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Alain Gresh : ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, fondateur des journaux en ligne Orient XXI et Afrique XXI, spécialiste du Proche-Orient. Rony Brauman : ancien président de Médecins Sans Frontières, enseigne au Humanitarian and Conflict Response Institute (HCRI), chroniqueur à Alternatives Economiques.
Rédigé le 17/05/2024 à 16:08 dans Gaza, Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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Rédigé le 05/04/2024 à 20:15 dans Israël, Lejournal Depersonne, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Les décombres de l’hôpital Al-Shifa, à Gaza, ce lundi 1er avril. (Dawoud Abu Alkas/Reuters)
A Gaza, la grande entreprise criminelle continue : l’hôpital Al-Shifa réduit à néant par l’armée israélienne. En se retirant de l’établissement de santé après deux semaines de siège, les forces armées israéliennes ont laissé derrière elles des corps en décomposition et d’immenses destructions.
Larguer de l’aide humanitaire sur la bande de Gaza tout en livrant des armes à Israël. Le paradoxe de la guerre qui se joue dans l’enclave assiégée se résume en une image, publiée ce lundi 1er avril par l’Agence France Presse. Une dizaine de colis suspendus à des parachutes viennent d’être lâchés par des avions occidentaux à quelques kilomètres de l’hôpital Al-Shifa, que l’armée israélienne vient de transformer en un gigantesque champ de ruines.
Après quatorze jours de siège, loin des regards des journalistes et des humanitaires, Tsahal a achevé ce lundi 1er avril son opération d’envergure dans le plus grand centre hospitalier de l’enclave, dans la ville de Gaza. Le 18 mars, elle avait lancé un assaut « ciblé » sur ce vaste établissement, accusé d’abriter des commandants du Hamas et du Jihad islamique. L’annonce du retrait a immédiatement provoqué un afflux de plusieurs centaines de personnes vers le complexe médical, qui a accueilli jusqu’à 50 000 déplacés. Ces femmes et ces hommes espéraient y retrouver leurs proches disparus ou récupérer des affaires abandonnées de manière précipitée lors de leur fuite.
« Tués ou morts de faim »
Au lieu de cela, les Gazaouis ont découvert des scènes d’apocalypse dignes de celles des batailles d’Alep ou de Mossoul. L’hôpital Al-Shifa, créé en 1946 pendant le mandat britannique et d’une capacité de 700 lits, a été réduit à néant par l’offensive terrestre et les frappes aériennes. Les bâtiments ont été détruits, calcinés ou pulvérisés. Des images montrent des cadavres en décomposition, dévorés par les insectes, qui gisent encore sur le sol au milieu des montagnes de gravats. Des hommes font des va-et-vient dans l’établissement avec des civières. D’autres hurlent leur douleur au milieu de la foule. Selon des médecins et des civils présents sur place, une vingtaine de corps ont été retrouvés, dont certains semblent s’être fait rouler dessus par des véhicules militaires.
Des témoins ont affirmé que certains individus avaient été menottés avant d’être tués. « Certains membres du personnel médical ont été tués, torturés ou détenus. Surtout, ils ont été assiégés pendant deux semaines sans aucun matériel médical, ni même de nourriture ou d’eau, a déclaré Raed al-Nims, porte-parole du Croissant-Rouge palestinien. Nous n’avons pas encore de chiffres définitifs, mais il ne fait aucun doute que de nombreux civils ont été tués soit directement par les forces d’occupation israéliennes soit morts de faim. » Dimanche, l’Organisation mondiale pour la santé indiquait que 107 patients dépourvus de soins médicaux, dont quatre enfants, se trouvaient encore dans l’hôpital Al-Shifa et que 21 autres étaient morts depuis le début du siège. Selon le gouvernement du Hamas, qui a appelé la Cour internationale de justice à enquêter sur ces « crimes », environ 400 Palestiniens ont été tués lors de cette opération. Parmi eux, la docteure Yusra Al-Maqadma et son fils Ahmed Al-Maqadma.
Le discours israélien est beaucoup plus élogieux. L’armée, qui assure avoir mené ce raid « tout en évitant de nuire aux civils, aux patients et aux équipes médicales », s’est félicitée d’avoir éliminé 200 « terroristes » et arrêté plus de 900 personnes, dont la moitié se sont révélées être affiliées au Hamas et au Jihad islamique. Précédemment, un porte-parole de Tsahal avait même qualifié l’opération de « l’une des plus réussies de la guerre jusqu’à présent » en raison des renseignements recueillis, ainsi que du nombre de personnes tuées et détenues. L’armée israélienne avait déjà mené en novembre un assaut de ce type contre l’hôpital Al-Shifa, affirmant avoir découvert un tunnel de 55 mètres utilisé par le Hamas sous le complexe médical.
Paralysie du système de santé
Après deux semaines de siège, l’établissement, qui représentait avant le 7 octobre environ 30% de la capacité du système de santé dans la bande de Gaza, n’est plus du tout fonctionnel. Il n’y a d’ailleurs plus aucun hôpital opérationnel dans la bande de Gaza en raison du manque de carburant, de personnel et de fournitures médicales, alerte l’OMS. Dans le Sud, le centre de santé Nasser de Khan Younès, le deuxième plus grand de l’enclave, est lui aussi complètement hors service. Pour éviter une paralysie complète du système de santé et face aux « attaques répétées » de la part d’Israël, le ministère de la Santé de Gaza a appelé ce lundi les Palestiniens à rester à l’écart des hôpitaux, à moins qu’ils ne soient malades ou blessés.
Alors que le dernier bilan de personnes tuées depuis six mois dans la bande de Gaza s’élève à près de 33 000 personnes, le Hamas a présenté pour la première fois, dans un communiqué sur Telegram, ses excuses aux Gazaouis pour les souffrances engendrées par la guerre. Tout en adressant un message de remerciement à la population, dont il reconnaît « l’épuisement », le mouvement islamiste a réitéré sa volonté de poursuivre la lutte qui permettra de parvenir à « la victoire et la liberté » des Palestiniens.
Guerre d’Israël à Gaza : le chaos et l’impasse
Six mois se sont écoulés depuis le 7 octobre 2023 et les massacres du Hamas en Israël. Depuis, l’État hébreu massacre les Palestiniens. L’espoir d’une solution politique n’a jamais semblé aussi lointain.
Trente-trois mille morts et soixante-quinze mille blessé·es à Gaza depuis le mois d’octobre. Mille cent morts le 7 octobre en Israël et 130 otages israéliens et étrangers, dont le sort est inconnu, aux mains de groupes palestiniens à Gaza.
La guerre d’Israël à Gaza ne connaît toujours pas de cessez-le-feu, malgré une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU. Benyamin Nétanyahou est toujours premier ministre : après tout, les dirigeants occidentaux ne font rien pour l’arrêter.
Quand cette guerre prendra-t-elle fin ? Est-elle en train d’embraser le Proche-Orient ? Quelle issue politique, s’il y en a une ?
Nos invité·es :
SOURCE : Guerre d’Israël à Gaza : le chaos et l’impasse | Mediapart
Rédigé le 05/04/2024 à 19:59 dans Gaza, Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter son appartement de la ville de Gaza avec sa femme et son fils Walid, deux ans et demi. Il partage maintenant un appartement de deux chambres avec une autre famille. Il raconte son quotidien et celui des Gazaouis de Rafah, coincés dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Cet espace lui est dédié.
Dimanche 31 mars 2024.
