio Al-Aqsa Voice, affiliée au Hamas, Iyad el-Ruwagh a été tué le 25 janvier 2024 par une frappe sur le camp de Nuseirat, dans le nord de Gaza, avec quatre de ses enfants : Loay, Nada, Yazan et Ahmed. Il avait publié sur Facebook plusieurs articles sur l’enfer dans lequel se trouvait sa famille. À une personne qui quittait l’enclave, il avait demandé de sauver le plus jeune de ses enfants en le portant auprès de leur mère, sa femme, réfugiée dans le Sinaï, en Égypte, avec leur cinquième, Mohamed, grièvement blessé par un précédent bombardement. Inconsolable, celle-ci a publié sur Facebook plusieurs textes sur son bien-aimé et leurs enfants assassinés.
Yazan al-Zuweidi est mort le 14 janvier 2024 avec son frère et son cousin, tués par une frappe sur Beit Hanoun, ville du nord de Gaza défigurée par la guerre. Il se dirigeait vers sa maison afin de voir ce qu’il en restait quand il a été foudroyé. Journaliste et caméraman, il travaillait depuis six ans pour la chaîne arabe privée Al-Ghad, basée au Caire, en Égypte. Malgré le déluge de feu, il n’a jamais cessé le journalisme. Il a filmé inlassablement le massacre, la dévastation, sans jamais fuir vers le sud. Il avait 27 ans.
Mohamed Jamal Sobhi al-Thalathini travaillait pour la chaîne de télévision Al-Quds Al-Youm, affiliée au Hamas. Il est mort le 11 janvier 2024 chez lui, dans le sud de Gaza, sous les bombes israéliennes. Dévasté, un de ses anciens professeurs a salué la mémoire d’un « étudiant brillant ».
Ahmed Bdeir avait deux passions : le journalisme et le théâtre. Marié, père d’un enfant, il écrivait pour le journal en ligne Al-Hadaf, affilié au Front populaire de libération de la Palestine, ainsi que pour plusieurs autres médias palestiniens, avec un penchant pour la politique, la littérature, les arts.
Ses collègues célèbrent un journaliste profondément engagé, documentant les crimes de l’occupation. Il avait commencé par vendre des journaux pour subvenir aux besoins de sa famille et de son père malade. Il est mort le 10 janvier 2024, touché par un obus à Khan Younès, près de l’hôpital Al-Aqsa.
Reporter caméraman pour Al Jazeera, et fils du journaliste vedette Wael al-Dahdouh, chef du bureau d’Al Jazeera à Gaza, Hamza al-Dahdouh a été tué le 7 janvier 2024 par un missile israélien. Son collègue Mustafa Thuraya, vidéaste pigiste pour la chaîne qatarie mais aussi pour l’Agence France-Presse (AFP) et d’autres médias internationaux, a également perdu la vie. Ils ont été tués alors qu’ils roulaient en voiture, près de Rafah, au sud de l’enclave. Un troisième journaliste qui voyageait avec eux, Hazem Rajab, a été grièvement blessé.
Vêtu de son gilet presse, son père, Wael al-Dahdouh, qui avait déjà perdu le 28 octobre 2023 son épouse et deux autres de ses enfants lors d’une frappe israélienne sur le camp de réfugié·es de Nuseirat, lui a rendu un vibrant hommage lors de ses obsèques : « Mon fils aîné était un homme bon, patient, généreux et attentionné. Il n’était pas une partie de moi, il était moi tout entier, l’âme de mon âme. »
Dans des images déchirantes, on voit sa sœur cadette supplier leur père : « S’il te plaît, reste avec nous, papa. Il ne nous reste plus personne d’autre que toi. » En quatre mois de guerre, la famille Al-Dahdouh a perdu plusieurs de ses membres. Comme son père, Hamza al-Dahdouh refusait de quitter l’enclave palestinienne.
« Nos larmes ne sont pas des larmes de défaite ou d’abandon, nous continuerons à faire notre travail de journaliste », a juré Wael al-Dahdouh. Célébré en héros du journalisme à travers le monde et devenu le porte-voix d’un peuple supplicié, il a depuis été évacué vers un hôpital du Qatar pour y être soigné après avoir été lui-même blessé. Al Jazeera accuse l’armée israélienne de « systématiquement cibler » ses équipes.
Vidéaste pigiste notamment pour l’AFP, Mustafa Thuraya a été tué le 7 janvier 2024 avec le journaliste d’Al Jazeera Hamza al-Dahdouh par un tir israélien sur leur voiture dans le sud de Gaza, alors qu’ils étaient en mission pour la chaîne qatarie et qu’ils recueillaient des témoignages de civils déplacés. L’armée israélienne a justifié son tir en accusant les deux trentenaires d’être des « agents terroristes » affiliés au Hamas et à son allié le Jihad islamique. Au départ, elle a assuré les avoir ciblés parce qu’ils auraient transporté un terroriste dans leur véhicule, puis a changé de version et affirmé qu’ils utilisaient un drone.
« Cibler des civils est illégal, dénonce le Comité pour la protection des journalistes, qui appelle à une enquête indépendante. Les journalistes utilisent des équipements comme des caméras et des drones pour leur travail. Cela n’en fait pas des terroristes et ne devrait certainement pas en faire des cibles. »
La mère de Mustafa a transporté le corps de son fils, enveloppé dans un linceul blanc, priant pour son salut : « Que Dieu l’accepte en martyr. »
Reporter et rédacteur pour l’agence de presse palestinienne Safa, Akram ElShafie est décédé le 5 janvier 2023 des suites de ses blessures. Fin octobre, il a été touché par des balles israéliennes alors qu’il était sur le terrain. Son entourage a tenté en vain de le faire évacuer de Gaza. La demande a été rejetée par l’État hébreu.
Pour son dernier reportage, le journaliste de 53 ans avait raconté la coopération et la solidarité des naufragé·es de la bande de Gaza, en dépit de la guerre.
Reporter pour la chaîne Al-Quds Al-Youm, affiliée au Hamas, Jabr Abu Hadrous a été tué le 29 décembre 2023 par une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugié·es de Nuseirat, au nord de Gaza. Il se trouvait chez lui avec sept membres de sa famille.
Lors de la veillée funèbre, ses proches et ses collègues ont brandi son corps sur un brancard avec son micro, son casque et son gilet pare-balles marqué « Press » (en anglais), avec un message à l’adresse du « monde silencieux ». « Tous les journalistes du monde sont protégés lorsqu’ils portent un gilet “Press”, sauf nous à Gaza. Ici, le gilet est un signal pour tuer les journalistes. »
Mohamed Khaireddine travaillait pour la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas. Il a été tué le 28 décembre 2023 sous le feu de l’aviation israélienne à Beit Lahia, au nord de Gaza. Il se trouvait chez lui avec une douzaine de membres de sa famille, dont le journaliste Ahmed Khaireddine.
Reporter caméraman pour les chaînes Al-Quds Al-Youm et Quds, affiliées au Hamas, Ahmed Khaireddine a été tué le 28 décembre 2023 lors d’un raid aérien israélien contre sa maison familiale à Beit Lahia, au nord de Gaza, avec douze membres de sa famille, dont le journaliste Mohamed Khaireddine. C’était le premier jour de repos qu’il s’accordait depuis le début de la guerre.
Dans un témoignage vidéo, son frère, Basil, journaliste pour la chaîne Palestine Today, raconte qu’Ahmed, comme tous les journalistes gazaouis, travaillait entre la vie et la mort, assistant à l’hécatombe de ses confrères. « Une dizaine de journalistes ont été tués cette semaine, mais ça ne nous découragera pas. Israël n’arrivera pas à nous anéantir, malgré la violence de ce qu’il nous fait endurer », a-t-il plaidé.
Photojournaliste pour le média Al-Rai, propriété du gouvernement du Hamas, Mohamed al-Iff a été tué le 24 décembre 2023, lors d’un bombardement sur la ville de Gaza, comme plusieurs membres de sa famille, dont son cousin Mohamed Azzaytouniyah, travaillant lui aussi pour Al-Rai.
