Au nom de Safia, histoire d’un oubli
De qui porte-t-on le nom ? Dans le documentaire “Au nom de Safia”, Safia Kessas part la recherche d’une vie, celle de sa tante, qui, comme tant d’autres lors de la guerre d’indépendance algérienne, a été silenciée.
Comment l’histoire individuelle raconte-t-elle l’Histoire qui nous concerne tous·te·s ? Quelle est la place du journaliste, quand celui ou celle-ci raconte sa propre histoire ? Et comment redonner la voix aux invisibles, aux sans-voix, aux oublié·e·s de l’Histoire ?
Thomas Rozec interroge Safia Kessas, journaliste et réalisatrice
Une interview inachevée de son père Tayeb Kessas en février 2019 a laissé des questions en suspens. Dans cet échange, l’ombre d’une autre Safia, sa tante, est apparue. Les circonstances de sa mort lors de la guerre d’indépendance algérienne sont restées extrêmement floues.
Il y autour de cette disparition un immense voile de mystère, le poids du silence, de la mémoire brouillée.
À partir de ce fragment d’histoire familiale que l’autrice porte sur sa carte d’identité, cette série documentaire part sur les traces de cette autre Safia, sa tante, pour tenter de retracer le fil de cette femme, une vie qui, comme tant d’autres lors de la guerre d’indépendance algérienne, a été silenciée.
Alors qu’on célèbre cette année les 60 ans de l’indépendance de l’Algérie, et pour raconter cette histoire du brouillage mémoriel, de cette non-transmission de l’histoire, des non-dits, ou des effacements de mémoire, Safia part à la recherche de sa propre histoire familiale pour contrer la transmission des silences et faire éclore la vérité, parfois contre les versions officielles de l’Histoire.
Une série de Safia Kessas, produite par Juliette Livartowski et réalisée par Quentin Bresson.
Épisode 1 :
Pour démarrer cette histoire, Safia rentre dans l’intimité de sa mère, chez elle, dans sa cuisine, par la nourriture. Elle lui parle des recettes kabyles qui la renvoient à son Algérie, sa scolarisation coloniale et civilisatrice, et de la guerre, de son exil forcé à sa rencontre avec Tayeb, son mari. Safia apprend des éléments nouveaux sur sa famille. Mais il y a des silences et des larmes qu’elle n’arrivera pas à percer.
Épisode 2 :
De la rencontre avec sa mère, Safia passe à l’interview posthume de son père. Tous deux reviennent sur les conditions de son exil vers la Belgique liée à la famine qui règnait en Kabylie et cliniquement décrite par Albert Camus, les massacres de Guelma, la répression de Papon à Paris tandis que Safia, sa tante, restée en Kabylie, se mariait sûrement.
Épisode 3 :
Son père apprend à Safia que sa soeur serait morte en 1956 lors d’un massacre, à Djenane, en Kabylie. Safia va tout faire pour connaître la vérité et découvrir ce qui est réellement arrivé à sa tante. La recherche prend une autre tournure et révèle les conditions d’un massacre de masse étouffé par les versions officielles françaises et qui a laissé les villageois.e.s dans un état de sidération.
Épisode 4 :
Épisode 4 : Safia rencontre pour la première fois son cousin, Mustapha, le fils de Safia, qui habite en banlieue parisienne. Un rendez-vous qu’il attendait depuis longtemps. Mustapha évoque ses traumatismes liés à la guerre et ses rêves brisés. Et il apporte à Safia de nouveaux éléments sur les circonstances de la mort de sa tante.
Épisode 5 :
Safia sent que c’est en Kabylie qu’elle se rapprochera de la vérité. Peut-être que là-bas, quelqu’un se souvient d’elle ?
Épisode 6 :
L’histoire de la tante de Safia a été brouillée dans les mémoires. Safia a tenté de trouver des réponses pour lui redonner vie. Au fil de son voyage, les souvenirs que lui ont confiées toutes ces personnes rencontrées en France, en Belgique, en Kabylie continuent à se déployer. Comme si la mémoire s’était remise à battre.
CRÉDITS
Programme B est un podcast de Binge Audio présenté par Thomas Rozec. Cet épisode a été produit en février 2022. Réalisation : Quentin Bresson. Production et édition : Juliette Livartowski et Lorraine Besse. Musique originale : YANE. Générique : François Clos et Thibault Lefranc. Identité sonore Binge Audio : Jean-Benoît Dunckel (musique) et Bonnie El Bokeili (voix). Identité graphique : Sébastien Brothier et Thomas Steffen (Upian). Direction des programmes : Joël Ronez. Direction de la rédaction : David Carzon. Direction générale : Gabrielle Boeri-Charles.
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