Aujourd’hui j’ai une mauvaise nouvelle à annoncer. Le père de mon épouse Sabah est décédé. Il est parti reposer en paix parce qu’il n’a pas résisté aux conditions de vie depuis son déplacement forcé à Rafah. Il s’appelait Souleimane, il avait 76 ans. Il était né en 1948, l’année de la Nakba. Et il est mort l’année de la deuxième Nakba, qui est en cours.
Sa vie est un résumé de l’histoire contemporaine de Gaza. Il a connu la domination égyptienne puis israélienne, la première intifada en 1987, l’arrivée de l’Autorité palestinienne (AP) et de Yasser Arafat en 1994 après les accords d’Oslo, la deuxième Intifada en 2000, la prise du pouvoir par le Hamas en 2007, les différentes offensives de l’armée israélienne et finalement l’exode vers le sud de la bande, suite auquel il survivait sous une tente.
Mon beau-père était un entrepreneur prospère dans le bâtiment, originaire de Gaza. Il était là avant l’arrivée des réfugiés de la Nakba dont les descendants constituent la majorité des habitants de Gaza aujourd’hui. Il avait dix-neuf enfants. La plus âgée a 49 ans, le plus jeune 13 ans. J’aimais bien discuter avec lui, c’était un homme d’une grande sagesse.
Avec sa famille, ils avaient été parmi les premiers à fuir vers le sud, parce que sa maison était à Chadjaya, un quartier proche de la frontière avec Israël, qui est toujours le premier visé quand les Israéliens attaquent. Mais ils avaient tiré les conséquences de l’offensive de 2014. Mon beau-père avait alors perdu son frère, la femme de ce dernier, leurs deux enfants et une petite-fille. Leur maison avait été complètement détruite. C’était un immeuble familial, comme c’est souvent le cas à Gaza. Chacun de ses enfants avait son propre appartement, où il habitait avec sa famille. Souleimane habitait au rez-de-chaussée avec les plus jeunes de ses enfants et ses filles non mariées.
Cette fois, ils sont partis dès le début de l’offensive israélienne. D’abord vers la ville de Gaza, en ordre dispersé. Certains se sont réfugiés à l’hôpital Al-Shifa, d’autres dans des écoles, ou encore chez des proches ou des amis. Jusqu’au jour où l’armée israélienne a attaqué les écoles, l’hôpital Al-Shifa et tout ce quartier. Ils ont dû fuir à nouveau vers Nusseirat, au centre de la Bande. Puis, encore une fois, quand Nusseirat a été attaqué, partir sous les bombes vers Rafah. C’était en janvier. Mon beau-père et sa famille sont arrivés à une heure du matin par la route qui longe la côte, au rond-point Al-Alam, à l’entrée ouest de Rafah. Cette nuit-là, il pleuvait des cordes.
Ils sont restés dans la rue, sous la pluie, jusqu’au matin. Nous étions déjà à Rafah, mais nous ne savions même pas qu’ils étaient partis de Nusseirat. Les communications étaient coupées, nous ne pouvions pas les appeler. Nous nous demandions s’ils étaient restés là-bas, s’ils avaient été bombardés, s’ils étaient encore vivants… Et puis le lendemain matin, on les a trouvés. Les enfants de Souleimane ont commencé à acheter quelques bouts de bois et du plastique pour faire des bâches et s’installer, parce que trouver une tente à Rafah tient du miracle. J’ai essayé plusieurs fois de leur trouver une tente ou deux parce qu’ils étaient nombreux – une trentaine de personnes —, il leur fallait minimum quatre ou cinq tentes. J’ai essayé tous les moyens, j’ai demandé à mes contacts, mes amis, les ONG que je connaissais. En vain malheureusement. Ils sont restés sous les bâches, qui se sont multipliés au fil de temps.
L’endroit où ils étaient est devenu surpeuplé. Tous les réfugiés du nord, de Nusseirat ou même de Khan Younès, la ville la plus proche, sont venus s’y installer. Souleimane et les siens ont creusé un petit puits à côté des bâches pour en faire des toilettes, pour ne pas avoir à faire des centaines de mètres, voire des kilomètres, pour aller aux toilettes des mosquées ou des écoles. Voilà comment vivent les déplacés de Rafah. Ils ont utilisé le système D dans lequel nous excellons, nous Palestiniens. Nous sommes un peuple qui s’adapte toujours, très vite. Malheureusement, ce n’est pas un atout. Car s’adapter toujours, même dans les pires situations, c’est aussi un peu accepter le mal sans s’en rendre compte. On ne se révolte pas, on s’adapte tout de suite.
J’allais les voir plusieurs fois dans la semaine, et je parlais avec mon beau-père.
La première chose qu’il m’a dite, c’était :
Rami, je suis né en 1948, j’ai grandi en voyant arriver les réfugiés. Ils venaient de Haïfa, de Jaffa, d’Ashdod. Quand j’ai eu cinq ou six ans, je me suis demandé : pourquoi ces gens ont quitté leur maison ? Pourquoi ils ne sont pas restés affronter l’ennemi ? Aujourd’hui j’ai compris pourquoi.
Parce qu’à 76 ans, un homme qui n’avait pas peur de la mort, qui savait qu’il allait mourir bientôt, avait peur non pour lui, mais pour ses enfants et ses petits-enfants. Il avait pris la décision de partir pour les protéger, parce qu’il avait vu comment cette armée avait commencé à massacrer sans pitié, sans faire la distinction entre les personnes âgées, les jeune garçons, les bébés, les femmes. C’était juste une vengeance aveugle pour ce qui s’était passé. Et puis ils ont profité de cette vengeance pour nous déplacer tous. Le scénario de 1948 était en train de se répéter, pensait-il.
Il me disait aussi :
Maintenant je comprends très bien l’humiliation de devenir un réfugié, de vivre sous une tente. J’ai peur que ces tentes se transforment à leur tour en camps de réfugiés, comme ça s’est passé à Gaza ou ailleurs.
Mon beau-père me racontait que lorsqu’il était enfant, il voyait les gens arriver avec en main la clé de leur maison. « Maintenant, moi aussi j’ai dans la main la clé de chez moi. Mais je sais que moi non plus, je ne vais pas y retourner ». Car il savait très bien que s’il rentrait à Chadjaya, il n’allait pas retrouver sa maison. Deux jours plus tard, il a appris que son immeuble avait été détruit.
Cette maison, il l’avait construite pour ses enfants, après avoir travaillé toute sa vie comme entrepreneur. Nous autres Palestiniens avons un esprit de famille très fort. Dans notre tradition, le rêve de chaque parent palestinien est de donner un toit à ses enfants, et de leur permettre de faire des études.
La maison de mon beau-père était le second immeuble qu’il construisait pour sa famille. Le premier avait été détruit une première fois pendant l’offensive israélienne de 2014. Il l’avait rebâti avec ce qu’on appelait « l’argent de la reconstruction », versé par plusieurs pays donateurs, dont le Qatar. En octobre 2023, quand l’attaque israélienne a commencé, la nouvelle maison n’était pas encore terminée, il restait le cinquième étage à construire. Il m’avait dit : « J’ai perdu ma maison pour la deuxième fois, mais je crois que cette fois-ci, on ne la reconstruira pas ».