Ingénieur du son pour la radio locale Al-Rai, propriété du gouvernement du Hamas, Mohamed Azzaytouniyah a été tué le 24 décembre 2023 lors des mêmes frappes qui ont coûté la vie à son cousin, Mohamed al-Iff, photojournaliste pour le même média.
Mohamed Khalifeh dirigeait la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas. Il est mort le 22 décembre 2023 sous les bombes israéliennes dans sa maison avec sa femme et trois de leurs enfants, dans le camp de réfugié·es de Nuseirat, dans le centre de Gaza.
Adel Zorob travaillait pour plusieurs médias, dont la radio Al-Aqsa Voice, affiliée au Hamas. Il a été tué le 19 décembre 2023 par une frappe contre son domicile à Rafah, dans le sud de Gaza, avec 25 membres de sa famille.
Adel Zorob racontait aussi la guerre sur sa page Facebook et dans plusieurs groupes de discussion WhatsApp. Sa famille avait refusé de fuir les bombes d’Israël et d’être déplacée.
Dans une vidéo qui cumule plusieurs millions de vues, Adel Zorob porte dans ses bras et brandit le corps inanimé de son tout jeune petit-fils, tué dans un bombardement avec sa sœur et dix membres de sa famille. Il s’emporte, ivre de douleur : « Depuis le 7 octobre, le feu s’abat sur nous et nous comptons nos morts. Voilà à quoi ressemblent nos martyrs. Cet enfant venait tout juste d’avoir deux mois. »
« Si vous vivez dans un endroit sûr, vous êtes bénis de Dieu. N’oubliez pas de Le remercier », écrivait Abdallah Alwan début décembre. Il priait pour que ce soit son cas. Il est mort le 18 décembre 2023, foudroyé à son domicile par l’aviation israélienne à Jabalia.
Spécialiste de la voix off, il travaillait pour plusieurs médias, notamment la plateforme Midan appartenant à Al Jazeera. Il était aussi l’un des animateurs de la radio de l’université islamique. Le matin de son décès, il écrivait sur Facebook : « Chaque jour, nous pensons que la nuit qui vient de s’écouler a été la pire nuit de la guerre. Mais tous les jours sont pires les uns que les autres. » En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo d’Abdallah.
Reporter pour le site Palestine Now, dont il était l’un des piliers, Assem Kamal Moussa est mort le 17 décembre 2023 sous le feu de l’aviation israélienne à Khan Younès, dans le sud de Gaza. Célébré pour son professionnalisme et son humanité, il avait ouvert sa maison à ses collègues qui avaient fui le Nord.
Journaliste pour plusieurs médias, dont la télévision locale Al-Kofiya, affiliée au Fatah, et la chaîne privée locale Baladna TV, Haneen Kashtan a été tuée par une frappe sur le camp de réfugié·es de Nuseirat, dans le nord de Gaza. Elle est morte le 17 décembre 2023 au terme d’atroces souffrances qu’elle essayait de minimiser auprès des siens, de son fils tout particulièrement. Elle le rassurait de sa voix, approchant du trépas : « Bientôt, la guerre sera finie. Il n’y aura plus de bombes dans le ciel de la Palestine. »
Haneen Kashtan a essayé de tenir jusqu’à son dernier souffle. Elle disait dans un post désespéré quelques jours plus tôt sur Facebook sa peur de mourir déchiquetée par les bombes israéliennes.
Caméraman pour Al Jazeera, Samer Abu Daqqa a été tué le 15 décembre 2023 par un drone alors qu’il filmait les ravages de l’armée israélienne dans une école des Nations unies abritant des déplacé·es dans le centre de Khan Younès, dans le sud de Gaza. Coincé avec d’autres blessé·es dans cette école encerclée par les tanks et les snipers israéliens, il n’a pu être évacué et sauvé. Il est mort après avoir agonisé pendant plusieurs heures.
Son collègue, Wael al-Dahdouh, chef du bureau et icône d’Al Jazeera, qui a perdu son épouse, deux enfants et un petit-fils depuis le début de la guerre, a été blessé lors de la même frappe. Il a, lui, depuis, quitté l’enclave pour le Qatar, où il est toujours soigné.
Sur Al Jazeera mais aussi sur les réseaux sociaux, comme dans ce montage sur Instagram, les hommages à Samer Abu Daqqa pleuvent. Sa mère l’avait vu la veille de sa mort : « Il était venu me dire au revoir hier. Il était mort de faim. »
Journaliste freelance, notamment pour le site Eyes Media Network, Duaa Jabbour a été tuée le 9 décembre 2023 par une frappe de l’armée israélienne sur sa maison avec son mari et ses enfants à Khan Younès, dans le sud de Gaza. Dans sa dernière publication sur Facebook, elle écrivait : « Survivre au quotidien est épuisant. » En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Duaa.
Journaliste freelance pour des médias palestiniens et internationaux, dont l’agence de presse turque Anadolu, Ola Atallah a été tuée le 9 décembre 2023 par une frappe aérienne israélienne contre la maison où elle s’était réfugiée avec sa famille dans le quartier d’El-Daraj de Gaza City. Elle a été tuée avec neuf membres de sa famille, dont son frère et ses oncles.
Le 27 novembre 2023, elle décrivait dans le journal Al-Morasel l’enfer de la guerre à Gaza, les destructions, les traumatismes. Bien connue sur les réseaux sociaux, son dernier tweet du 8 décembre demandait : « Combien de nuits de terreur et de mort faudra-t-il encore compter à Gaza ? »
Hassan Farajallah, qui occupait un poste important au sein de la chaîne de télévision Al-Quds, affiliée au Hamas, a été tué le 3 décembre 2023 par un bombardement israélien dans la bande de Gaza alors qu’il était en train de publier un reportage sur YouTube. Il transmettait sa passion du journalisme à de nombreux étudiants et étudiantes qui pleurent aujourd’hui sa disparition.
On le voit aussi dans une publication Facebook prodiguer des conseils d’orientation aux élèves d’une école pour filles. L’une de ses anciennes élèves lui a rendu hommage : « Tu étais un ami, un professeur et un mentor. Tu nous as enseigné et nous avons beaucoup appris de toi. Le cours s’est terminé, mais la leçon n’a pas pris fin. »
Journaliste palestinienne du réseau Al-Majedat, Shaima al-Gazzar a été tuée le 3 décembre 2023 avec plusieurs membres de sa famille lors d’une frappe aérienne israélienne sur la ville de Rafah, dans le sud de Gaza. Elle passait son temps sur le terrain à documenter la lutte des Palestinien·nes pour survivre dans l’enclave écrasée par la pauvreté. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Shaima.
Caméraman palestinien pour la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas, Abdhallah Darwish a été tué le 1er décembre 2023 par une frappe aérienne israélienne dans la bande de Gaza.
Caméraman pour l’agence de presse Anadolu, Montaser al-Sawaf est mort le 1er décembre 2023 sous les bombes israéliennes avec son frère et d’autres membres de sa famille dans le quartier d’Ed-Durc, au sud de Gaza. Après avoir été gravement blessé, et agonisant, Montaser a attendu une ambulance une heure et demie avant d’être transporté à l’hôpital par un véhicule privé. Deux semaines plus tôt, le journaliste avait perdu sa femme, deux de leurs enfants et ses parents dans un bombardement sur leur domicile, dans Gaza City.
Journaliste indépendant et professeur de journalisme aux universités de Gaza et d’Al-Aqsa, Adham Hassouna a été tué le 1er décembre 2023, ainsi que plusieurs membres de sa famille, par une frappe aérienne israélienne dans Gaza City. Ses anciens élèves pleurent la disparition d’un homme qui leur a ouvert la voie du métier.
« Depuis mes débuts, tu as été une grande source de motivation pour tout ce que j’ai réalisé dans ma vie universitaire. Tu as cru en moi et mes capacités et tu m’as toujours dit que je deviendrais une grande journaliste », a décrit une de ses étudiantes.