C’était l’investissement de toute une vie. Souleimane avait commencé à travailler très tôt, à l’âge de seize ans, d’abord en Israël. Il est ensuite parti en Libye, en Égypte, au Soudan, en Tunisie et même à Malte. Après avoir fait construire cet immeuble familial, il a acheté des parcelles de terrain agricole, dont la superficie était de 35 dunams à peu près (près de 35 000 mètres carrés), toujours dans ce même quartier de Chadjaya. Il me disait : « J’en avais rêvé toute ma vie ».
Mais le rêve réalisé n’a pas duré très longtemps. En 2005, ce terrain s’est retrouvé à l’intérieur de la « zone tampon » qu’Israël a établi le long du mur entre la bande de Gaza et le territoire israélien, à l’est de Chadjaya. Depuis, mon beau-père ne pouvait plus y accéder. Il me disait que cette trentaine de dunams était pleine d’arbres fruitiers, qu’il y avait là « tout ce que tu peux imaginer ». À chaque fois que j’allais lui rendre visite, je le reconnaissais de moins en moins. Souleimane était une forte personnalité, il avait un fort caractère, il restait solide même dans les conditions de vie les plus difficiles. Mais là, je voyais quelqu’un qui était en train de céder petit à petit face à la misère et au désespoir. Son fils Mahmoud, 21 ans, devait se marier le 3 novembre. Tout était prêt, la salle de mariage, l’appartement où le couple allait habiter, toute la famille se réjouissait. Mais la guerre a commencé, et l’espoir de mon beau-père de voir son fils marié s’est envolé.
Je regardais ce vieil homme qui était en train de perdre la volonté de vivre. À chaque visite, je le trouvais de plus en plus pessimiste. Sa santé se détériorait, mais il ne voulait pas aller à l’hôpital. Il me disait : « Rami, je sais très bien comment c’est dans les hôpitaux. Il y a 36 000 malades. Déjà que notre système de santé n’était pas super, mais avec la guerre ça a empiré. Si je vais à l’hôpital, ça va mal finir ». La dernière fois je l’ai vu, c’était il y a quatre jours. Je voyais dans ses yeux la tristesse de devoir vivre ainsi. Et pour la première fois, cet homme au fort caractère a avoué :
Rami, je n’en peux plus. Je ne peux plus supporter cette misère, je ne peux plus supporter cette vie. Je ne peux plus supporter de voir mes enfants humiliés, dormir dans les rues, sous des tentes, sous des bâches. Je n’en peux plus.
Quelque chose brillait dans ses yeux, pas tout à fait des larmes, mais c’était la première fois que je le voyais ainsi. C’est là que j’ai compris que c’était la chute d’un aigle qui, après avoir réussi à survoler les périodes les plus dures de sa vie, descendait vers la terre, parce qu’il n’avait plus de force. On devait lui rendre visite vendredi, mais ses enfants nous on dit qu’une ambulance venait de l’emmener à l’hôpital. J’ai compris que s’il avait accepté cela, c’est qu’il était vraiment au bout. Une demi-heure après, son fils nous a annoncé qu’il était parti se reposer en paix.
C’est donc cela la vie sous l’humiliation. L’humiliation d’être chassé de chez soi, l’humiliation sous les bombes, d’être tué comme dans des jeux vidéo par quelqu’un devant un écran qui appuie sur un bouton, qui n’a même pas besoin d’affronter, ni même de regarder ceux qu’il tue. L’humiliation de faire la queue pour trouver à manger. Mon beau-père me disait : « Toute ma vie, je n’ai compté que sur moi-même. Et aujourd’hui, on a dépensé toutes nos économies et, pour la première fois de notre vie, on demande de l’aide humanitaire pour se nourrir ».
On est allés le chercher à l’hôpital mais ils nous ont dit qu’il fallait l’enterrer immédiatement, parce qu’il n’y a plus de place dans les morgues. Il est mort à l’Hôpital européen, qui est à l’autre bout de Rafah, à l’est, alors qu’il s’était abrité à l’ouest, du côté de la mer. Il n’y avait plus de moyen de transport pour le ramener. D’habitude, quand quelqu’un meurt, il y a tout un rituel pour l’enterrer dignement : on le lave, on le ramène chez lui, pour que la famille et les voisins lui disent au revoir. Puis on l’emmène au cimetière et on l’enterre avec son nom sur la tombe, et on prie avec tous ceux qui sont là.
Mais tout cela n’existe plus.
J’ai pris la décision, avec Sabah, d’aller à l’hôpital, pour qu’elle le voie une dernière fois. Il n’y avait même pas d’ambulance. On a mis le corps dans un minibus que quelqu’un nous a prêté pour l’emmener dans un cimetière de fortune juste à côté de l’Hôpital européen, car le cimetière principal de Khan Younès a été profané par les troupes israéliennes. On était six personnes à assister à l’enterrement.
On a compté les tombes qui se trouvaient à côté de la sienne pour pouvoir la retrouver, car aucune ne porte de nom. On l’a mis dans un sac en plastique — ce qui ne se fait pas d’habitude — au cas où on pourrait un jour venir le chercher et l’enterrer dignement à Gaza. Des milliers de personnes ont vécu ce genre de moments horribles.
L’humiliation nous poursuit jusqu’à la tombe. On ne peut même pas recevoir dignement les condoléances. D’habitude, ont met des centaines de chaises sous une tente de deuil, et tout le monde vient. Là, on a posé deux ou trois chaises, les gens venaient nous saluer et s’en allaient tout de suite. Souleimane n’était qu’un nom parmi le million et demi de déplacés qui s’entassent à Rafah. Un homme de plus qui a quitté cette vie pour ne plus souffrir de l’humiliation.
Quand il m’avait dit « je n’en peux plus », il a ajouté : « Il n’y a plus de justice dans cette vie, il faut aller chercher la justice ». Je n’avais pas bien compris alors. Mais maintenant je comprends qu’il voulait aller chercher la justice dans l’au-delà. J’espère qu’il repose en paix maintenant, avec les plus de 30 000 personnes qui ont été tuées.
Souleimane n’a pas été tué par les bombes, mais il est mort à cause des bombes. Il a perdu espoir et il est allé chercher la justice.
Dimanche 31 mars 2024.
https://orientxxi.info/dossiers-et-series/mon-beau-pere-a-quitte-cette-vie-pour-ne-plus-souffrir-de-l-humiliation,7200
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Rédigé le 03/04/2024 à 20:58 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Non je ne pleure pas parce que je coupe des oignons, mais parce que je coupe des patates ! Ce matin je me suis précipitée sur le premier supermarché pour faire quelques provisions : oignons, tomates et pomme de terre… Arrivée chez moi, j’ouvre mon sac de pommes de terre et qu’est-ce que je découvre sur l’étiquette bien planquée ? Que ça provient d’Israël… j’ai envie de chialer. Ça m’énerve… je suis vénère !!! Olé… l’Espagne importe des pommes volées à la terre des palestiniens et moi qu’est-ce que je fais : du recel… je paye Israël pour consolider son projet criminel.Et comme je l’ai ouvert, je ne peux ni le rendre, ni l’échanger… je suis piégée, où avais-je la tête pour être aussi bête ? Mais bien sûr, je viens d’avoir une petite idée… désolée de ne pas vous la révéler parce que je redoute la censure.Je vous laisse deviner !!!
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Rédigé le 30/03/2024 à 20:16 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter son appartement de la ville de Gaza avec sa femme et son fils Walid, deux ans et demi. Il partage maintenant un appartement de deux chambres avec une autre famille. Il raconte son quotidien et celui des Gazaouis de Rafah, coincés dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Cet espace lui est dédié.
Jeudi 28 mars 2024.
Aujourd’hui j’ai une très bonne nouvelle à vous annoncer. Walid, mon fils de deux ans et demi, a mangé un « jaja » - dans le langage enfantin de mon fils, un « jaja » (dajaj en arabe) c’est un poulet. Je vous ai déjà raconté comment Walid demandait un « jaja », et que je ne pouvais pas lui en trouver. Il a toujours adoré le poulet. Mais depuis le début de la guerre, avant même qu’on quitte Gaza-ville pour Rafah, il n’en avait pas mangé. Et à chaque fois qu’il regardait son dessin animé favori, où on voyait des enfants manger du poulet, il se mettait à répéter : « Papa, je veux jaja, jaja, jaja ! » Hier, j’ai pu lui en acheter. C’est un luxe pour les réfugiés que nous sommes devenus.
Si j’ai pu me le permettre, c’est parce que ces derniers jours, il arrive un peu plus de marchandises que d’habitude, et que les prix ont baissé. Enfin, relativement. On n’est pas revenus à la situation d’avant l’invasion israélienne, mais au lieu d’être multipliés par vingt, les prix des denrées alimentaires sont maintenant multipliés par dix.
Le poulet est un bon exemple. Avant la guerre, un poulet coûtait entre 10 et 15 shekels (entre 2,5 et 3,75 euros). Puis il est passé à 80, voire 100 shekels (entre 20 et 25 euros). Et maintenant j’ai pu l’acheter à 50 shekels. On est donc passé de dix fois le prix à cinq fois le prix. Ça reste trop cher pour du poulet congelé importé d’Égypte, que je n’achetais pas avant parce qu’on n’est jamais sûr des conditions de transports et de conservation. Que dire aujourd’hui, avec les camions qui attendent pendant des jours avant d’entrer dans la bande de Gaza.
Mais je n’ai pas pu dire non à Walid.
Mais ça, c’était mardi. Aujourd’hui jeudi, le même « jaja » est descendu à 30 shekels. Une baisse des deux tiers en trois jours. Les prix d’autres produits ont également baissé. Le sucre qui était à 70 shekels (17,5 euros), maintenant on l’achète à 40 shekels (10 shekels), voire 35, soit jusqu’à une baisse de 50 %. Le sac de farine de 25 kilos coûtait entre 200 et 300 shekels. Aujourd’hui, il est à 35 shekels, soit à peu près son prix normal. Faire du pain était devenu trop cher. On va pouvoir recommencer à en manger.
Les pommes sont réapparues, et il y a même une variété qu’on ne trouvait plus depuis longtemps. Walid les adore. Mais leur prix est toujours aussi cher : 35 shekels le kilo, alors qu’avant il était à 24 ou 30 shekels au maximum.
J’ai voulu connaître la cause de ce brusque changement. J’ai essayé de joindre le ministère de l’économie, mais je n’ai pas eu de réponse. Les services sont très désorganisés – évidemment — et les fonctionnaires évitent sans doute d’utiliser le téléphone, de peur de se faire repérer. J’ai continué mon enquête. Elle concerne, je le rappelle, la situation des quelque 1,5 million de Palestiniens réfugiés au sud de la bande de Gaza, qui est coupée en deux par une route qui la traverse d’est en ouest et qui devient de plus en plus une frontière. Au nord, où se trouve la ville de Gaza et où sont restées quelque 400 000 personnes, la situation est pire.
On dit que la raison de cette baisse des prix est que le Hamas aurait cessé de prélever des taxes sur l’aide alimentaire. J’ai contacté des transporteurs et des importateurs privés (environ un tiers de l’aide alimentaire est privée, et soumise aux lois du marché). Ils me disent que c’est faux, que le Hamas n’a jamais prélevé de taxes.
Il y a d’autres raisons, que je ne peux certifier à 100 % mais qui me semblent très plausibles. D’abord, depuis une semaine à peu près, les Israéliens laissent passer plus de camions, surtout ceux du secteur privé. Je ne sais pas si c’est sous la pression des Américains, des Égyptiens ou des deux, mais c’est un fait.
Il y a peu de temps encore, il entrait à peine cinq à dix camions par jour dans Gaza. Là, on est arrivé à 50, voire 60 camions du secteur privé par jour. Deuxième changement : le Hamas a cessé de vouloir fixer des prix plancher. Cela peut sembler paradoxal, mais ce système n’a pas fonctionné. Voilà comment cela se passait : les autorités du Hamas avaient créé des « points de distribution ». Ils obligeaient les entrepreneurs privés à livrer leurs cargaisons dans des lieux désignés, en général des boutiques, des épiceries qui avaient été rouvertes pour l’occasion. De là, les denrées devaient être revendues à prix fixes. Mais cette méthode a échoué. Comme le Hamas ne pouvait pas envoyer assez de gens sur le terrain pour faire la police, un marché noir s’est crée aussitôt. Beaucoup de monde s’y est mis. Les transporteurs ne livraient qu’une partie de la marchandise dans les boutiques. Les boutiquiers en détournaient une autre partie une fois les denrées livrées. Il est même possible qu’en amont, quelques fonctionnaires chargés de surveiller l’arrivée des camions à la frontière aient pu participer au trafic.
Dans toutes les guerres, il y a des profiteurs. Même dans le massacre en continu de la bande de Gaza. La rareté des marchandises faisait monter les prix. Des files d’attente gigantesques se formaient devant ces points de distribution. Ceux qui le pouvaient achetaient au marché noir. On savait très bien dans quelle rue, dans quelle maison aller. Les trafiquants ont fait beaucoup d’argent, et ils continuent.
Le Hamas a dû se rendre compte que son idée ne fonctionnait pas, et que les réfugiés l’en rendaient responsable. Les points de distribution ont donc été supprimés. Du coup, et avec la relative augmentation du nombre de camions entrant par la frontière égyptienne, une petite concurrence a pu s’établir entre les acteurs du secteur privé, les quelques transporteurs (choisis par les Israéliens, rappelons-le) et entre les commerçants.
L’aide de l’ONU était aussi parfois revendue. Parfois, c’était des gens qui revendaient un sac de farine qu’ils avaient pu toucher pour se procurer d’autres ingrédients. Mais il semble que ça diminue. En l’absence de monnaie, les gens recourent de plus en plus au troc.
C’est là la dernière raison de la baisse des prix, mais qui est aussi importante : au bout de presque sept mois de guerre, les gens ont de moins en moins d’argent, qu’il s’agisse des déplacés — comme nous — ou des habitants du sud de la bande. Ils ont perdu leur travail, leurs maisons, tout ou partie de leur salaire. Car la majorité des habitants et des déplacés sont des fonctionnaires de l’Autorité palestinienne (AP) de Ramallah, qui continue à les payer malgré la prise de pouvoir du Hamas en 2007, même si l’administration du Hamas ne les emploie plus. Mais l’AP ne leur verse plus qu’une partie de leur traitement, à peu près la moitié. Mais le mois prochain, ils vont monter à 70 % du montant initial. Quant aux fonctionnaires du Hamas, ils ont vu leur traitement diminuer ces quatre derniers mois : ils reçoivent maintenant dit-on 800 shekels (200 euros) environ, à peu près tous les quarante jours. De toute façon, ces sommes ne sont pas suffisantes pour vivre.