Journaliste caméraman pour la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas, Mostafa Bakeer a été tué le 24 novembre 2023 par une frappe aérienne israélienne à Rafah, dans le sud de Gaza. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Mostafa.
Photojournaliste, Mohamed Mouin Ayyash a été tué le 23 novembre 2023 par une frappe israélienne sur son domicile dans le camp de réfugié·es de Nuseirat, dans le centre de Gaza. Fondateur et directeur de l’agence de presse Gaza Now, il couvrait le conflit depuis 2014. Son dernier message sur le réseau social X rapportait la mort de ses parents, de sa sœur, de ses deux frères et d’autres membres de sa famille pulvérisés par l’aviation israélienne. Ses amis pleurent « un homme et un journaliste de grande valeur, qui laisse derrière lui sa petite fille et sa femme ».
Journaliste pour la chaîne de télévision Al-Quds, affiliée au Hamas, Mohamed Nabil al-Zaq a été tué par un raid aérien israélien sur Shejaiya, dans le nord de Gaza, le 22 novembre 2023.
Journaliste libanaise, correspondante pour la chaîne Al Mayadeen, affiliée au Hezbollah, Farah Omar, 25 ans, a été tuée le 21 novembre 2023 par une frappe israélienne ainsi que son caméraman, également libanais, Rabih al-Maamari, 29 ans. Pour leur PDG, ils ont été « délibérément visés, ce n’était pas un hasard ». Ils réalisaient un reportage sur l’escalade des hostilités guerrières et assuraient un direct une heure avant leur mort.
Depuis Machghara, village de la plaine de la Bekaa d’où elle est originaire, son père a appelé « tous les journalistes à poursuivre leur travail et à transmettre la vérité sans craindre l’ennemi ». Sa mère a martelé que leur fille « avait combattu l’ennemi avec ses mots » : « Ils l’ont crainte et l’ont tuée. »
De son côté, l’armée israélienne a affirmé « être au courant d’accusations concernant des journalistes tués par des tirs des forces de défense israéliennes », ajoutant que les tirs ont eu lieu dans une zone de combat active. « Il est dangereux de se trouver dans cette zone », a encore commenté l’État hébreu.
Caméraman libanais pour la chaîne Al Mayadeen, affiliée au Hezbollah, Rabih al-Maamari, 29 ans, a été tué avec sa collègue Farah Omar, 25 ans, le 21 novembre 2023 par une frappe israélienne à la frontière entre le Liban et Israël. Pour leur PDG, ils ont été « délibérément visés, ce n’était pas un hasard ». Ils réalisaient un reportage sur l’escalade guerrière à la frontière libano-israélienne et assuraient un direct une heure avant leur mort.
Des centaines de proches et de collègues se sont recueillis au siège de leur média devant leurs cercueils, lors d’une procession funèbre publique.
Selon les éléments recueillis par les Observateurs de France 24, si les images de l’attaque suggèrent que les journalistes ne portaient pas leur gilet « Press » au moment où les avions israéliens les ont visés, la caméra en feu sur un trépied les identifiait clairement comme journalistes.
L’aviation israélienne a anéanti ses espérances et a fini par lui prendre la vie. La journaliste et créatrice de podcasts Ayat Khadoura a été tuée le 20 novembre 2023 par une frappe sur sa maison à Beit Lahia, dans le nord de Gaza.
Dans son dernier message au monde, publié sur son compte Instagram, elle confie les larmes aux yeux et la voix chevrotante : « Nous sommes des êtres humains, et comme tout être humain dans ce monde, nous avions de grands rêves. Mais aujourd’hui, nos rêves sont brisés. Comme dans un seul corps meurtri et mourant, nos rêves devaient relever le monde arabe. Mais malgré les images et les informations, rien ni personne n’arrête cette horrible guerre qui nous extermine. »
« Bilal Jadallah a aidé le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) à documenter le ciblage et l’assassinat systémique de journalistes par les Forces de défense israéliennes et il semble qu’il en ait été lui-même victime dimanche », a déclaré Sherif Mansour, coordinateur du programme du CPJ pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
Bilal Jadallah, directeur de la maison palestinienne de la presse, a été tué le 19 novembre 2023 dans l’explosion de sa voiture à Gaza, visée par une frappe de l’aviation israélienne. Le Syndicat des journalistes palestiniens estime que l’armée israélienne a délibérément tué Bilal et a demandé une enquête indépendante pour éclairer les circonstances de sa mort.
Le journaliste avait largement contribué avec le CPJ à démontrer que depuis vingt-deux ans, Israël tue régulièrement des journalistes à chaque éruption de violence dans la bande de Gaza et n’avait jamais eu à rendre de comptes pour cela.
Abdelhalim Awad, travailleur des médias et chauffeur pour la chaîne Al-Aqsa TV, affiliée au Hamas, a été tué le 18 novembre 2023 lors d’une attaque contre son domicile dans la bande de Gaza. Awad travaillait à plein temps depuis le début de la guerre à Khan Younès et était parti rendre visite à sa famille la semaine au cours de laquelle il a été tué.
Deux jours avant de périr dans le raid israélien visant le camp de réfugié·es de Bureij, le 18 novembre 2023, Sari Mansour n’avait plus aucun moyen de communiquer avec sa femme. Le réseau venait d’être coupé, et Sari était sur le terrain, avec son collègue Hassouneh Salim, tentant de raconter les destructions causées par les bombardements israéliens.
Le journaliste et directeur de l’agence de presse palestinienne Quds News prend alors un stylo et une feuille de papier et couche quelques mots à destination de sa femme : « C’est un moyen de communication ancien, mais c’est tout ce qu’il nous reste quand les SMS ne marchent plus », regrette-t-il dans une vidéo posthume.
« Je demande à Dieu qu’il me donne l’occasion de vivre pour te retrouver et de vivre encore beaucoup de moments heureux avec toi », écrit-il dans sa lettre. « Mais serais-je exaucé ? Je voudrais qu’on puisse revivre les moments de bonheur qu’on a connus », déclame Sari, espérant que sa femme saura trouver le moyen de consulter son message.
Son message est raturé. Il avait d’abord conjugué au futur mais s’est ensuite ravisé, ne misant pas trop sur l’avenir, qu’il sait menacé par le déluge de bombes s’abattant sur Gaza.
Sa femme l’imite et écrit à son tour une lettre, qu’elle espère lui faire parvenir. « Les enfants et moi t’attendons depuis ce matin, et tu n’es pas venu. Viens. Nous sommes très tristes, je te jure... Viens demain déjeuner avec nous, et nous ferons du kebab ou de la kabsa. Viens. Dors avec nous et amène Hassouna avec toi. »
Aucun des deux messages n’arrivera à temps.
« Je te fais symboliquement épouser la terre martyre de Palestine, toi qui devais te fiancer. Tu vas rejoindre pour l’éternité la terre de Palestine. » Les amis de Hassouneh Salim enterrent avec sa dépouille l’alliance que le photojournaliste indépendant n’a jamais pu porter.
Lui qui devait se marier a été tué le 18 novembre 2023 avec son collègue et ami Sari Mansour dans le raid israélien ayant visé le camp de réfugié·es de Bureij, au centre de Gaza.
Son frère lui a également rendu hommage sur Facebook, indiquant que Salim connaissait les risques mais « avait refusé de garder le silence sur les massacres en cours à Gaza » et n’aurait renoncé pour rien au monde à sa mission d’information.
À 68 ans, il était considéré comme le doyen des journalistes de la bande de Gaza. Mostafa El Sawaf, auteur et journaliste palestinien, a été tué le 18 novembre 2023 par un bombardement visant sa maison située dans Gaza City, aux côtés de sa femme et de deux de ses fils.
Mostafa exerçait depuis les années 1980. Il a d’abord travaillé comme journaliste, puis comme rédacteur en chef pour plusieurs médias palestiniens, arabes et internationaux. Il a notamment occupé le poste de correspondant du réseau BBC et de chef du bureau à Jérusalem du quotidien de référence libanais An Nahar. Mostafa a également fondé le premier quotidien publié dans la bande de Gaza, Sawt Al-Jami’a, et en fut le rédacteur en chef.