Ceux qui avaient des économies les ont maintenant dépensées. Moi par exemple, j’avais mis un peu d’argent de côté pour les périodes de crise, et j’ai tout dépensé. Heureusement je reçois quelques rémunérations des médias avec qui je travaille, mais recevoir de l’argent à Rafah, c’est compliqué. Certaines banques étrangères, en particulier en France, refusent les virements vers Gaza, ou la Palestine en général. Mais le plus gros problème, c’est le manque de liquide, indispensable pour faire les courses.
À Rafah, il y a une seule banque qui fonctionne, la Banque de Palestine, avec deux agences et deux distributeurs automatiques de billets. Les files d’attente devant ces guichets sont interminables. Les derniers salaires ont été versés le 10 mars, et aujourd’hui, alors que la fin du mois approche, il y a toujours la queue. Et encore, les retraits sont limités à 1000 ou 2000 shekels (250 à 500 euros), ça dépend des périodes. Alors la banque dit qu’elle n’a plus de shekels, elle donne des dinars jordaniens, autre monnaie en vigueur à Gaza, à la place. Il faut alors les convertir sur le marché à un taux prohibitif, avec environ 20 % de perte. Les gens peuvent aussi retirer du cash directement dans les bureaux de change qui profitent de leurs liens avec les directeurs de banque pour servir d’intermédiaires, en prenant une commission entre 20 et 25 %.
Les commerçants ont de moins en moins de dollars pour acheter de la marchandise en Égypte. On subit plusieurs guerres à Gaza. La guerre des massacres et des boucheries commises par l’armée israélienne, et la guerre des prix, des commerçants et des banques. Les gens ici sont vraiment épuisés par la misère, la vie sous les tentes, le manque de tout. Je pensais à tout ça pendant quand je faisais le tour du quartier, pour trouver quelque chose à acheter. J’ai fini par rapporter un petit plat de mouloukhiya pour l’iftar (le repas de rupture du jeûne le soir). Pour la première fois depuis six mois, nous avons pu en manger avec du poulet.
Quand j’ai vu le sourire de Walid, qui adore aussi la mouloukhiya, c’était le bonheur absolu. J’ai oublié la misère, la guerre, j’ai tout oublié. J’ai juste pensé que mon fils était content, qu’il mangeait ce qu’il aimait. On dit souvent des enfants qui réclament de manger ce qu’ils aiment qu’ils font des caprices. Eh bien je dis à tous les parents, y compris en France, que faire des caprices, c’est parfois nécessaire.
RAMI ABOU JAMOUS
https://orientxxi.info/dossiers-et-series/dans-toutes-les-guerres-il-y-a-des-profiteurs,7191
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Rédigé le 29/03/2024 à 21:15 dans Gaza, Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
« Détruisez les Amalékites
17 « Souvenez-vous de ce qu'Amalek vous a fait sur le chemin alors que vous sortiez d'Égypte, 18 comment il vous rencontra sur le chemin et a attaqué vos rangs arrière, tous les retardataires à votre arrière, quand vous étiez fatigué et fatigué ; et il n'a pas craint Dieu. 19 C'est pourquoi, lorsque l'Éternel, votre Dieu, vous aura donné du repos de vos ennemis tout autour, dans le pays que l'Éternel, votre Dieu, vous donne pour posséder en héritage, que vous effacerez le souvenir d'Amalek sous le ciel. Vous n'oublierez pas ». (La Bible ; Deutéronome 25) https://www.biblegateway.com/passage/?search=Deuteronomy% 2025&version=NKJV) « Maintenant, allez-y, attaquez Amalek et proscrivez tout ce qui lui appartient. N'épargnez personne, mais tuez les hommes et les femmes, les nourrissons et les nourrices, les bœufs et les moutons, les chameaux et les ânes! » (La Bible, Samuel : 15 :3, The Amalekites (jewishvirtuallibrary.org))
Selon le Traité international de 1948, le génocide est un crime contre l'humanité si horrible qu'il est non seulement imprescriptible, mais qu'il oblige les Etats signataires à intervenir directement contre le pays où il est commis, compte non tenu du droit de ce pays à arguer du fait que sa souveraineté nationale ne saurait être violée en quelque circonstance que ce soit.
Israël : une colonie de peuplement, membre de l'ONU, mais exempte des lois internationales, un antimonde protégé par une bulle « sacrée » !
Bien que n'étant qu'une colonie de peuplement, dont 84 pour cent de la population juive a une double nationalité, et dont l'histoire de sa création n'a rien d'inconnu, « Israël » est un « membre légal de la communauté internationale ;» il a sa place dans les organismes internationaux comme l'ONU. Ainsi est-il sujet légal international, jouissant des mêmes droits et tenu aux mêmes obligations que tous les autres Etats.
Qu'il soit en train de commettre le crime de génocide, et qu'il soit, au sens du droit international, un occupant armé de la Palestine, dont Ghaza fait partie, nul ne le conteste, y compris l'Etat qui assure son protectorat et qui lui fournit 80 pour cent de ses armes et de ses munitions ! Pourtant, il semble bien qu'il jouisse d'un statut spécial dont on ne trouve aucune trace dans le vaste compendium du droit international écrit ou coutumier ! Et il échappe totalement à la législation internationale et aux mesures sanctionnant les récalcitrants de la « communauté internationale » qui en viole les lois !
Même lorsqu'il proclame qu'il commet délibérément un crime contre l'humanité en continu, reconnaissant sa culpabilité, il se présente comme la « victime d'attaques non justifiées », dont la seule motivation serait « une haine incassable » contre le « peuple juif » de la part de « fanatiques extrémistes » irrationnels qui « chercheraient sa perte », par purs « sentiments d'antisémitisme » et pour « répéter l'holocauste » dont les Juifs n'ont d'ailleurs pas été les seules victimes!
Toute cette rhétorique ne prouve ni l'innocence d'Israël, ni son droit à une immunité permanente, quelque condamnable que soit son objectif déclaré d'éliminer radicalement le peuple palestinien.
Alors que l'on fait croire que l'on soutient sans réserves l'Ukraine contre un « Etat hors la loi », et qu'on tente d'abattre cette puissance nucléaire en lui imposant un état de siège total, et en soumettant ses dirigeants à des mandats d'arrêt internationaux, la clique de criminels qui règne en Israël demeure non seulement impunie, mais continue à bénéficier d'un soutien politique et militaire illimité de la part de cette même « communauté » qui crie jour et nuit au scandale de ce qui se passe en Ukraine.
Tout en se proclamant membre de la communauté internationale, Israël est protégé par une bulle et forme un antimonde où toutes les lois internationales et les règles éthiques universellement acceptées sont foulées aux pieds, où les droits de l'homme sont les privilèges exclusifs d'une seule catégorie de groupe ethnico-religieux, où les bourreaux jouent aux victimes, et où les victimes sont traitées comme des bourreaux, etc. etc. Jusqu'à quand cet antimonde va-t-il continuer à être toléré par cette fameuse « communauté internationale » ?
Le génocide fait-il partie du droit au libre exercice de la religion ?
Ainsi, Netanyahou, le « Sioniste laïc », le « Juif non pratiquant », gauleiter de cet antimonde, et maitre d'œuvre autoproclamé du génocide du peuple palestinien, a-t-il donné, « urbi et orbi » et sans prendre la peine de s'en cacher, la justification religieuse de cette folie meurtrière qui se manifeste à Ghaza et sur toute la Palestine occupée, folie sanguinaire assumée publiquement, car il se sait jouir d'une impunité totale, au vu des puissantes protections internationales dont il bénéficie, et sous le couvert de la référence à l'Holocauste, et du « combat contre l'antisémitisme ».
« Amalek doit être éradiqué»
Selon ce que rapportent les medias : « dans son point de presse du 27 octobre, le Premier ministre israélien Netanyahu a cité une référence biblique à «Amalek» dans le contexte de la «destruction du Hamas» et pour «éradiquer ce mal du monde».
Sa référence biblique dément la présentation de l'agression en cours contre le peuple palestinien selon laquelle il s'agirait d'une guerre dirigée exclusivement contre une « organisation terroriste », et prouve, s'il le fallait encore, qu'il s'agit bien d'un génocide qui devrait aboutir à la liquidation physique de toute la population palestinienne, à Ghaza, comme d'ailleurs sur le reste du territoire de la Palestine historique.
Pourtant, aucun de ces donneurs de leçons impitoyables n'a jugé nécessaire de condamner, même verbalement, une telle justification religieuse claire et nette du génocide en cours du peuple palestinien.
Est-ce par scrupule religieux et pour éviter d'être accusés de blasphème que les dirigeants et médias des « démocraties avancées ont décidé de mettre un embargo sur une justification religieuse du génocide en cours à Ghaza ?
« Génocide : un commandement de la Torah »
Sous le titre « L'histoire dangereuse derrière la rhétorique Amalek de Netanyahou » (The Dangerous History Behind Netanyahu's Amalek Rhetoric Mother Jones, 3 novembre 2023). Noah Lanard a rappelé que : « Sa récente référence biblique a longtemps été utilisée par l'extrême droite israélienne pour justifier le meurtre de Palestiniens. »
Lanard a ajouté :
« Ce qui semblait bizarre à beaucoup, c'était une justification religieuse très intentionnelle pour le nettoyage ethnique par Israël des hommes, des femmes et des enfants palestiniens de Gaza. »
Il continue : « Il y a plus de 23 000 versets dans l'Ancien Testament. Ceux vers lesquels Netanyahou s'est tourné, alors que les forces israéliennes ont lancé leur invasion terrestre à Gaza, sont parmi les plus violents - et ont une longue histoire d'être utilisés par les Juifs d'extrême droite pour justifier le meurtre de Palestiniens. » « Il demeure courant que les extrémistes israéliens considèrent les Palestiniens comme des Amalékites modernes. En 1980, le rabbin Israël Hess a écrit un article qui utilisait l'histoire d'Amalek pour justifier l'anéantissement des Palestiniens. Son titre a été traduit par « Génocide : un commandement de la Torah », ainsi que « La Mitzvah du génocide dans la Torah. »
La fête juive du Purim célèbre l'achèvement du génocide des Amalékites
Suivant Lanard, le Docteur Shanes, professeur d'études juives à l'université de Charleston a expliqué que l'animosité biblique envers les Amalékites : « découle de ce qui est décrit comme l'embuscade impitoyable qu'ils ont lancée contre les Israélites vulnérables qui se dirigent vers la terre promise (au temps du Prophète Moïse, ndt). L'attaque conduit Dieu à ordonner à Moïse d'anéantir Amalek. Des centaines d'années plus tard, Saül remplit presque le commandement en tuant tous les hommes, femmes et enfants amalékites. »
Lanard ajoute :
« Les Juifs écoutent traditionnellement au cours du service du Shabbat, et avant la fête de Purim, l'histoire de l'embuscade d'Amalek et l'ordre divin d'éliminer cette tribu. Shanes a dit que c'était peut-être la plus importante de toutes les lectures rituelles de la Torah. »
Shanes établit ainsi la liaison entre le génocide des Amalékites et la commémoration juive du Purim, qui, cette année, se déroule du Samedi 23 Mars au soir du Dimanche 24 mars.
A rappeler que les Amalékites étaient une tribu arabe qui habitait, du temps de Moïse, le Sinaï et le territoire de Gaza.
En conclusion
1. Le génocide actuel a été justifié par Netanyahou comme un « commandement divin », tiré de la Bible et « ordonnant le massacre par les Juifs des « Amalékites », ancienne tribu arabe localisée dans le Sinaï et à Gaza, à l'époque de Moïse, c'est-à-dire il y a prés de 4000 années de cela ;
2. Ce génocide est rappelé lors de la fête juive de Purim (23 et 24 Mars 2024) qui célèbre l'achèvement de cette extermination ;
3. Une question pertinente se pose alors : le génocide du peuple palestinien, assimilé aux Amalékites par Netanyahou n'est-il que la répétition du génocide de ses ancêtres, et un devoir religieux, faisant parti des piliers de la religion juive ? Le dénoncer est-il un blasphème dérogatoire à la religion juive ?
4. Devant la barbarie « juive » qui a atteint une violence rare depuis le 7 octobre 2023, peut-on encore proclamer, comme le font les dirigeants « des démocraties avancées » qu'Israël partagerait avec elles « des valeurs, communes », qui justifieraient l'appui illimité, tant politiquement que militairement et sans réserves qu'elles lui apportent, tout en multipliant les déclarations rhétoriques verbales « humanitaires » et les paroles de commisération envers le peuple palestinien ?
5. Le comble de la cruauté, du cynisme et de l'hypocrisie « humanitaire, » que n'accompagne aucune sanction directe et immédiate contre les perpétrateurs juifs sionistes, n'atteint-il pas des sommets qui enlèvent toute crédibilité à la gesticulation actuelle autour du drame du peuple palestinien ?
6. Alors qu'Israël insiste et persiste dans sa volonté d'achever le génocide programmé du peuple palestinien, quoi qu'il en coûte, et quelles que soient les protestations timides des puissances de monde, les appels à « une solution politique », sans mesures concrètes les accompagnant, ne sont-ils pas en fait un encouragement aux dirigeants sionistes de compléter ce génocide ?
7. Le temps n'est il pas venu de proclamer qu'Israël est un Etat voyou, qui mérite d'être banni de la communauté internationale, et dont tous les dirigeants devraient faire l'objet d'un mandat d'arrêt international émis par la Cours pénale internationale ?
8. Il est difficile , sinon, de comprendre que le chef d'Etat d'une superpuissance soit l'objet d'un mandat d'arrêt international pour avoir fait évacuer des enfants en zone de guerre, tandis que les dirigeants sionistes, qui ont à leur actif le meurtre de plus de 12000 enfants, sans compter les disparitions, la famine, l'épouvante, qui fait partie du quotidien des survivants, continuent à perpétrer leur projet génocidaire -qu'ils ne cachent nullement- et sans relâche, et insistent pour l'achever, sans doute à l'occasion d'une des fêtes du Purim qui célèbre le fin du génocide de l'antique tribu arabe des Amalékites ?
9. Le droit au génocide qu'Israël s'arroge au nom de ses livres saints fait-il partie de la liberté religieuse telle qu'interprétée par le Sionisme ? Ou Israël forme-t-elle un antimonde protégé par une bulle, et dans lequel toutes les lois humaines, écrites ou coutumières, sont suspendues et/ou inversées au profit d'un seul groupe ethnico-religieux ?