Un reporter a déploré sur les réseaux sociaux la mort du « père de tous les journalistes palestiniens et dont le parcours [les] a tous inspirés ».
Amro Salah Abu Hayah, un travailleur des médias employé par la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas, a été tué le 18 novembre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne, à Gaza.
« Poursuivez vos rêves où que vous soyez, car la vie est un voyage sans fin fait de réussites et d’échecs », a publié sur sa page Facebook personnelle Mossab Ashour. Le photographe palestinien partageait avec ses amis sa joie d’avoir participé à un télécrochet musical sur Al Jazeera.
Mossab a été tué dans le raid aérien sur le camp de réfugié·es de Nuseirat, situé dans la bande de Gaza. Son corps n’a été découvert que le 18 novembre 2023, alors que sa disparition était déclarée depuis plusieurs jours.
« Nous avons perdu la liaison avec notre équipe à proximité de l’hôpital Al-Shifa, dans la bande de Gaza. Nous n’avions plus eu aucune nouvelle d’eux depuis. Nous venons d’apprendre la mort de notre caméraman et la blessure d’un autre collègue », annonce en plein direct le présentateur de la chaîne Al-Qahera News TV le 13 novembre 2023.
Ahmed Fatima, photographe pour le média égyptien Al-Qahera News TV et collaborateur de la maison palestinienne de la presse, a été tué ce jour-là par une frappe de l’armée israélienne sur la bande de Gaza. Selon le directeur de la chaîne, Ahmed couvrait la situation près de l’hôpital Al-Shifa, alors encerclé par l’armée israélienne, soupçonnant le centre hospitalier d’abriter un centre de commandement du Hamas.
Un fidèle téléspectateur de la chaîne égyptienne pour laquelle Ahmed travaillait a déploré sa mort sur X : « NON, pas Ahmed Fatima !!! C’était l’homme le plus doux qui soit ! Le plus courageux des journalistes informant le monde dans les pires moments ! C’est la première guerre où je m’attache à des journalistes et les regarde mourir un par un, jour après jour. C’est insupportable, tout comme le silence de l’establishment journalistique occidental. »
Le compte X « Martyrs de Gaza », qui s’appuie sur des messages consultables sur les réseaux sociaux pour reconstituer les récits de vie des victimes des bombardements à Gaza, a détaillé au sujet d’Ahmed Fatima : « Il avait l’habitude d’embrasser les enfants de l’hôpital Al-Shifa pour les rassurer et tenter d’apaiser leur peur. Il était bon, gentil et aimé de tous ses collègues. »
Yaacoub al-Barsh, directeur exécutif de la radio locale Namaa, est mort après avoir été blessé le 12 novembre 2023 par une frappe de l’armée israélienne sur sa maison dans le nord de la bande de Gaza.
Yaacoub partageait sur ses réseaux sociaux son amour du ballon rond et particulièrement pour le club de foot de Jabalia, le Nama Club Sports. Il publiait des images des exploits de son club de cœur et étalait sa fierté d’en être l’un des dirigeants et d’avoir accompagné sa réussite depuis sa création, il y a quinze ans.
Le compte Facebook d’Ahmed al-Qara est la démonstration qu’avant le 7 octobre, en dépit des pénuries et d’un quotidien entravé, les Gazaouis entrevoyaient des moments de bonheur partagés. Les sourires et la fierté des étudiant·es dont il capturait les remises de diplôme illuminaient ses réseaux sociaux.
Photojournaliste indépendant, travaillant notamment pour l’université Al-Aqsa de Gaza, Ahmed al-Qara a été tué le 10 novembre par une frappe de l’aviation israélienne à l’entrée de la ville de Khuza, à l’est de Khan Younès, dans la bande de Gaza. L’un des nombreux diplômés qu’il a filmés lui a rendu hommage sur Facebook : « C’était l’une des personnes les plus gentilles que j’ai rencontrées dans ma vie. »
En plus de son travail de journaliste, il intervenait également comme maître de conférences à l’université Al-Aqsa. Selon ses proches, il rêvait de devenir un journaliste célèbre pour porter la voix et les espoirs de la Palestine à travers le monde. Ses étudiant·es ont aussi souligné son engagement professionnel généreux : « Nous témoignons tous de votre dévouement dans votre travail », a écrit l’un. « Vous étiez de bon conseil et saviez toujours trouver la bonne façon de nous aider. Je le jure devant Dieu, nous n’avons connu qu’un homme bon et souriant », a écrit une autre en guise d’hommage.
Yahya Abu Manih, journaliste de la radio Al-Aqsa, affiliée au Hamas, a été tué le 7 novembre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne sur la bande de Gaza. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Yahya.
Mohamed Abu Hassira, journaliste de l’agence de presse Wafa, administrée par l’Autorité palestinienne, a été tué le 7 novembre 2023 par une frappe israélienne tirée sur son domicile à Gaza, avec 42 membres de sa famille.
26 octobre 2023. « Avant de mourir dans un bombardement, d’être enseveli sous les décombres ou d’être déchiqueté en morceaux, on pourrait bien mourir de faim ! », se désole Mohamed al-Jaja sur ses réseaux sociaux, informant ses lecteurs et lectrices de la fermeture de la plupart des boulangeries à Gaza.
29 octobre. Mohamed, travailleur des médias et consultant pour la Maison palestinienne de la presse, donne à ses proches de ses nouvelles, après deux jours de coupure des communications à Gaza. « Physiquement, nous sommes toujours en vie, mais mentalement et émotionnellement, nous sommes loin d’aller bien ! », écrit-il.
3 novembre. Mohamed partage une vidéo de manifestants pacifistes venus interrompre une audition du Sénat américain sur la demande de financement du président Joe Biden pour Israël. Les mains levées, peintes en rouge, ils réclament un cessez-le-feu à Gaza. « Stop au génocide à Gaza ! », commente Mohamed.
4 novembre. Mohamed al-Jaja pleure la mort de son cousin et de sa famille. « Ô ma solitude », clame-t-il.
5 novembre. Mohamed est tué, aux côtés de sa femme et de ses deux filles, dans le bombardement de sa maison à Al-Nasr, un quartier situé au nord de la bande de Gaza.
Mohamad al-Bayyari, journaliste palestinien de la chaîne de télévision Al-Aqsa, affiliée au Hamas, a été tué le 2 novembre par une frappe de l’aviation israélienne sur Gaza City. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Mohamad.
Lorsque Salman Basher apprend la mort de son confrère Mohammed Abu Hatab en plein direct, il fond en larmes et arrache de douleur son casque de protection et son gilet « Press ». « Ces gilets pare-balles et ces casques ne nous protègeront pas, ce ne sont que des slogans que nous portons, ils ne protègent pas les journalistes, se lamente-t-il, alors que sa collègue en plateau éclate en sanglots. Nous n’avons aucune valeur, nous mourrons les uns après les autres. La seule différence entre nous, c’est le temps qui nous sépare de notre mort. »
Trente minutes plus tôt, Mohammed Abu Hatab se tenait face à la caméra à la place de son confrère, relatant le quotidien horrifique des civils gazaouis. « Partout, à chaque coin de rue, à chaque coin de maison, il n’y a que des pleurs et des gémissements », rapportait-il en duplex de l’hôpital Al-Nasser, à Khan Younès.
Trente minutes plus tard, le journaliste de Palestine TV est tué, le 2 novembre 2023, avec onze membres de sa famille par une frappe israélienne visant sa maison à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.
« Tout ce qui m’importe aujourd’hui, c’est que notre voix et notre cause atteignent le plus grand nombre et que nous obtenions davantage de soutien. » Majd Fadl Arandas, photojournaliste pour le média en ligne Al-Jamaheer, consacrait toute son énergie depuis le 7 octobre à documenter les souffrances des civils palestiniens soumis à un déluge de feu.