10. Finalement, Vladimir Poutine, chrétien orthodoxe convaincu, et dont la Bible est un des livres saints, peut-il se référer aux mêmes extraits de ce livre pour justifier sa campagne en Ukraine ? Pourra-t-il bénéficier des mêmes scrupules religieux que la colonie de peuplement d'Israël pour mener ses opérations sur ce « territoire disputé ? »
C'est là une question d'autant plus pertinente que ses opposants internationaux basent leur argumentation, leur hargne et leur acharnement contre lui sur les lois internationales pour lesquelles Israël manifeste le mépris les plus total, et qu'elle viole délibérément et en flux continu!
par Mourad Benachenhou
Jeudi 28 mars 2024
https://www.lequotidien-oran.com/?news=5328709
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Rédigé le 29/03/2024 à 07:40 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Voilà bientôt six longs mois que le peuple palestinien subit une des pires agressions de l'histoire contemporaine, un exemple rarissime d'une conspiration universelle ayant pour seul objectif de permettre à l'état sioniste de réaliser ses rêves expansionnistes et de mettre fin à la résistance du peuple palestinien et sa soumission définitive au prix d'un massacre de grande ampleur qui n'épargne personne vivant dans l'enclave de Ghaza déjà éprouvée par un blocus de plus d'une décennie.
La conspiration
L'état sioniste n'a pas lésiné sur les moyens de destruction ; militaires avec des tonnes de bombes larguées réduisant en poussière maisons, écoles, universités, hôpitaux, infrastructures mais aussi économiques avec un embargo inhumain, sans faille ayant pour conséquence une famine généralisée avec des corps squelettiques nous rappelant des images de gamins Africains complètement décharnés ; une situation qui à l'époque a mobilisé Etats, artistes et médias pour en venir à bout contrairement aux enfants palestiniens laissés tristement à leur sort macabre dans l'indifférence totale ; mais aussi médiatique où tous les relais du sionisme mondial ont conjuré leurs efforts et mobilisé leurs journaux, plateaux télévisés, éditoriaux, réseaux sociaux afin de travestir le bourreau en victime et de relayer le tissu de mensonges et d'affabulations concernant des supposés agressions sexuelles, d'exécution d'enfants dont aucune preuve n'a pu étayer leurs affirmations, pas de photos, pas de témoins. Les organismes indépendants n'ont pas été autorisés à mener leur propre enquête pour en vérifier la véracité de ces allégations qui de jour en jour s'avèrent être que des scénarios de piètre facture. Toute cette mascarade est montée pour octroyer à l'agresseur un hypothétique droit de se défendre mais en réalité un chèque à blanc pour une vengeance aux racines bibliques.
Une situation exceptionnelle
Et chose presque unique dans les annales des guerres génocidaires et à l'heure de l'Internet et de la disponibilité d'images en temps réel qui témoignent de la bestialité de cet état greffé contre nature au sein du monde arabo-musulman par les puissances coloniales c'est que le peuple palestinien martyrisé s'est trouvé à quelques exceptions seul contre tous. Le monde dit libre n'a pas hésité à user de tout son poids pour apporter un soutien infaillible à l'agresseur sioniste en lui fournissant argent, armes, munitions et couverture politique et fait aussi exceptionnel c'est que des pays arabes ont contribué activement au malheur du peuple palestinien, soit en décrétant un embargo hermétique et assassin comme c'est le cas du régime égyptien ou bien en mettant en route un pont de ravitaillement en carburant destiné à alimenter la machine de guerre sioniste et en denrées de tout genre afin de contourner le guet-apens monté par les Yéménites au passage du détroit d'Ormuz ciblant les navires à destination des ports israéliens principalement Eilat et auquel prennent part les monarchies du Golfe et la Jordanie ; la contrepartie exigée est qu'Israël finisse une fois pour toutes avec les Ghazaouis dirigés par le Hamas qui les hante et dont l'idéologie représente à leurs yeux un danger mortel pour leurs régimes vacillants.
Bas les masques
Malgré l'étendue de la destruction et les pertes énormes en vies humaines, malgré le déséquilibre des forces en jeu ; la résistance palestinienne est arrivée à faire sortir la Cause du peuple palestinien de l'amnésie et de l'indifférence du monde et surtout de mettre à nu le vrai visage hideux du sionisme qui a longtemps berné l'opinion internationale en essayant de vendre l'image d'un pays démocratique et d'une armée éthique ; ce mensonge est en train de s'effondrer définitivement et aura certainement des conséquences sur le soutien, jusque-là infaillible, à cette entité créée de toutes pièces et qui déstabilise le monde voilà presque un siècle et risque d'être la cause d'une autre guerre mondiale. La résistance a aussi démasqué la nature des régimes arabes qui ont longtemps fait de la Cause palestinienne leur fonds de commerce ; elle vient de démontrer que seul le maintien au pouvoir contre la volonté de leur peuple qui les intéresse. Ils sont disposés pour cela à sacrifier des milliers de vies innocentes juste pour le conserver, même s'il faut s'allier et vendre son âme au diable.
Le salut tant espéré n'est pas venu des masses arabes et musulmanes réduites au silence par des régimes répressifs et antidémocratiques mais plutôt par l'opinion publique occidentale qui a pesé sur la décision du Conseil de sécurité et avouons-le la démarche de l'Algérie en tant que membre non permanent, a contribué au succès de la résolution qui sans être idéale car elle exige la libération des « otages » sans contrepartie, faisant fi de l'étendue de la destruction, des milliers de morts et de blessés et d'autres milliers de prisonniers et otages palestiniens qu'on s'efforce volontairement de citer ; elle aura au moins la finalité d'atténuer les souffrances endurées par les Ghazaouis et qu'Israël mu par un esprit sadique ne manquera sûrement pas d'y trouver tous les prétextes pour faire durer leur calvaire.
La résolution du Conseil de sécurité intimant l'état d'Israël de cesser le feu bien qu'elle ait peu de chances d'aboutir car consciente de l'impunité dont elle jouit, de l'hypocrisie et de la protection des puissances impérialistes a été le fruit de la pression de l'opinion publique internationale sur leurs dirigeants acquis à la cause sioniste, corps et âme, en particulier sur l'administration américaine. Biden risque sérieusement de perdre les élections prochaines à cause de son soutien aveugle à l'état extrémiste d'Israël et de sa contribution au génocide des Palestiniens dénoncée vertement par ses propres concitoyens, le scrutin se joue souvent à quelques milliers de voix celles des Arabes et musulmans américains compteront sûrement sur la balance.
C'est aussi un précédent dans les relations intimes et fusionnelles entre les États Unis et Israël qui depuis sa création dispose de facto d'un droit de véto par les USA interposés qu'il utilise à sa guise pour se prémunir de toute condamnation ou injonction au point qu'il a acquis la certitude d'une impunité totale, face à tous les crimes commis ou à commettre.
Le boycott comme arme fatale.
Cette résolution aura aussi le mérite de mettre en place des sanctions internationales ; seule arme efficace contre la sauvagerie de l'état hébreux et une chance pour le peuple palestinien de recouvrir ses droits et sa liberté. Elle a d'ailleurs déjà fait ses preuves par le passé en venant à bout du régime d'apartheid d'antan en Afrique du Sud.
Et comme tête de flèche on cite le mouvement BDS (acronyme de Boycott-Désinvestissement-Sanctions) qui à travers le monde trouvera son action amplement justifiée et renforcée, il en gagnera de plus en plus d'adeptes bien qu'il ait été entravé dans son déploiement par des mesures juridiques répressives aux pays de la liberté en France par exemple. Après une rude bataille juridique menée par les supporters de la Cause palestinienne la Cour de cassation de Paris vient de juger légitime les actions de boycott précédemment interdites et jugées illégales ; le boycott sera désormais susceptible de mettre fin à l'arrogance d'un état qui a entretenu, jusque-là une image usurpée d'une puissance militaire, économique et technologique mais qui, en fin de compte, n'a pu résister aux assauts de combattants légèrement armés mais bien déterminés un certain 07 Octobre et qui sans le soutien sans limites des puissances mondiales et des régimes arabes « normalisateurs » corrompus et soumis, aurait abdiqué en quelques semaines.