Et pas seulement. Il avait aussi à cœur de montrer l’éclat d’espoir et la rage de vivre des Gazaoui·es, vivant entre pénuries et bombes. « Je veux montrer des photos de gens qui jouent, rechargent leur téléphone, rient et mangent au milieu de toute cette catastrophe », confiait-il dans un message vocal envoyé au directeur de la galerie photo dubaïote Gulf Photo Plus, à laquelle il contribuait.
Au fond, son objectif était de « documenter la vie quotidienne des civils gazaouis, pour que le monde voie la beauté de Gaza malgré les difficultés endurées et causées par dix-sept ans de blocus israélien ». Une ambition qui a tragiquement pris fin le 2 novembre 2023, lorsque l’aviation israélienne a frappé le camp de réfugié·es de Nuseirat, tuant Majd Fadl Arandas.
Plusieurs photographes qui l’ont côtoyé lui ont rendu hommage sur Instagram : « Majd était photographe et journaliste et il a été récemment contraint de vendre son appareil photo pour pouvoir survivre à Gaza, assiégée par Israël. Il a continué à photographier avec son téléphone portable et espérait économiser pour acheter un nouvel appareil photo. Il était gentil et doux, et beaucoup de ses collègues photographes dans la région se souviendront de sa gentillesse et de son intelligence. »
Iyad Matar, journaliste travaillant pour la chaîne de télévision Al-Aqsa TV, affiliée au Hamas, a été tué le 1er novembre 2023 avec sa mère par une frappe israélienne sur la bande de Gaza. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo d’Iyad.
Imad al-Wahidi, un travailleur des médias et directeur de la chaîne de télévision Palestine TV, gérée par l’Autorité palestinienne, a été tué le 31 octobre 2023 avec les membres de sa famille par une frappe de l’aviation israélienne sur la bande de Gaza.
Un collègue de la chaîne Palestine TV a pleuré sa disparition en publiant sur Facebook une photo du défunt journaliste, accompagnée de ce commentaire : « Mon ami, mon frère et collègue, Imad al-Wahidi, que Dieu ait pitié de toi. Je jure que ton décès me rend tellement triste… Je n’arrive pas à le croire. Que Dieu ait pitié de toi, mon ami et frère. »
Majed Kashko, un travailleur des médias et directeur de la chaîne de télévision Palestine TV, gérée par l’Autorité palestinienne, a été tué le 31 octobre 2023 avec les membres de sa famille par une frappe de l’aviation israélienne sur la bande de Gaza.
Nazmi al-Nadim, directeur adjoint des finances et de l’administration de Palestine TV, a été tué le 30 octobre 2023 avec des membres de sa famille par une frappe de l’armée israélienne sur sa maison dans la région de Zeitoun, à l’est de la bande de Gaza.
Son collègue de Palestine TV, Mahmoud al-Khairy, a réagi par ces mots en apprenant la mort de Nazmi : « Nos cœurs ont fondu et la douleur s’est estompée, et nous n’avons plus assez de larmes pour pleurer nos proches défunts. »
Le journaliste palestinien Yasser Abu Namous, travaillant pour le média Al-Sahel, a été tué le 27 octobre 2023 dans le bombardement de sa maison familiale à Khan Younès, dans la bande de Gaza.
Connu de tous comme un journaliste professionnel, apprécié pour ses grandes qualités humaines, il avait grandi en orphelin, après qu’un bombardement israélien l’eut privé de son père et enseignant, Subhi Abu Namous, et de sa mère, Naama.
L’épouse de Yasser a pleuré sa disparition sur les réseaux sociaux : « Mon esprit n’a pas accepté que Yasser, mon bien-aimé, mon cœur, passe la nuit loin de moi pour toujours. Comme son rire et sa voix me manqueront ! »
Les habitantes et habitants de Gaza ont formé une procession funèbre pour lui rendre hommage, transportant son corps enveloppé dans un linceul blanc sur un brancard.
Le 7 octobre 2023, alors que le fracas des bombes résonne déjà dans la bande de Gaza, quelques heures après la terrible et meurtrière attaque des commandos du Hamas, Duaa Sharaf, journaliste pour la station de radio Al-Aqsa affiliée au Hamas, se laisse emporter par sa colère sur les réseaux sociaux. À Recep Tayyip Erdoğan, président turc, qui déclare : « Nous appelons les parties à faire preuve de retenue et à éviter les mesures susceptibles d’aggraver les tensions », elle répond : « Peux-tu te taire ? »
Le 26 octobre, elle est tuée aux côtés de son jeune fils Obeida dans la frappe qui touche sa maison dans le quartier gazaoui de Yarmouk. Ses proches lui rendent hommage, inondent sa dernière publication de messages affectueux et demandent pardon pour sa fureur. « Tu as rejoint le convoi des martyrs de Gaza », écrit l’un. « Que Dieu te fasse miséricorde, te pardonne et t’accueille dans ses jardins spacieux », implorent d’autres.
Jamal al-Faqaawi, journaliste palestinien pour la fondation Mithaq Media, affiliée au Jihad islamique, a été tué le 26 octobre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne sur son domicile à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.
Journaliste pour la chaîne de télévision Al-Aqsa TV, affiliée au Hamas, Saed al-Halabi a été tué le 25 octobre 2023 dans le bombardement de sa maison par l’aviation israélienne dans le camp de réfugié·es de Jabalia, au nord de la bande de Gaza.
Journaliste pour la chaîne de télévision Al-Aqsa TV, affiliée au Hamas, Ahmed Abu Mhadi a été tué le 25 octobre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne sur la bande de Gaza. Malgré nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo d’Ahmed.
Elle venait à Gaza faire à sa famille la surprise de sa visite. Elle n’en est jamais repartie. Salma Mkhaimer, journaliste indépendante de 31 ans, a été tuée le 25 octobre 2023 dans une frappe israélienne visant la ville frontalière de Rafah, aux côtés de son bébé, de son père, de sa mère et de plusieurs autres membres de sa famille.
Elle vivait à Amman, capitale jordanienne, avec son mari et son enfant, et s’était rendue à Gaza, la ville de son enfance, pour y voir sa famille. Elle était diplômée de l’université islamique de Gaza en langue arabe et journalisme.
Journaliste pour le site d’information Al-Resalah, Mohammed Imad Labad, 26 ans, a été tué le 23 octobre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne sur le quartier Sheikh Radwan, à Gaza City.
Sa collègue, Rola Abu Hashem, lui a rendu hommage sur Instagram par ces quelques mots : « Nous nous souviendrons de Mohammed comme d’un jeune homme poli, travailleur et serviable. Il attendait de commencer une nouvelle phase de sa carrière et de réaliser ses rêves en compagnie de sa compagne, avec qui il venait de se fiancer, écrit-elle. Mais l’occupation ne lui en a pas donné l’opportunité, il est devenu martyr alors qu’il était assis à côté de son grand-père devant leur maison. »
21 octobre 2023. Frédéric Métézeau, journaliste pour Radio France, s’enquiert de la santé de son ami et fixeur Roshdi Sarraj, qui vit sous les bombes depuis deux semaines. « Merci mon frère, je t’envoie de l’amour et la paix depuis Gaza », lui répond-il. Le lendemain, il est tué près de sa maison à Tell Al-Hawa par une frappe israélienne, à une dizaine de mètres de sa femme, Shrouq, et de sa fille d’un an, Dania, assistant toutes les deux à la mort de Roshdi, impuissantes.
Roshdi Sarraj, 31 ans, travaillait comme fixeur pour plusieurs médias français, quand il n’était pas occupé à photographier ou à raconter pour son agence Ain Media la vitalité et l’inventivité de la société gazaouie.