Cette image de puissance invincible est hélas déconstruite aux yeux des générations futures de Palestiniens qui nous donnent là un exemple unique de bravoure, de sacrifice, de résistance et d'une ténacité dans la réclamation de leurs droits inaliénables. Le prix est certes onéreux mais ce qui a été confisqué par la force ne peut être récupéré que par la force ; un adage toujours d'actualité. La voie des pourparlers et des négociations sans fin s'est avérée être sans issue comme en témoigne la situation en Cisjordanie où malgré les concessions et la compromission, les colonies ne cessent de croître, les assassinats sont devenus des faits divers auxquels on ne prête presque pas attention, la Cisjordanie est devenue un Bantoustan au service de l'oppresseur sioniste ; un exemple qu'Israël veut reproduire à Ghaza avec le soutien actif des traitres de tous bords.
Un espoir est né
La jeunesse occidentale y compris aux États Unis et selon les dernières statistiques, malgré le matraquage médiatique et les efforts pour la maintenir dans l'ignorance de la réalité semble avoir découvert le subterfuge et penche en sa majorité pour la Cause du peuple palestinien. Elle ne cesse de dénoncer de plus en plus et avec véhémence Israël et sa machine de haine, de meurtres et de mensonges. Le combat est acharné et déséquilibré mais l'espoir d'une justice persiste; cette fois-ci ils ne réussiront pas à faire des Palestiniens les méchants peaux rouges de l'Amérique qu'Hollywood avait dépeint dans notre imaginaire comme des sauvages et barbares qui méritent l'extermination.
par Bouchikhi Noureddin
Jeudi 28 mars 2024
https://www.lequotidien-oran.com/?news=5328708
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Rédigé le 28/03/2024 à 22:12 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Je ne voudrais surtout pas passer pour une antisémite Ça ne passe pas même si on fait vite... Et puis, ça risque de compromettre l'avenir de mon site Wallah, je ne suis pas antisémite ! Et ceux qui prétendent le contraire ont une méningite. Je ne sais pas si c'est un délit, en tout cas, c'est illicite...
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Rédigé le 26/03/2024 à 15:40 dans Israël, Italie, Lejournal Depersonne, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter son appartement de la ville de Gaza avec sa femme et son fils Walid, deux ans et demi. Il partage maintenant un appartement de deux chambres avec une autre famille. Il raconte son quotidien et celui des Gazaouis de Rafah, coincés dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Cet espace lui est dédié.
Trois dirigeants du Hamas ont été tués par l’armée israélienne ces derniers jours. Un à Gaza-ville, un à Nusseirat et le troisième au nord de la bande de Gaza. Tous trois étaient responsables de la coordination pour sécuriser l’aide humanitaire qui passe via les camions, depuis la frontière égyptienne à Rafah, jusqu’au nord de la bande de Gaza en passant par Gaza ville.
La date de leur assassinat ne doit rien au hasard. Il y a environ cinq jours, deux convois ont effectivement réussi à atteindre la ville de Gaza et le nord de la bande de Gaza. Ils ont livré leur cargaison de farine aux entrepôts de l’UNRWA à Jabaliya. Ces convois humanitaires venus d’Égypte n’ont pas été attaqués.
Pourquoi cela s’est bien passé ? Parce que le Hamas avait déployé ses hommes tout au long du parcours, sur la rue Salaheddine, la plupart armés de bâtons. Auparavant, l’organisation avait publié un communiqué disant qu’il ne fallait pas se trouver dans ces endroits-là, et ne pas tenter d’arrêter les camions, surtout sur ce qu’on appelle le rond-point du Koweït, là où des camions d’aide humanitaire ont été attaqués et où l’armée israélienne a tiré sur les gens. Ces gardes – pour la plupart des jeunes - déployés n’étaient pas des policiers, mais des militants du Hamas. Deux convois se sont donc succédé sans encombre pendant deux jours. Le troisième jour, les Israéliens les ont bombardés.
Il y aurait eu plus de vingt morts ce jour-là. Après quoi, l’armée israélienne a assassiné ces trois hommes. Le premier à l’hôpital Al-Chifa, le deuxième dans une voiture à Nusseirat et le troisième à côté d’un entrepôt de l’UNRWA je crois. Pourquoi ? Parce que ces hommes du Hamas organisaient la protection des convois terrestres. Leur efficacité n’a pas plu aux Israéliens. Le passage des camions sans difficulté menaçait de faire capoter leur projet de faire arriver l’aide humanitaire par la mer, et ça contredisait leur propagande comme quoi « le Hamas détourne l’aide ».
Pour comprendre leurs motivations, il faut savoir que dans le nord de la bande, la situation est encore pire qu’au sud. La famine s’est installée parmi les quelque 400 000 personnes qui n’ont pas fui vers le sud comme voulait les y pousser l’armée israélienne. Si les Israéliens veulent empêcher toute aide humanitaire de parvenir depuis le sud, c’est probablement parce qu’ils veulent séparer définitivement les deux parties de la bande, laissant le sud à l’Égypte, et faire du nord une zone tampon administrée par eux. Voilà pourquoi Israël cherche toujours à organiser le désordre pour pouvoir prétendre qu’il est impossible de faire passer l’aide par voie terrestre du sud vers le nord, qu’il y a des détournements, des attaques.
Ce qui rend les Israéliens furieux, c’est que le Hamas est toujours là, qu’il est encore puissant, et qu’il a résolu la question des pillages.
Les Israéliens veulent s’appuyer sur les « grandes familles » de Gaza, qui sont devenues en quelque sorte des clans mafieux et qui avaient pu, au début, attaquer les convois d’aide humanitaire. Le Hamas a réagi par la manière forte. On parle de l’exécution de treize membres de l’un de ces clans, je reviendrai dessus dans une prochaine page de mon journal pour Orient XXI.
Après l’assassinat des trois responsables de la protection des convois humanitaires, que peut-il se passer ? Le Hamas trouvera sans doute une solution. C’est un mouvement très bien organisé, de la base vers le sommet, qui a une hiérarchie très développée. Et sa dimension religieuse fait qu’il y a une grande loyauté envers les chefs et envers le mouvement en général.
D’ailleurs, les Israéliens croient-ils à leur propre propagande, quand ils disent que c’en est bientôt fini du Hamas ? Si c’est le cas, pourquoi sont-ils en train de négocier avec eux au Caire ? Éradiquer le Hamas ne se fera pas du jour au lendemain. Il faudrait au moins que l’armée israélienne occupe la bande de Gaza pendant au minimum deux ou trois ans pour y arriver.
RAMI ABOU JAMOUS
Journaliste palestinien à Gaza.
23 mars 2024.
https://orientxxi.info/dossiers-et-series/ce-qui-rend-les-israeliens-furieux-c-est-que-le-hamas-est-toujours-la,7164
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Rédigé le 23/03/2024 à 05:05 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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Rédigé le 21/03/2024 à 22:06 dans Israël, Palestine, Paléstine | Lien permanent | Commentaires (0)
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