« On avait la même envie, celle de documenter le siège de Gaza, les difficultés monstrueuses de ses habitants, se souvient Frédéric Métézeau. Mais on voulait aussi montrer que les Gazaouis ne vivaient pas seulement la guerre, mais faisaient de l’art, avaient la culture du bien-manger, s’intéressaient à la technologie, à la plongée sous-marine. Il me montrait toute cette société qui savait s’organiser et contourner le blocus. »
Céline Martelet, journaliste française qui a aussi beaucoup travaillé avec Roshdi, tissant une puissante amitié avec lui, a proposé de l’inscrire sur une liste de journalistes souhaitant être évacués de la bande de Gaza. « Nous ne partirons pas… Et nous sortirons de Gaza… pour [aller] au ciel, et seulement au ciel », avait-il l’habitude de répondre.
« Prie juste pour nous. Si nous mourons, ne sois pas triste, tu pourras être fier de savoir que nous avons résisté jusqu’à notre dernier souffle », lançait-il, avec sa femme, à qui s’inquiétait pour eux.
Journaliste pour la radio étudiante Al-Shabab, Ali a été tué le 19 octobre 2023 par une frappe de l’aviation israélienne au nord de la bande de Gaza.
Caméraman pour la chaîne de télévision Al-Aqsa TV, affiliée au Hamas, Abu Aathra a été tué le 19 octobre 2023 avec son frère dans un bombardement de l’armée israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.
L’un de ses amis a partagé sa photo sur Facebook, comme pour laisser une trace numérique de son existence et pour que son souvenir vive : « Au revoir, Khalil, que Dieu te protège… Nous ne savons plus qui pleurer parmi vous, mes amis. »
« Oh mon Dieu, quelle tristesse ! Il a capturé mes souvenirs quand j’étais enfant. Toutes mes photos, depuis mes cinquante premiers jours jusqu’à ce que je grandisse, ont été prises par lui », a pleuré un habitant de Gaza sur la page Facebook de Sameeh al-Nady.
Sameeh, journaliste et directeur pour Al-Aqsa TV, chaîne affiliée au Hamas, a été tué le 18 octobre 2023 par une frappe de l’armée israélienne. Sur Facebook, l’une de ses dernières publications est une photo de ses jumeaux arborant leur toque de diplômé. Il y exprimait sa fierté pour leurs excellents résultats au baccalauréat.
Le 17 octobre 2023, Mohammad Balousha ainsi que sa petite fille Layan, son père Jameel, plusieurs de ses frères et sœurs et leurs enfants, ont été tués par une frappe de l’armée israélienne dans le quartier Al-Saftawi, au nord de la bande de Gaza.
Mohammad cumulait les fonctions de journaliste et de directeur financier et administratif pour le bureau gazaoui de la chaîne Palestine Today. Il était connu pour être une personne aimable et efficace, dévouée à son travail, dotée d’une certaine éthique et de belles qualités humaines, selon le réseau Quds News, une agence de presse palestinienne alimentée par le travail de correspondants et correspondantes bénévoles à travers la Palestine.
Quatre jours avant de perdre la vie dans un bombardement de l’aviation israélienne au nord de la bande de Gaza le 17 octobre 2023, Issam Bhar, journaliste pour Al-Aqsa TV, un média affilié au Hamas, recommandait à ses amis la récitation de sept versets du Coran pour « se mettre à l’abri de l’affliction ».
Celui qui venait de lancer une chaîne YouTube et une page Facebook de récitation coranique dispensait aussi des cours de religion aux jeunes enfants de Gaza. Ses étudiants lui ont largement rendu hommage sur sa page Facebook, partageant les messages d’espoir de leur professeur envoyés quelques jours avant sa mort sur WhatsApp. « Tranquillisez-vous et augmentez vos prières, mes frères », leur écrivait-il.
Abdulhadi Habib, journaliste pour les agences de presse Al-Manara et HQ, a été tué le 16 octobre 2023 avec plusieurs membres de sa famille lorsqu’une frappe a détruit sa maison près du quartier de Zeitoun, au sud de la ville de Gaza.
Peu avant le déclenchement de l’offensive israélienne sur Gaza, Abdulhadi partageait sur son compte Facebook le désespoir que lui inspirait cette vie d’enfermement dans l’enclave assiégée, dont il n’a jamais pu sortir. « On ne sait pas, peut-être que Dieu nous apportera quelque chose de bien après ça », écrivait-il.
Sur ce même compte Facebook, il partageait aussi ses joies, comme en 2021, lorsqu’il fut diplômé en technologie des médias et de la communication au Collège universitaire des sciences appliquées de Gaza, après un premier diplôme en 2006.
Ses amis ont pleuré sa perte sur les réseaux sociaux. « Nos cœurs sont brisés », a écrit l’un d’eux.
En janvier 2023, Yousef Maher Dawas publiait un essai intitulé Qui nous rendra les vingt années que nous avons perdues ?. Il y raconte la destruction du verger de sa famille par une frappe israélienne en mai 2022, où trônaient divers arbres fruitiers, parmi lesquels des oliviers, des citronniers et des clémentiniers. « [Leur perte] a détruit un élément important de notre passé. L’histoire de notre famille. Notre patrimoine », déplorait-il.
Le jeune journaliste pour le site Palestine Chronicle a été tué le 14 octobre avec plusieurs membres de sa famille dans la destruction de sa maison par une frappe israélienne à Beit Lahia, au nord de la bande de Gaza. Yousef contribuait aussi au projet « Nous ne sommes pas que des nombres », qui s’attache à raconter l’humanité qui se cache derrière le bilan désincarné du carnage à Gaza.
Pour que le souvenir de Yousef vive, et afin qu’il ne soit pas qu’un mort de plus, ses proches lui ont rendu hommage dans plusieurs articles. « Un sourire radieux l’accompagnait en permanence, reflet de sa gentillesse, de sa compréhension et de son amour, se souvient son collègue Hamza Ibrahim. Yousef n’était pas seulement un ami ; il était un phare, une âme désintéressée qui se donnait corps et âme à ses amis et à sa communauté. »
Dans une vidéo, le jeune homme parle de son désir de visiter d’autres villes de Palestine, « plus encore que Paris ou les Maldives ».
La page Facebook de Salam Mema est un livre ouvert sur sa vie. Elle y publiait avec une fierté non contenue des photos de ses trois enfants, Hadi, Ali et Shaam, et de son mari. « Ils sont le soutien, le foyer, le refuge, la tranquillité et la joie de vivre... Ô mon Dieu, ils sont un morceau de mon âme, alors protège-les pour moi avec Tes yeux qui ne dorment jamais », écrivait-elle sur son dernier post.
La journaliste indépendante de 32 ans a été tuée le 13 octobre 2023 dans le bombardement de sa maison située dans le camp de réfugié·es de Jabalia, au nord de la bande de Gaza. La frappe a aussi décimé sa famille : son mari, sa fille de deux ans, Shaam et son fils de 7 ans, Hadi, ont aussi été tués, laissant Ali, âgé de cinq ans, comme seul survivant.
Mema, aussi membre du comité des femmes journalistes de Gaza, n’est pas morte sur le coup. Elle est restée prise au piège sous les décombres de sa maison pendant trois jours. Elle n’a pas pu être secourue à temps.
Son amie Nisreen Razayne a pleuré sa perte dans le Washington Post, se souvenant d’elle comme d’un « ange », une mère aimante et une collègue solidaire. « Elle n’était pas une soldate, a-t-elle encore déclaré. Mon esprit ne peut plus rien encaisser. »
Husam Mubarak, journaliste à la radio Al-Aqsa, affiliée au Hamas, a été tué le 13 octobre 2023 lors d’une frappe de l’aviation israélienne dans le nord de la bande de Gaza.
« Il était toujours au bon endroit, au bon moment. Peu importe l’heure, il était toujours prêt à enfourcher sa moto pour aller sur le terrain et capturer la première image », se souvient Ayat Asmat, au sujet de son collègue Issam Abdallah, tué le 13 octobre 2023 dans le sud du Liban, alors qu’il couvrait la montée des tensions entre Israël et le Hezbollah, à la frontière.
« Assam était comme un papillon, il savait tout faire, écrire, filmer, photographier. Sa mort est une énorme perte pour la profession », déplore son amie Ayat, qui dit avoir perdu comme un membre de sa famille.
Elle raconte auprès de Mediapart que le photojournaliste et vidéaste de l’agence Reuters prenait beaucoup de précautions, portait toujours son équipement qui l’identifiait comme journaliste, et était surtout très attaché à sa mission d’information. « Lors des manifestations anti-couvre-feu aux Pays-Bas en 2021, il a été blessé par la police. Avant d’être conduit à l’hôpital, il a insisté pour éditer et envoyer ses photos d’abord », se remémore Ayat.
Plusieurs enquêtes de médias indépendants, dont l’AFP et Reuters, ont mis au jour la responsabilité de l’armée israélienne dans le bombardement qui a tué Issam et blessé six reporters. Leurs investigations désignent un obus de char que seule l’armée israélienne possède dans cette région et prouvent que le groupe de journalistes a été délibérément ciblé alors qu’ils étaient clairement identifiables comme des reporters.
« L’impunité d’Israël, qui cible délibérément ceux qui tentent de raconter de manière impartiale la guerre, est extrêmement décourageante pour les journalistes au Moyen-Orient », soupire Ayat.
Shehab, journaliste pour la radio Sowt Al-Asra (« La Voix des prisonniers »), ainsi que sa femme et ses trois enfants, sont morts le 12 octobre 2023 dans le bombardement de leur maison à Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza. En dépit de nos efforts, nous ne sommes pas parvenus à trouver une photo de Shehab.
Travaillant comme journaliste indépendant pour plusieurs agences de presse internationales, Abu Matar a été tué le 11 octobre 2023 lors d’une frappe de l’aviation israélienne dans la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. Il couvrait l’offensive israélienne contre l’enclave palestinienne lorsqu’il a été tué.
Saeed al-Taweel était rédacteur en chef du site Al-Khamsa News. Il a été tué le 10 octobre 2023 lorsque l’aviation israélienne a frappé un immeuble résidentiel dans le quartier de Rimal, à Gaza. Saeed était sur place avec plusieurs confrères journalistes pour raconter la détresse des civils gazaouis soumis à un tapis de bombes, quelques jours après l’assaut du Hamas sur le sol israélien.
Peu de temps avant sa mort, il diffusait sur son compte Facebook son dernier reportage, documentant l’évacuation d’un immeuble de la tour Haji, avant que celui-ci ne soit bombardé. Lors d’un cortège funèbre, des confrères ont rendu hommage à Saeed et aux deux autres journalistes palestiniens tués dans la frappe. Leurs corps, enveloppés dans des linceuls blancs, surmontés de casques portant l’inscription « Press », ont été portés dans les rues gazaouies, défigurées par les bombes.
Des connaissances ont salué la mémoire de Saeed sur Facebook : « Saeed est tombé en martyr et l’information à Gaza s’est éteinte avec lui. »
Mohammed Sobh, 34 ans, était photographe pour l’agence de presse Khabar. Le 10 octobre 2023, Mohammed se rend avec ses collègues dans le quartier de Rimal, pour couvrir l’évacuation d’un immeuble d’habitation, que l’aviation israélienne a prévu de frapper. « Ils ont pris toutes les précautions nécessaires », précise Saleh al-Nazli, rédacteur en chef de Khabar, au Washington Post, ajoutant qu’ils arboraient leur gilet de protection floqué « Press » et des casques.
Avec d’autres confrères, Mohammed s’abrite sous un immeuble, « à une distance suffisante de la tour qui risquait d’être prise pour cible », raconte encore son rédacteur en chef. Mais l’immeuble qui leur servait de refuge est aussi touché par une frappe israélienne. Mohammed est tué, avec deux autres journalistes, dans le bombardement.
Son rédacteur en chef se souvient de lui comme d’un « journaliste passionné » qui « aimait profiter de la vie », et qui emmenait souvent son fils de 6 ans, Rizq, à la plage de Gaza. Une connaissance de Mohammed a commenté une de ses photos sur les réseaux sociaux, indiquant qu’il avait pour projet de visiter Naplouse, en Cisjordanie : « Il m’a dit que son rêve était de visiter cette ville. »
Hisham Alnwajha, 28 ans, était journaliste à l’agence de presse Khabar. Il a été blessé le 10 octobre 2023 lorsque des avions de l’armée israélienne ont frappé un immeuble résidentiel dans le quartier de Rimal, à Gaza. Hisham était sur place avec plusieurs confrères journalistes pour couvrir l’évacuation de la tour Haji lorsque celle-ci a été bombardée.
Peu après l’attaque, l’épouse de Hisham a indiqué sur Facebook qu’il était blessé, implorant ses amis de prier pour lui. Quelques heures plus tard, le site d’information palestinien Al-Watan annonce son décès. Le couple était parent de jumeaux.
Le jour de sa mort, il avait publié sur sa page Facebook, vêtu de son gilet « Press », un message vidéo d’espoir. Déplorant « le déferlement de violences inouï qu’Israël déverse sur Gaza en bombardant les civils », il exprimait à ses proches son souhait de les « revoir bientôt et de [les] retrouver en paix et en bonne santé ».
Le journaliste égyptien Abdelfattah Tarek a fait la rencontre de Hisham grâce aux réseaux sociaux et a ensuite noué avec lui une puissante amitié. Celui-ci venait régulièrement lui rendre visite et raffolait des crêpes au miel que confectionnait sa mère.
Il confie à Mediapart son chagrin : « Lorsque Hisham est décédé, le choc a été immense, j’ai beaucoup pleuré. J’ai essayé de le joindre par message, en vain. Hisham n’était pas seulement un ami loyal mais aussi un frère bienveillant, et son souvenir restera vivant dans mon cœur. Il était un journaliste professionnel qui exprimait sans crainte son amour pour Gaza et son désir de la défendre à travers sa profession. »
Assaad Shamlakh, journaliste indépendant de 20 ans, a été tué le 8 octobre 2023 avec neuf membres de sa famille par une frappe israélienne visant leur maison à Sheikh Ijlin, un quartier du sud de la bande de Gaza.
Mohammad al-Salhi, photojournaliste pour l’agence Fourth Authority News, a été abattu le 7 octobre 2023, alors qu’il couvrait les événements survenus près d’un camp de réfugié·es palestinien·nes, au centre de la bande de Gaza.
Son épouse a partagé sur son compte Facebook une photo de son défunt mari enveloppé dans un linceul. « La nouvelle de ta mort n’a pas été facile pour moi, a-t-elle écrit. Cela m’a brisé le cœur et ce fut le moment où ma vie a pris fin. J’ai voulu t’appeler pour que tu me prennes dans tes bras et apaises mon chagrin, mais pour la première fois, tu n’as pas répondu à mon appel. »
Mohammad Jarghoun, 28 ans, était journaliste pour Smart Media. Il a été abattu le 7 octobre 2023 par l’armée israélienne, alors qu’il couvrait la montée des tensions au sud de la bande de Gaza, à l’est de Rafah.
Il avait obtenu en 2018 son diplôme en relations publiques et médias. Cette même année, il s’était particulièrement employé à raconter la grande marche du retour, qui a coûté la vie à plus de 200 Palestiniens, tombés sous les balles des snipers de l’armée israélienne alors qu’ils manifestaient pour réclamer le droit au retour des réfugié·es palestinien·nes.
Il écrivait en 2018 sur son compte X, quelques jours avant le début de la marche : « À partir d’aujourd’hui, ma page personnelle et tous mes comptes sur les réseaux sociaux seront consacrés à la Grande Marche du retour. J’y participerai avec ma plume et mon corps. J’écrirai pour et sur elle. »
Ibrahim Lafi, photojournaliste pour l’agence Ain Media, a été abattu le 7 octobre 2023 alors qu’il se trouvait en reportage au point de passage d’Erez, à la frontière entre la bande de Gaza et Israël.
À 21 ans, il travaillait avec le journaliste palestinien Roshdi Sarraj, lui aussi tué par l’armée israélienne. Ibrahim concevait son travail de photoreporter pour l’agence Ain Media comme un moyen de capter et de documenter la détresse des habitant·es de Gaza. Les larmes d’un homme en deuil, les immeubles réduits en poussière, les enfants jouant au milieu des décombres : ces scènes de vie, communes à Gaza, occupaient une part importante de son travail.
Mais il avait aussi à cœur de montrer que malgré les drames humains, Gaza était pleine de vie. Sur son compte Instagram, il publiait les images d’oiseaux, de chevaux, de mariages, d’arcs-en-ciel. « Ibrahim était très talentueux et créatif. Il rêvait de devenir un journaliste international et un réalisateur de films couvrant des événements dans le monde entier », a rapporté son confrère Roshdi Sarraj.
Quelques heures avant de partir pour son dernier reportage, Ibrahim Lafi publiait une photo de bâtiments en ruine, accompagnée du commentaire suivant : « Ils ne nous ont pas seulement massacrés, ils ont massacré nos rêves et nos espoirs. »
Rédigé le 11/02/2024 à 13:36 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Photo : D. R.
Un collectif de 100 000 avocats représentant les Ordres professionnels de Tunisie, de Palestine, d’Algérie, de Jordanie, de Mauritanie et depuis peu de Libye, ont pris part à l’action judiciaire engagée vendredi dernier devant la Cour pénale internationale (CPI) contre l’entité sioniste pour les crimes de génocide, contre l’humanité et de guerre.
Une action à laquelle se sont joints le Syndicat national des magistrats (SNM) et l’avocat français Gilles Devers, fervent défenseur de la question palestinienne et de celle du Sahara occidental.
Lors d’une conférence de presse animée conjointement hier à Alger, le président de l’Union nationale des Ordres des avocats d’Algérie (Unoa), Me Brahimi Tairi, et Me Gilles Devers ont expliqué que la première étape de cette procédure consiste à déposer un important dossier documenté sur les crimes commis par Israël à Ghaza, mais aussi les attendus de l’ordonnance de la Cour internationale de justice (CIJ), rendue le 26 janvier dernier, sur la base desquels les magistrats ont affirmé une «plausibilité» de crimes de génocide.
Intervenant le premier, Me Tairi a affirmé que le collectif algérien est composé 65 000 avocats et 6000 magistrats auxquels s’est joint un autre collectif international, qui comprend les Ordres d’avocats palestiniens, tunisiens, jordaniens, mauritaniens et depuis peu libyens : «Nous avons un collectif global de 100 000 avocats qui a alerté sur les crimes commis par l’entité sioniste et qui continue à les commette.»
Me Tairi à rendu hommage à l’Afrique du Sud qui a poursuivi Israël devant la CIJ, mais aussi Me Gilles Devers pour «le travail colossal qui a été fait». Il a précisé en outre que l’initiative a commencé à voir le jour après la recommandation de l’assemblée générale des avocats, et exhortant l’Unoa à déposer plainte auprès des instances internationales contre l’entité sioniste pour les crimes de génocide, contre l’humanité et de guerre : «L’appel que le président (Abdelmadjid Tebboune, ndlr) a lancé à l’adresse des hommes de droit a mis l’action au-devant de la scène avant que la conférence internationale sur la Palestine ne soit organisée à Alger en début de cette année.
Cette première étape de la procédure a consisté à remettre au bureau du procureur l’ensemble des preuves collectées et appuyer ainsi l’enquête déjà ouverte en 2021 et qui est en cours. La troisième étape sera le bureau des victimes. Grâce à notre réseau, nous allons constituer une banque de données sur les victimes directes et les blessés, auxquels le procureur doit rendre visite pour les entendre.
La troisième étape est de voir comment saisir les tribunaux à compétence universelle pour poursuivre les dirigeants d’Israël.» Me Tairi a rappelé «qu’étant donné que l’Algérie n’est pas Etat-parti de la CPI, elle ne peut saisir directement la juridiction. Et devant la CIJ, elle ne peut être partie dans le dossier en raison du fait qu’elle ne reconnaît pas l’entité sioniste. Si elle le fait, elle reconnaîtra de fait celle-ci.
Elle peut cependant demander l’une précision ou une lecture de la convention, sans pour autant que l’entité sioniste ne soit partie dans le dossier». L’avocat a ajouté, par ailleurs, que la prochaine action du collectif est de voir comment poursuivre les pays qui continuent à soutenir Israël en dépit des actes de génocide commis à Ghaza.
«Je suis optimiste»
Lui emboîtant le pas, Me Gilles Devers a rappelé que son travail sur le Sahara occidental et celui sur la Palestine se ressemblent. «En fait, je défends les mêmes principes et la même réalité de colonisation et de violation du droit international (...). Ce sont deux peuples qui se battent contre la colonisation qui leur a volé leurs terres. Il y a 100 Palestiniens qui risquent de mourir cette nuit et 50 d’entre eux sont des enfants. Si nous pouvons dire cela à Alger ou dans certains pays arabes, en Europe, ce n’est pas le cas», a souligné l’avocat.
Celui-ci s’est déclaré «optimiste» au vu de son analyse des procédures. «En tant qu’avocat et vu mes connaissances, je ne peux qu’être optimiste. C’est le principe même de notre métier. Les avocats ne sont pas les ennemis des juges.
Ils les aident à faire leur travail. Donc, nous venons aider le bureau du procureur et être juste pour ne pas faire apparaître un pessimisme idiot. Je suis très optimiste.» Me Devers à affirmé, par ailleurs, que la plainte du 9 novembre dernier devant la CPI a été actée par 600 avocats, dont ceux du barreau d’Algérie. Pour l’avocat, il y a «une nouvelle configuration jamais vue jusqu’à présent».
«(…) La CIJ a jugé en 2021 que la Palestine est un Etat. Nous somme là pour décrire les choses comme elles sont. C’est un Etat sous domination. Cela lui donne accès à tous les traités et au droit international. La Palestine a déposé plainte et ratifié le traité. Il faut rendre hommage à Mahmoud Abbas de l’avoir fait. Maintenant, le terrain est balisé. Il y a une enquête alors que les faits se poursuivent. Avant il n’y avait rien. Ils attendaient que ça finisse. Il y a une équipe qui se déplace et fait son enquête. Jamais les enquêtes contre Israël n’ont été aussi avancées.»
Me Devers a évoqué les demandes de mandats d’arrêt contre le Premier ministre, Benyamin Netanyahu, son ministre de la Défense, le chef de l’état-major de l’armée, en disant que le procureur est sur la voie de répondre aux questions relatives à leur responsabilité dans les crimes pour émettre des mandats d’arrêt à leur encontre dans les semaines ou les mois à venir. Selon lui, la requête de l’Afrique du Sud a été prise en charge dans un temps record, puisque les enquêtes de ce genre prennent au moins deux ans. Il a expliqué que la CIJ n’a de compétence que pour les Etats.
Elle ne peut pas décider d’un cessez-le-feu parce qu’il ne s’agit pas d’une guerre entre deux Etats, mais d’un conflit armé entre un Etat et des groupes armés auxquels elle ne peut s’adresser : «(…) La CIJ a marqué une brèche sur le mur et notre rôle est de faire que cette brèche soit élargie.» Avant de conclure, Me Devers a annoncé que sa prochaine bataille est la plainte «pour Jérusalem». «En 2021, la CIJ a dit que Jérusalem est sous occupation.
C’est le point de vue du droit. Tout est documenté, la bataille de Jérusalem est capitale. Nous ferons juger les conséquences de la Nakba. Nous voulons arracher le droit de retour pour 7,5 millions de Palestiniens. Jérusalem est leur capitale. Si on leur interdit de rejoindre Jérusalem, c’est que leur droit au retour n’est pas protégé. Notre action est la défense des droits des victimes de la Nakba. Il y a eu 14 expériences similaires gagnées, pourquoi pas pour la Palestine ?»
https://elwatan-dz.com/cpi-un-collectif-de-100-000-avocats-depose-plainte-contre-israel
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Rédigé le 11/02/2024 à 12:54 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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